Montaigne "les cannibales"
Par Ninoka • 1 Novembre 2018 • 1 497 Mots (6 Pages) • 804 Vues
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A la ligne 2, les mots « barbares » et « sauvages » sont utilisés dans le sens de la thèse des adversaires avec une connotation péjorative, les Amérindiens sont cruels sauvages voir inhumain : « il n'y a rien de barbares et de sauvages en cette nation ». Puis à la ligne 8, sauvage à une connotation neutre : « nous nous appelons sauvages les fruits que nature (…) a produit ». Enfin, de la ligne 10 à 11, on retrouve le premier sens de barbare, mais non pas appliqué aux Amérindiens, mais aux fruits cultivés c'est-à-dire aux Européens : « détournés de l'ordre commun, que nous devrions appeler plutôt sauvage ».
Montaigne cherche à montrer que les mots, sauvage et barbare, ne sont pas adéquats à la situation mais aussi que si barbare il y a, ce sont les Européens. Il retourne donc la thèse ethnocentrique contre les Européens.
Transition : Ce retournement s’inscrit néanmoins dans un discours humaniste
II. la portée humaniste du texte
Le texte est centré sur l’Homme : il juge l’homme en se débarrassant de ses préjugés et en faisant preuve d’objectivité, de décernement, d’ouverture d’esprit, de bon sens.
1. Un appelle à l’ouverture d’esprit et au rejet de l’étroitesse des préjugées
De la ligne 1 à 6, Montaigne met en évidence son rejet d’esprit, c’est-à-dire qu’il refuse l’ethnocentrisme : « l’exemple et l’idée des opinions et usances du pays où nous sommes », ligne 5 à 6, « il semble que nous n’avons autre mire de la vérité et de la raison », ligne 4. La tournure restrictive, limitative « autre mire que » met en évidence le rétrécissement du regard.
L’auteur dénonce de la ligne 6 à 7 l’ethnocentrisme avec des antiphrases où il reproduit les phrases de l’adversaire : « Là est toujours la parfaite religion, la parfaite police, parfait et accompli d’usage de toute chose » dans lesquelles il utilise l’ironie et la répétition pour montrer l’étroitesse de l’esprit orgueilleux des Européens qui n’ont aucune raison de l’être.
2. Le rôle de la nature
Le mouvement Humaniste est caractérisé par une ouverture d’esprit : faire de la nature, le point de mire de l’humanité et faire tout le parallèle avec le fruit naturel et le fruit cultivé symbolisant la civilisation.
De plus, la nature est personnifiée, ligne 18, « mère Nature », elle apparaît comme une divinité protectrice de l’Univers tout entier : « grande », « puissante », « beauté », « richesse », « pureté », « merveilleuse », cette idéalisation de la nature apporte une source de bien.
Cet éloge de la Nature révèle aussi l’influence de Montaigne des courants philosophiques de l’Antiquité et plus particulièrement, l’épicurisme et le stoïcisme, deux courants qui, malgré des points d’opposition, cherchent à trouver comment l’homme peut être heureux, en partageant la même condition du bonheur et en suivant les lois de la Nature qui font d’elle, la divinité par excellence que tout Homme doit respecter. La lecture de textes antiques est également un trait des Humanistes.
Et d’un autre côté, il y a un blâme, Montaigne qualifie les technologies humaines d’absurde, d’inutile et les entreprises qui sont en opposition à la nature : « vaines et frivoles » ligne 21 à 22.
Pour autant, il ne faut pas en déduire qu’il est hostile à la culture en général, simplement il accentue le blâme pour mettre en garde de ces dérives possibles et pour rappeler à ses lecteurs qu’ils sont, avant tout, dépendant de la Nature.
Il faut rappeler que Montaigne n’est pas un obscurantisme !
C’est aussi un texte humaniste car l’auteur cherche, comme tout humaniste, à partager sa vision du monde, son savoir et sa connaissance : le texte fait preuve d’un souci pédagogique car il est à la fois convaincant avec un raisonnement par analogie et persuasif avec l’utilisation de procédé d’écriture comme l’ironie et l’antithèse.
Conclusion
Grâce à une argumentation par analogie, habilement mené, Montaigne retourne la thèse ethnocentrique et va même à affirmer la supériorité du Sauvage sur l’Homme civilisé. Son argumentation marquante va constituer ce qui va se développer au topo suivant, dans le texte de Diderot, Supplément au Voyage de Bougainville à savoir le Mythe du Bon Sauvage, un mouvement nouveau qui apparaît un peu au XVI mais surtout au XVIII, qui montre les méfaits de la civilisation.
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