Le juge administratif et les principes généraux du droit
Par Stella0400 • 9 Juillet 2018 • 2 561 Mots (11 Pages) • 542 Vues
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B) Etendue des principes généraux du droit :
Bien que récente, la jurisprudence du juge administratif est féconde. Le juge administratif a poursuivi l’approfondissement de son corpus jurisprudentiel en matière de droits fondamentaux. La diversité des principes généraux du droit s’étend au fur et à mesure de leur découverte. En effet, depuis 1945, cette catégorie n’a cessé de s’enrichir.
1) Principes de la protection des administrés :
L’affirmation des droits de la défense et des droits de l’Homme a été le terrain principal de la découverte des principes généraux du droit par le juge administratif. A plusieurs reprises, méconnus par l’administration, ces droits se voient immanquablement réaffirmés par la justice administrative. Le Conseil d’Etat fait preuve de fermeté à l’égard de la prise de connaissance par l’intéressé des faits qui lui sont reprochés dans une procédure de sanction administrative, lui permettant ainsi d’assurer les moyens de sa défense (CE du 26 Octobre 1945, Sieur Aramu, CE du 5 Mai 1944 Dame Veuve Trompier-Gravier), de son égal accès au service public (CE du 9 mars 1951, Société des concerts du conservatoire « principe d’égalité qui régit le fonctionnement des services publics »; « le principe d’égalité implique que toutes les personnes se trouvant placées dans une situation identique à l’égard du service public doivent être réglées par les mêmes règles » GAJA n°61) ; de son égalité devant les charges publiques (CE du 7 février 1958, Syndicat des propriétaires de forêts de chênes-lièges d’Algérie document n°6) s’appuyant notamment sur la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen et sur le Préambule de la Constitution (se place en avance sur le Conseil conditionnel qui reconnait valeur conditionnel au Préambule de la Constitution que dans sa décision du 16 Juillet 1971). Le juge administratif étend son pouvoir à ce que l’on peut apparenter à la défense des droits de l’Homme puisqu’il va même poser comme principe l’interdiction de licenciement d’une femme enceinte (CE du 8 Juin 1973, Dame Peynet) et a même pu reconnaître l’existence de principes généraux relatifs au droit des réfugiés (CE du 2 Décembre 1994, Mme Agyepong).
2) Principes de la sécurité juridique :
Il existe différents principes généraux du droit qui ont vocation à assurer le bon fonctionnement de l’ordre juridique interne. En effet, dans un souci de protection des droits des administrés, le juge administratif a dégagé différents principes généraux du droit permettant de garantir la notion d’Etat de droit. Le juge administratif a pu découvrir le principe de non-rétroactivité des actes administratifs (CE du 25 Juin 1948, Société du journal l’Aurore, GAJA n°57), le droit d’exercer un recours pour excès de pouvoir contre toute décision administrative (CE du 17 février 1950, Dame Lamotte, GAJA n°58) ou encore d’abroger les règlements qui seraient illégaux (CE du 3 Février 1989 Compagnie Alitalia)
La liste des principes généraux du droit s’est considérablement enrichie au fil des dernières décennies, nous constatons que le Conseil d’Etat s’est attaché à affirmer le « droit à l’égalité des droits », « ce principe rayonne ainsi sur tout notre ordonnancement juridique » (Jean-Marc Sauvé vice-président du Conseil d’Etat) ce qui a pour conséquence de spécifier de plus en plus les principes généraux du droit comme le prouve le récent arrêt du Conseil d’Etat du 25 Septembre 2013, Madame Sadlon, qui interdit de « licencier avant reclassement, un agent contractuel bénéficiant d’un CDI, pour affecter un fonctionnaire sur le poste libéré ». Cependant, les principes généraux du droit restent un droit jurisprudentiel, il n’est pas donc écrit et ne peut donc s’insérer directement dans la hiérarchie des normes édictées par Kelsen. Néanmoins, ils ont une influence sur l’élaboration de cette dernière par la valeur qu’accorde le juge à ces principes. De ce fait, ils occupent une place particulière dans cette hiérarchie.
II. La valeur juridique accordée par le juge des principes généraux du droit.
La valeur des principes généraux du droit est sujette à de nombreux débats doctrinaux. La Conseil d’Etat a de son propre chef, évalué la valeur accordée aux principes généraux du droit (A) mais le positionnement des principes généraux du droit dans la hiérarchie des normes par le juge permet sur stabilité de cette dernière (B).
A) La valeur juridique accordée aux principes généraux du droit par le juge administratif :
1) Le juge accordant une supériorité des principes généraux du droit aux actes administratifs :
Même si la plupart de ces principes trouvent leur source dans le Préambule de la Constitution de 1958 à l’instar de ce que le Conseil constitutionnel fait pour dégager les principes fondamentaux, les principes généraux du droit n’ont aucune valeur constitutionnelle. Les principes généraux du droit ont seulement une valeur supérieure aux actes administratifs. L’analyse de Chapus prend comme point de départ le rôle du juge administratif et la portée de ses décisions. Il observe, tout d’abord, que le rôle du juge administratif est de contrôler les actes administratifs par rapport à la loi. Si un acte administratif est illégal, il peut donc l’annuler, et cela même s’il émane des plus hautes autorités administratives de l’Etat. La violation d’un principe générale du droit entraine l’annulation d’un acte administratif par le juge, qu’il soit réglementaire ou individuelle comme nous avons vu par les différentes décisions mentionnées précédemment. Par conséquent, les principes généraux du droit ont une valeur « supra-décrétale ».
2) Le juge érigeant les principes généraux du droit égaux au niveau de la loi :
Le Conseil d’Etat affirme à plusieurs reprises dans ses arrêts rendus, que les principes généraux du droit ont une valeur législative, comme l’affirme l’arrêt du 7 Février 1958, Syndicat des propriétaires de forêts de chênes-lièges d’Algérie (document n°6) « principes généraux du droit ayant valeur législative ». Ainsi, le juge administratif place lui-même les principes généraux du droit au même niveau que la loi et semble s’ériger en législateur. Par conséquent, le droit jurisprudentiel semble être érigé par le juge lui-même au rang de
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