La lettre persane Montesquieu, commentaire de texte
Par Andrea • 11 Décembre 2017 • 1 793 Mots (8 Pages) • 817 Vues
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b) L'intensité dramatique :
De nombreux procédés viennent la soutenir. Ainsi on relève l'emploi de nombreux intensifs, tant, si, associé à des adjectifs (si curieux et si rare 15) ou la répétition du terme toutes (toutes les boutiques, toutes les cheminées 12) faisant du personnage un héros omniprésent. Cette intensité tient en outre aux procédés d'exagération comme l'hyperbole (comme si j'avais été envoyé du ciel 2, un néant affreux 23) ou l'énumération de la ligne 3 (vieillards, hommes, femmes, enfants) et l'effet de démultiplication opéré par les expressions mille couleurs 6 et cent lorgnettes 7. Tous ces procédés soulignent l'importance de l'événement vécu.
c) La théâtralisation :
En effet le narrateur se met en scène mais met, par la même occasion, les Parisiens en scène. La lettre renvoie à tous les éléments caractéristiques du théâtre. Pour ce qui est du décor, il est planté dès les premières lignes, Paris 1, les Tuileries 4, et ces éléments de décor sont mis en valeur par des notations telles que un arc-en-ciel nuancé de mille couleurs 6, conférant un caractère très visuel au récit. Les costumes sont aussi mentionnés, ceux des Parisiennes on l'a vu et surtout celui de Rica, le fameux habit persan 18, qu'il abandonnera pour mener à bien son expérience. Les discours rapportés au style direct ne sont pas sans évoquer les dialogues théâtraux. Quant à l'action, elle est elle-même organisée autour d'une intrigue très simple : le Persan, curieux de constater l'intérêt qu'il suscite dans la capitale, change d'habit pour tester l'authenticité de cet intérêt. Il y a donc « péripétie » lorsque son statut change radicalement : j'entrai tout à coup dans un néant affreux 23.
- L'exercice de la satire:
Le renversement est l'un des procédés usuels de la satire. La lettre ou relation de voyage permet de transmettre sa vision du monde mais ici, l'étranger c'est celui qu'on a l'habitude de rencontrer, voire soi-même, puisque les lecteurs de Montesquieu sont des Parisiens.
a) Le jeu du miroir : la caricature des Parisiens
La réciprocité des regards introduit un jeu de miroirs : l'auteur tend à ses lecteurs, à travers le regard de Rica, un miroir dans lequel ils peuvent se voir agir. Or, cette image n'est guère à leur avantage : tous les procédés sont ici réunis pour dessiner une véritable caricature des Parisiens. Tout d'abord, on insiste sur leur comportement presque déplacé avec les imparfaits de répétititon qui donnent un aspect mécanique à ce comportement et semblent les désigner comme des gens fonctionnant de manière grégaire. Ensuite les figures d'exagération comme les hyperboles et tous les intensifs déjà repérés permettent de forcer le trait. Enfin les Parisiens sont caractérisés comme des gens qui n'étaient presque jamais sortis de leur chambre 9-10. Ajoutons à cela l'ironie du narrateur, évidente dans la construction du récit en deux mouvements et dans sa chute comment peut-on être Persan ? 28 : la question alors posée par les Parisiens a un double sens, elle manque de logique, mais représente avant tout une interrogation de Montesquieu sur l'identité culturelle.
b) La mise en scène de la superficialité :
Le comportement des Parisiens est marqué par l'incohérence : l'extravagance 1 mentionnée au début est explicitée par les descriptions qui suivent dans la lettre de Rica. La soudaineté avec laquelle l'attitude des Parisiens change, comme en témoignent les expressions en un instant 22, tout à coup 23, trahit leur incohérence. Or, c'est le changement de costume qui justifie cette modification de leur comportement (habit 18, ornements étrangers 20-21, tailleur 22), on comprend donc leur attachement aux apparences plus qu'à la vérité. Ils « collent » aux stéréotypes, il faut avouer qu'il a l'air bien persan 10-11. La théâtralité évoquée plus haut prend ainsi tout son sens : Paris est un théâtre, où la société se donne en spectacle, et où le regard de l'Autre est conditionné par son apparence, son costume. La question finale (Comment peut-on être Persan? 28) manifeste l'étroitesse d'esprit qui découle de pareille superficialité.
c) Le regard sur l'Autre :
Cette superficialité constitue la caractéristique majeure d'une société que l'auteur évoque avec ironie. La fantaisie du passage masque donc une critique sévère, mais aussi une réflexion plus profonde sur le statut même de l'Autre. La question est envisagée sous un double aspect. Pour les Parisiens, Rica est l' « étranger », or cette étrangeté enferme le Persan qui, en quittant son costume traditionnel devient libre 20. La relation des Parisiens à l'étranger relève donc de l'ethnocentrisme, ils ne peuvent comprendre qu'on ne soit pas parisien. Pour Rica, les Parisiens sont des étrangers essentiellement étranges, au comportement marqué par l'extravagance 1, comportement qu'il observe de façon très précise et quasiment « scientifique », sans jugement appuyé.
Au-delà de ce rapport de l'Autre à son Autre, ce que Montesquieu souligne c'est que l'étrangeté n'est, en somme, qu'une affaire d' « habit », d'apparence : en quittant le sien, Rica redevient un homme apprécié au plus juste 21, comme il le dit avec beaucoup d'ironie. Les Parisiens manifestent donc une indifférence à l'égard d'autrui, et l'auteur, philosophe des Lumières, en profite pour déclarer l'homme « homme » avant que d'être « étranger ».
Conclusion à construire.
Bien penser à reprendre la question posée et à résumer le plan adopté pour y répondre.
Élargir le propos aux autres
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