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DROIT: ADMIN

Par   •  29 Mars 2018  •  1 995 Mots (8 Pages)  •  521 Vues

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L’arrêt du Conseil d’Etat « Commune de Chirongui » de 2013, a permis au juge référé-liberté de ne plus avoir à distinguer la voie de fait des autre atteintes graves et illégales. Dans l’arrêt étudié, le critère de la voie de fait est maintenu : la gravité de l’atteinte n’est pas telle que l’administration a agi hors de l’exercice de ses pouvoirs. Il semble même exister une présomption de voie de fait en cas d’extinction du droit de propriété.

Autrement dit, la voie de fait résulte désormais soit d’une atteinte grave à la liberté individuelle, soit d’une atteinte aboutissant à l’extinction du droit de propriété.

B. Un nouveau champ d’application de la voie de fait : la liberté individuelle et l’extinction du droit de propriété

Dans un arrêt « Action Française » en date du 8 avril 1935, le Tribunal des conflits avait établi comme deuxième condition cumulative nécessaire à la voie de fait l’atteinte de l’administration à un droit de propriété , par exemple la saisie ou la destruction de biens immobiliers, ou une atteinte à une liberté fondamentale (ici toutes les libertés sont protégées comme la liberté de la presse, ou d’aller et venir…). C’est en ce sens que la décision Bergoend c/ ERDF opère un revirement jurisprudentiel : le tribunal des conflits réduit considérablement la portée pratique de la théorie en restreignant son champ d’application à « la liberté individuelle et à l’extinction du droit de propriété ».

En vertu de l’article 66 de la Constitution, c’est bien le juge judiciaire qui est le gardien de la liberté individuelle, et donc cela est logique du point de vue du bloc de compétence du juge administratif.

Cependant, en pratique, réduire la voie de fait à l’atteinte causée à la liberté individuelle revient en outre à exclure les libertés collectives (par exemple les droits principaux de l’individu dans lesquels la voie de fait s’est longtemps développée antérieurement, comme la liberté de la presse) pour la cantonner à la liberté civile. La protection des libertés fondamentales ayant pris le pas sur une conception plus individualiste des libertés, il n’est pas vraiment justifié de la part des juges de bénéficier d’un régime juridique restreint. Le démembrement du droit de propriété en l’espèce, semble relever d’un caractère plus « public » qu’individuel.

La théorie de l’emprise irrégulière existe également dans le cadre d’une prise de possession temporaire d’un immeuble par l’administration, c’est une véritable dépossession d’un droit réel immobilier contrairement à la voie de fait. L’extinction du droit de possession pourrait être qualifiée comme plus grave, mais le propriétaire est bien privé de la jouissance de son bien dans les deux cas, et cela est une atteinte sévère au droit de propriété, qui ne justifie pas une différence de régimes juridiques telle. En l’espèce, outre le fait que l’implantation de l’ouvrage public ne procède pas d’un acte manifestement insusceptible de rattacher à un pouvoir de l’administration, le Tribunal des Conflits précise qu’elle « n’aboutit pas à l’extinction d’un droit de propriété. » L’implantation de « l’ouvrage public » constitue donc une simple emprise irrégulière (l’administration n’opère pas dans le cadre de ses pouvoirs légaux, lorsqu’elle n’a pas de titre ou qu’elle agit en dehors d’habilitation textuelle), qui n’engage la compétence du juge judiciaire qu’en matière de réparation des préjudices.

- Une nouvelle répartition des compétences au bénéfice du juge administratif

A. Vers une disparition de la voie de fait

Le problème majeur de cet arrêt, qui requalifie la voie de fait demeure en suspens : la difficulté de s’assurer de l’admission ou du rejet de la qualification de « voie de fait » par le juge. Il faut distinguer une action hors des pouvoirs de l’administration, d’une action manifestement illégale. Le critère déterminant la gravité de l’atteinte justifiant la qualification de voie de fait reste celui de l’impossibilité d’y rattacher un pouvoir à l’administration. Le Tribunal des Conflits en jugeant que l’implantation illégale de l’ouvrage public sur une propriété privée « ne procède pas d’un acte manifestement insusceptible de se rattacher à un pouvoir dont dispose l’administration », inscrit la décision dans la lignée de la jurisprudence antérieure : l’illégalité ne suffit pas à constituer une voie de fait. Il est en effet difficile de distinguer clairement la voie de fait d’une atteinte manifestement illégale, puisque c’est pratiquement la même chose. Ainsi, entre une atteinte manifestement illégale sanctionnée par le juge administratif et une voie de fait entrainant une compétence exclusive du juge judiciaire.

Le Tribunal des Conflits, protecteur du domaine de compétence du juge administratif a généralement cherché à limiter l’intervention judiciaire.

B. Une compétence exclusive du juge administratif en matière d’emprise irrégulière

Le juge administratif dispose désormais d’une compétence pleine et entière pour connaître des contentieux relatifs à des comportements de l’administration qui sortent désormais de l’orbite de la voie de fait pour devenir dans bien des cas des situations d’emprise irrégulière.

Il apparaît plus précisément que puisque le juge judiciaire est compétent, “par exception au principe de la séparation des autorités administratives et judiciaires”, pour “ordonner la cessation ou la réparation” d’une situation de voie de fait, celle-ci comprise comme étant très exceptionnelle lorsqu’elle porte atteinte au droit de propriété immobilière, alors il ne l’est ni pour ordonner la cessation ni pour assurer la réparation des atteintes portées à ce droit dans les autres situations, notamment celles résultant des anciennes voies de fait, “déclassées” en emprises irrégulières. Tout autre raisonnement reviendrait à restituer au juge judiciaire une parcelle de compétence (celle de la réparation dans l’ancien champ de la voie de fait) qui lui est précisément retirée par l’arrêt Bergoend et irait à l’encontre de la volonté progressivement affiché e par la jurisprudence de replacer l’administration face à son juge naturel.

Le Tribunal des Conflits s’attache donc à une conception traditionnelle de la répartition des compétences qui voudrait faire du juge

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