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Le cri de la mouette - Emmanuelle LABORIT en collaboration avec Marie-Thérèse CUNY

Par   •  3 Mai 2018  •  2 282 Mots (10 Pages)  •  1 039 Vues

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C’est le temps de la colère contre les implants cochléaires. Les implants sont de mini-ordinateurs que l’on place dans le cerveau du sourd pour suppléer au nerf déficient.

Pour Emmanuelle c’est une tentative de purification ethnique, c’est un viol ! Et de répéter sur tous les tons que la surdité n’est pas un handicap mais une différence et que refuser la différence c’est du racisme. De plus, aucun chirurgien ne peut garantir les effets désirés. Un traitement lourd, non naturel qui obligerait à un long travail d’orthophonie pour identifier le son perçu. « Obligerait » car si le succès est possible (25% des cas selon Emmanuelle), l’échec doit être sérieusement envisagé.

C’est aussi le temps de rager contre le manque d’information sur le sida dont sont victimes les sourds. En effet, beaucoup de sourds sont morts ou sont séropositifs car ils ne connaissaient pas les modes de transmission et comment se protéger. Emmanuelle reconnait avoir eu beaucoup de chance de ne pas être contaminée. Elle fera de la lutte contre le sida un de ses combats avec la défense de la langue des signes.

C’est le temps de se tourner vers l’avenir, elle reprend sérieusement le théâtre et joue dans un film mais elle veut arrêter ses études. Elle aime le théâtre et la langue des signes est théâtrale car il faut appréhender l’espace comme sur les planches. Elle rencontre Mark Medoff, le metteur en scène des « enfants du silence», qui veut lui donner un rôle dans sa pièce mais il veut, comme la mère d’Emmanuelle, qu’elle passe son bac. Elle étudie beaucoup et finit par l’obtenir à la deuxième tentative. Elle joue alors dans la pièce de théâtre qui est un grand succès et remporte le Molière de la révélation théâtrale de l’année pour son interprétation du rôle de Sarah.

« La mouette est devenue grande et vole de ses propres ailes » maintenant.

Mon ressenti :

Cela fait plus de 20 ans qu'Emmanuelle Laborit a reçu le Molière de la révélation théâtrale, je m'en souviens encore, tant elle était émouvante et je n’ai pas résisté à la tentation de revoir ces images sur internet. Son livre est lui aussi très touchant, poignant, même. Il nous fait comprendre le poids de ce handicap : pour la personne sourde, mais aussi pour sa famille.

On s'attache dès les premières lignes à Emmanuelle. Mais parmi les autres personnages, seuls ceux avec lesquels elle s'entend sont proches du lecteur. Les autres sont au contraire plus distants, ce qui m’a fait ressentir la solitude dans laquelle elle se trouve lorsqu'elle ne peut pas communiquer.

L'histoire est celle de sa vie, de son itinéraire et de ses combats pour s'intégrer parmi des personnes qui n'acceptent pas toujours son handicap et qui ne cherche pas de véritable solution. Emmanuelle nous parle, par exemple, de certains de ses professeurs qui interdisaient de parler la langue des signes, comme si on interdisait à un étranger de ne plus parler sa langue maternelle, mais uniquement une autre langue qu’il ne comprend pas. J’imagine ma détresse si j’étais dans ce cas et que je ne puisse me faire comprendre quand je demande mon chemin, quand je veux engager une simple conversation, quand je veux passer un appel téléphonique. J’aurai l’impression de me trouver dans une bulle transparente, voyant le monde et toutes les personnes mais ne pouvant pas les atteindre, seule en plein désarroi, voire en panique.

Ce livre nous fait passer un message très beau et très important : celui d'accepter les différences de chacun et de ne pas chercher à les effacer. Est-ce que ce ne sont pas les différences qui enrichissent le genre humain ?

Cette œuvre est un roman autobiographique, ce qui est pertinent par rapport à l'histoire. En effet, l'auteur cherche à partager son évolution dans un monde qui la juge et qui ne l'aide pas toujours à progresser.

J'ai particulièrement aimé le passage où elle découvre le minitel, le moyen qu'elle a enfin pour communiquer avec ses amis à distance. Des choses du quotidien qui nous paraissent anodines mais qui leurs sont impossible seuls, comme passer un coup de fil, où ils ont toujours besoin d’un entendant. Une vie de dépendance qui me pèserait sans aucun doute.

Lorsque j'étais plus jeune, j'avais vu Emmanuelle Laborit à la télévision sans me rendre compte des difficultés qu’elle avait pu rencontrer pour arriver là où elle en était. J’ai toujours aimé la voir s’exprimer, sur les plateaux de télévision, avec ses mains, son visage, avec son corps tout entier même, tellement bavarde et expressive sans la parole. Elle donne l’impression de danser. La discipline de la danse est aussi appelée « expression corporelle » et la langue des signes est une expression corporelle.

Ce récit m'a permis d'essayer de me mettre de l'autre côté du miroir; tenter de comprendre les sentiments qui peuvent surgir quand on se voit différent. Bien entendu, chacun le vit d'une façon qui lui est propre, mais cela nous donne des clefs et nous fait prendre conscience que nous devons, nous entendants, ouvrir notre communication, adapter notre façon d'être aussi, des petits gestes, petits riens qui font toute la différence.

Emmanuelle Laborit est une grande et belle personne car il fallait une force de caractère incroyable pour pouvoir assumer ses convictions de la sorte dans une société où le sourd ne devait qu'oraliser pour pouvoir y être intégré. Une force qui, malgré les sentiments qu’elle a pu ressentir comme du dégoût, de la révolte, de l'injustice, du désespoir, de l'humiliation, de l'amour, face aux diverses situations qu’elle a pu rencontrer, lui a permis de garder détermination, courage et soif de vivre, soif de communiquer ! Emmanuelle me fait penser à une de mes collègues, aide-soignante, que j’appellerai Lara, et qui malgré cette problématique, a réussi à s’intégrer tant au niveau professionnel que personnel. Elle oralise, lis sur les lèvres, signe, a étudié, travaille avec des entendants, fait partie d’un groupe de danseurs et a, depuis peu, agrandi sa famille avec l’arrivée de son premier enfant. Dans ce cas, également, j’ai pu constater, chez Lara, une force, une personnalité qui a pu l’emmener jusque-là où elle voulait être.

Le cri de la mouette est un cri du cœur, un ouvrage vraiment facile et agréable à lire car il est à la fois simple et passionnant. Son écriture est très fluide comme si l’auteur signait car la LSF utilise

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