Le juge administratif et les principes généraux du droit
Par Ramy • 9 Juin 2018 • 2 613 Mots (11 Pages) • 610 Vues
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Le juge administratif se pose ainsi comme révélateur du droit.
II- Le juge administratif révélateur de droit
C’est donc au travers de ces deux arrêts qu’a été consacré l’existence de ces principes que le juge administratif continuera à révéler mêlant des grands principes fondamentaux d’égalité et liberté d’ailleurs aussi affirmés par la Constitution et les textes communautaires) à des principes beaucoup plus spécifiques comme l’anonymat des épreuves écrites d’un examen universitaire, consacré par le CE dans son arrêt Joliet en date du 1er avril 1998.
S’il est impossible d’envisager fournir une liste exhaustive de ces principes, un essai de classification est, lui, concevable.
- Un essai de classification des différents PGD
Les différents PGD peuvent être répartis en 3 groupes principaux. Le premier groupe rassemblerait ainsi ‘’les principes exprimant la tradition politique libérale des droits de l’homme et du citoyen’’. A l’intérieur de ce groupe, on peut ainsi insérer la Liberté (celle « d’aller et de venir » comme celle du commerce et de l’industrie), mais aussi l’Egalité: l’égalité devant l’impôt et les charges publiques (CE Sect. 4 février 1944, Guieysse concernant l’impôt), celle des usagers du service public (depuis l’arrêt du CE du 9 mars 1951 Société des concerts du Conservatoire (GAJA n° XXXXXXXX), ou encore l’égalité d’accès à la fonction publique (CE Ass, 28 mai 1954, Barel) et l’égalité de traitement des fonctionnaires d’un même corps (CE Ass, 30 octobre 2009 Perreux). On pourrait aussi citer l’égalité des usagers du domaine public et celle des citoyens devant la justice.
Ensuite, un deuxième groupe pourrait réunir les ‘’principes essentiels du fonctionnement de la justice et de la protection des administrés’’. Ainsi tout acte est susceptible de faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir depuis l’arrêt du CE Dame Lamotte du 17 février 1950 (Ministre de l’agriculture c/ Dame Lamotte). De la même manière, tout jugement prononcé en dernier ressort est susceptible de faire l’objet d’un recours en cassation. Le principe du caractère obligatoire de la publicité des débats devant le juge judiciaire et du secret du délibéré pour toutes les juridictions ou encore le principe des droits de la défense (premier PGD consacré comme on a vu) ou même le principe d’impartialité tel que consacré dans l’arrêt Didier (CE Ass. 3 décembre 1999), tous ces principes seraient rangés ensemble dans ce second groupe. Y appartiendrait aussi le principe de non-rétroactivité des actes administratifs consacré par le CE le 25 juin 1948 dans son arrêt Société du Journal l’Aurore.
Finalement, un troisième groupe regrouperait les ‘’principes d’équité économique et sociale’’ et inclurait ainsi le principe de l’indemnisation de l’enrichissement sans cause voire les principes tels que consacrés plus récemment de la continuité des services publics (le CE l’érige en PGD en 1980, à la suite du CC qui l’avait érigé en ‘’principe de valeur constitutionnelle’’ dès 1979), ou de l’interdiction faite à tout employeur de licencier une salariée en état de grossesse (CE 1973) ou encore le PDG concernant le séjour de étrangers en France. Ce droit pouvant être résumé comme le « Droit de mener une vie familiale normale accordé aux étrangers résidant régulièrement en France » (manuel de droit administratif Jacqueline Morand-Devillier) correspond à une acception plus large que la notion de « développement » familial déjà consacré par le Préambule de 1946 ou que celle de « regroupement familial » (consacrée par le CE dans son arrêt Gisti du 8 décembre 1978 et retenue dans diverses conventions internationales). Il pose en outre le principe de « rejet des demandes d’extradition présentées par les Etats dont la législation ne respecte pas pleinement les droits fondamentaux de l’homme » (CE, 25 septembre 1984, Galdenao) et celui selon lequel « un réfugié politique, dont la qualité a été reconnue, ne peut, (sauf exceptions prévues pour des motifs de sécurité nationale,) être extradé à la demande des autorités de son pays d’origine » (CE, 1er avril 1988 Beruciartua-Echarri). Il introduit même le concept dictant que l’étranger qui sollicite la reconnaissance de la qualité de réfugié « a le droit de demeurer en France jusqu’à ce qu’il ait été statué sur sa demande » (CE, 13 décembre 1991, Dakoury) ou encore le principe élevé au rang de PFRLR par le CE commandant le refus de l’extradition d’un étranger demandée dans un but politique (Koné, CE 3 juillet 1996) comme on refusera l'extradition demandée par un Etat pratiquant la peine de mort (Fidam, CE 27 février 1987) ou lorsqu’elle est susceptible d’avoir des conséquences d’une gravité exceptionnelle, notamment en raison de l’âge ou de l’état de santé de la personne réclamée (CE, 13 octobre 2000, Kozirev). Appartiennent de même à ce 3ème groupe le principe d’impartialité du juge (arrêt Didier) et celui imposant le reclassement dans un autre emploi par l’employeur du salarié atteint d’inaptitude physique pouvant le licencier seulement en cas lorsque ce reclassement s’avère impossible (CE CCI Meurthe-et-Moselle, 2 octobre 2002). Ainsi il semble évident que les PGD sont de plus en plus spécialisés. Cependant, quelle valeur juridique ont les PDG?
- La valeur juridique des PGD
Bien souvent lorsque le juge administratif pose un principe nouveau, il n’en fait pas application à l’espèce en cause pour renforcer les apparences de neutralité et d’objectivité dont il doit faire preuve dans le cadre de sa mission de garantie des libertés fondamentales. Ainsi, lorsque le CE admet pour la première fois le 19 juin 1978 dans son arrêt Lebon le contrôle de la proportionnalité de la sanction disciplinaire à la gravité de la faute commise par un fonctionnaire, il n’annule pas en l’espèce la sanction justement infligée à Lebon. Il n’appliquera son principe d’annulation que quelques temps plus tard dans son arrêt Vinolay (26 juillet 1978). La question de la valeur juridique est donc réellement primordiale.
Il semble que les PDG aient une valeur supérieur à celle de tous les actes administratifs et s’imposent donc à ceux-ci. On a pu se poser la question de savoir après 1958 si les règlements autonomes de l’article 37 de la Constitution leur étaient soumis, dans la mesure où ils pouvaient paraître plus proches
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