Commentaire lettre VXXXI, Les Laisons Dangereuses, Chaderlos de Laclos, 1782
Par Plum05 • 14 Juin 2018 • 1 203 Mots (5 Pages) • 854 Vues
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Cette formation autodidacte est de plus démontrée par des expressions telles que « je me suis travaillée » ou « les règles que je me suis prescrites », dont la construction où le sujet et le complément sont la même personne révèle l’indépendance dont souhaite faire preuve la marquise. On relève également la métaphore « je suis mon ouvrage », par laquelle la marquise met en avant son caractère calculateur et le présente comme un accomplissement dont elle est satisfaite. En outre, par les questions rhétoriques « qu’ai-je de commun avec ces femmes inconsidérées ? » et « quand m’avez-vous vue m’écarter des règles que je me suis prescrites […] ? », la marquise s’adresse au vicomte et le défi de la contredire. Elle affirme ainsi sa supériorité par rapport aux autres femmes, qu’elle méprise ouvertement en les désignant avec le pronom démonstratif « ces ».
Ainsi, par le portrait de cette femme autodidacte et égocentrique Choderlos de Laclos symbolise l’esprit individualiste régnant au siècle des Lumières.
Enfin, l’auteur dresse dans cette lettre le portrait moderne d’une femme ayant le contrôle sur son entourage et sur sa vie.
La marquise de Merteuil donne effectivement une grande importance à l’image qu’elle renvoie et qu’elle souhaite être celle d’une femme forte. Elle utilise pour cela son apparence extérieure dont elle tente de maitriser le moindre aspect. On constate cette obsession pour le contrôle de ses attitudes à travers la phrase « je tâchais de régler de même les différents mouvements de ma figure ». La phrase « je m’amusais à me montrer sous différentes formes » et l’expression « suivant mes fantaisies » dévoilent le plaisir que cette manière de manipuler son entourage lui procure.
La description du contrôle qu’elle a sur son image démontre en particulier une volonté de prouver au vicomte de Valmont l’emprise qu’elle est capable d’avoir sur la gente masculine, et surtout sur le vicomte lui-même. En effet, dans les passages « j’obtins dès lors de prendre à volonté ce regard distrait que vous avez loué si souvent » et « j’ai su prendre sur ma physionomie cette puissance dont je vous ai vu quelquefois si étonné », la marquise rappelle au vicomte, son ancien amant, que lui aussi a succombé à ses charmes créés de toutes parts et le classe ainsi dans la même catégorie que ses autres conquêtes. L’utilisation du mot « puissance » renforce l’image de femme dominante qu’elle se donne.
Le portrait dressé de cette femme maitrisant les hommes brise les clichés acquis lors de la période classique, où les héroïnes étaient des archétypes de la féminité, fragile et dépendant des hommes. Cette rupture avec le mouvement classique est à nouveau révélatrice des innovations du XVIIIe siècle et de la volonté des Lumières de briser les idées de la période royaliste.
Ainsi, le personnage de la marquise de Merteuil est caractéristique des innovations de son siècle car elle est non seulement un symbole de l’individualisme et de la liberté prônés par les philosophes des Lumières, mais possède également l’esprit scientifique et raisonnable qui étaient, selon eux, indispensable à l’évolution de la société. Ce texte est donc témoin de la rupture entre le mouvement classique et le mouvement des Lumières, dont faisait partie l’auteur Choderlos de Laclos.
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