Montaigne, Essais, Des cannibales
Par Ramy • 22 Juin 2018 • 1 243 Mots (5 Pages) • 1 160 Vues
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fait l’éloge du relativisme et considère que toutes les cultures se valent. L’hyperbole « tous nos efforts ne peuvent seulement arriver à représenter le nid du moindre oiselet » montre que l’homme a perdu sa place centrale dans l’univers. Le mot Barbare n’est pas définissable en soi et n’a de sens que par rapport à celui qui le prononce. Ce mot est à la base de la critique de l’ethnocentrisme faite par Montaigne, c’est sa thèse principale : "sinon que chacun appelle barbarie ce qui n’est pas de son usage".
Afin d’inciter le lecteur à la réflexion, Montaigne utilise une réthorique particulière qui est à la fois originale et efficace.
L’auteur défend la cause des sauvages, il est donc pleinement engagé dans son texte. L’utilisation de la première personne : "je"; "nous"; "notre"; "nos", marque l’engagement de l’auteur dans son discours. Par exemple, le pronom « je »; « je trouve » traduit la présence de la subjectivité. Le discours de l’auteur est direct, il ne passe pas par le dialogue ni par le conte philosophique pour partager son point de vue. Il critique donc directement la société. Lorsqu’il utilise le pronom « nous » : « nous appelons sauvages » , il se place au même niveau que le lecteur, et s’accuse lui même d’ethnocentrisme.
Ce texte vise à la fois à convaincre et à persuader. Montaigne fait appel à une démarche argumentative qui lui est propre.
Tout d’abord, il prend soin de bien cadrer son raisonnement, et se prémunit contre les objections : « à ce qu’on m’en a rapporté ». Il montre ainsi son honnêteté intellectuelle. Nous remarquons aussi la récurrence de liens logiques comme « or », « sinon », « de même que », « et » : le texte vise à convaincre, c’est un texte structuré qui veut pousser le lecteur à réfléchir. Montaigne est un humaniste, c’est d’ailleurs l’éducation qu’il a reçu. Il refuse de reconnaître le progrès humain : tout ce que nous prenons pour un progrès nous éloigne des origines et de l’authenticité primitive, et donc nous affaiblit, nous abatardit. Pour lui, la nature est bonne tant qu’elle reste naturelle.
Pour toucher l’esprit du lecteur, Monataigne magnifie la nature. Il utilise l’hyperbole « grande et puissante mère nature » qui témoigne de l’envolée lyrique et du registre poétique. Nous relevons le champ lexicale de la nature : “sauvages”, “naturelles”, “fruits”, “araignée”, “oiselet” qui expose le mode de vie des sauvages. Ils vivent en harmonie au sein de la nature, c’est le mythe du bon sauvage.
Les « fruits » symbolisent la nature, la pureté, le carpe diem. Ils sont en réalités une métaphore du "sauvage" et permettent montrer que les sauvages sont des êtres purs et originels, qui n’ont pas été corrompus. La preuve en est que "nous" trouvons délicieux les fruits "sauvages" de ces nouveaux pays: ils n’ont pas eu besoin de modifications artificielles. La métaphore « sa pureté relui » illustre un discours également persuasif, avec la récurrence d’images. La puissance évocatrice de ces images ont pour but de susciter les sentiments du poète.
En tant qu’humaniste reconnu, Montaigne critique l’idée que ces “sauvages” ne détiennent pas la vérité. Il réfute cette argumentation ethnocentrique car, pense-t-il, nul ne peut se prévaloir de détenir la vérité absolue, celle-ci étant relative. Chacun dispose d’une vérité qui n’est que la sienne. Pirandello affirme ces propos avec son oeuvre “A chacun sa vérité”. Mais cet essai est aussi un texte argumentatif, il met en place l’argument polémique du « bon sauvage », qui servira au XVIIIe siècle à attaquer la colonisation et l’esclavage. Enfin, c’est un grand texte humaniste qui fait confiance à l’homme tout en refusant l’idée de progrès.
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