Le recours pour excès de pouvoir, instrument d’un pouvoir excessif du juge administratif ?
Par Junecooper • 16 Décembre 2017 • 2 592 Mots (11 Pages) • 815 Vues
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2- La modulation de l’effet dans le temps de l’annulation contentieuse
À ce pouvoir d’injonction, s’ajoute le pouvoir de modulation du juge de l’excès de pouvoir. Ce dernier va moduler temporellement les effets de l’annulation de l’acte, en lui retirant son caractère rétroactif et/ ou en différant les effets de l’annulation à une date postérieure au jugement. Cette modulation de l’annulation d’un acte commence avec l’arrêt Associations AC du 11 mai 2004 du Conseil d’État mais depuis cette jurisprudence est également appliquée dans d’autres affaires.
3- La suspension des décisions
Le troisième pouvoir qui pourrait éventuellement être énoncé ici c’est le pouvoir de suspension. Il faut le manier avec précaution : Par essence, un recours ne possède pas de caractère suspensif. Toutefois, il parait important d’évoquer les référés prévus par la loi du 30 juin 2000. Un référé par définition est une démarche qui consiste à obtenir des mesures provisoires en attendant un jugement de fond pour ne pas vider de son sens le jugement de fond. Ainsi, le juge de l’excès de pouvoir peut suspendre provisoirement un acte potentiellement illégal.
4 – Les Contrôles de la qualification juridique des faits et de l’erreur jjjjjjjjjjjjjjjjj matérielle sur les faits
Le contrôle de la qualification juridique des faits a été exercé pour la première fois dans l’arrêt Gomel de 1914. La juge va vérifier si l’administration a correctement qualifié les faits au regard de la règle de droit applicable.
Quand au contrôle de l’erreur matérielle sur les faits, il est plus récent car c’est celui qui faisait du juge, un quasi-administrateur. Ce contrôle existe depuis l’arrêt Camino du 14 janvier 1916 dans lequel le Conseil d’État admet qu’un acte administratif ne peut pas être fondé sur un motif matériellement erroné. Il s’agit de savoir si l’administration s’est fondée sur des faits exacts ou si ce sont des faits inventés.
Par ces trois nouveaux pouvoirs et ces deux nouveaux contrôles, le juge administratif donne l’impression de participer de façon marquée aux activités de l’administration. Cette impression est confirmée par le fait que l’annulation ou non de l’acte attaqué n’est plus la seule issue possible lors d’un recours pour excès de pouvoir.
B – Les solutions alternatives à l’annulation de l’acte attaqué
Depuis quelques années, en cas d’erreurs de droit, le juge s’autorise à intervenir sur le raisonnement utilisé par l’administration. Ainsi il va procéder à une action dite de substitution. Ces substitutions sont un moyen d’éviter de nouveaux recours, puisqu’ici, une simple correction rendrait l’acte légal. Pour éviter une perte de temps inutile, le juge substituera la base légale(1) ou les motifs (2), rendant l’acte légal et mettant un terme aux litiges. À noter que pour mettre en place ces mécanismes, le juge administratif pense avant tout au justiciable puisque la substitution n’est possible que si elle ne prive pas le requérant d’une garantie procédurale prévue dans le motif initiale.
1 – La substitution de base légale
La première solution alternative à l’annulation de l’acte attaqué est la substitution de base légale. Elle a vu le jour suite à l’arrêt du Conseil d’état du 3 décembre 2003 El bahi. Cette solution est envisageable dans une situation bien particulière. Cette substitution de base légale peut avoir lieu lorsque l’administration en prenant une décision se fonde sur un texte qui pour une raison ou une autre ne lui permet pas de prendre cette décision. La décision étant bonne mais le texte mauvais, le juge, dans un objectif de gain de temps, va préférer lui substituer la bonne base légale. Le juge n’est toutefois pas tenu de le faire mais s’il le fait, il doit prévenir les parties pour qu’ils fassent part de leurs observations potentielles.
2 – La substitution du ou des motifs
La deuxième alternative à l’annulation de l’acte attaqué est la substitution de motifs. C’est un arrêt de section du 6 février 2004 Hallal qui a rendu possible cette substitution. Elle intervient, quant à elle, à l’initiative de l’administration qui se rend compte finalement qu’il est nécessaire de modifier le raisonnement légal qu’elle a tenu. Elle sait que la décision prise compte tenu de la situation est bonne mais que le ou les motifs sont erronés. L’administration va alors demander au juge de substituer le motif ou les motifs invoqué (s). Ainsi, en substituant un motif illégal par un motif légal, l’acte ne sera plus entaché d’illégalité. Par ailleurs, le juge administratif doit prévenir les administrés ayant attaqué l’acte, de sa décision de substitution des motifs, pour qu’ils puissent présenter des observations s’ils le désirent.
Ces nouveaux pouvoirs attribués au juge administratif, dans le cadre d’un recours pour excès de pouvoir, peuvent, au premier abord, tendre à faire croire que le recours pour excès de pouvoir est devenu un instrument trop puissant entre les mains du juge administratif. En réalité, ces pouvoirs viennent asseoir la volonté du juge administratif d’être au service de la légalité et de l’intérêt général.
II – Le recours pour excès de pouvoir, instrument de la légalité et de l’intérêt général
Malgré ses nouvelles prérogatives, le juge administratif est bien loin de s’immiscer dans l’administration. Ses pouvoirs sont certes plus grands mais ils ne servent qu’à mieux servir l’administré. Ainsi, il sera vu que les pouvoirs du juge administratif restent limités (A) et qu’ils permettent une meilleure efficacité et effectivité du recours pour excès de pouvoir (B).
A – Les pouvoirs restreints du juge administratif
L’augmentation de l’office du juge administratif, même si elle est remarquable, ne donne pas au juge administratif un pouvoir absolu dans le cadre d’un recours pour excès de pouvoir. En effet, le pouvoir du juge administratif reste encore restreint en comparaison à d’autres types de recours (1). Par ailleurs, il ne faut pas oublier que le juge administratif doit respecter des obligations telles que la hiérarchie des normes (2)
1 – Les pouvoirs du juge de l’excès de pouvoir, timides en comparaison
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