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L’ordre public et la police administrative générale

Par   •  10 Juin 2018  •  2 818 Mots (12 Pages)  •  707 Vues

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- L’extension de la notion d’ordre public à une dimension psychologique : une prise en compte des besoins des administrés

Les objectifs de la police administrative ont pu être étendu par la jurisprudence dès la fin des années 1950 ayant intégré notamment, au fil du temps et de l’évolution des mœurs, les notions de moralité publique et de dignité de la personne humaine. En ce sens, la police administrative générale peut agir sans se référer à une composante légale de l’ordre public.

Dans un premier temps, la jurisprudence va progressivement évoluer jusqu’à intégrer la protection de la moralité publique, parmi les composantes de l’ordre public. Ledit arrêt Club sportif Chalonnais du Conseil d’Etat en date du 7 novembre 1924 est « un arrêt précurseur » qui ne consacre pas encore explicitement l’idée de moralité publique comme composante de l’ordre public. Dans cet arrêt, le Conseil d’Etat rejette le recours dirigé contre l’arrêté d’un maire qui avait interdit une réunion de boxe pour des raisons « d’hygiène morale ». Cet arrêt est demeuré isolé jusqu’à la fin des années 1950 et ce n’est que par un arrêt Société les films Lutetia rendu par le Conseil d’Etat, le 18 décembre 1959 que la notion de moralité publique comme composante de l’ordre public va être consacrée. En l’espèce, le maire de Nice avait pris un arrêté interdisant la projection dans sa commune du film Le feu dans la peau. Cet arrêté était fondé sur la préservation de la moralité publique. Pour le Conseil d’Etat, un maire responsable du maintien de l’ordre dans sa commune peut interdire sur le territoire de celle-ci, la représentation d’un film auquel le visa ministériel d’exploitation a été accordé mais dont la projection est susceptible d’entrainer des troubles sérieux ou d’être à raison du caractère immoral du film et de circonstances locales, préjudiciable à l’ordre public.

Par la suite, les juges auront tendance à considérer presque systématiquement que la condition de l’existence de circonstances locales particulières n’est pas remplie. En outre, il est rare aujourd’hui que le juge administratif soit saisi d’arrêtés municipaux interdisant la projection d’œuvre cinématographique. En revanche, il est beaucoup plus fréquent aujourd’hui que soit contesté les arrêtés du ministre de la culture accordant des visas d’exploitation au film assorti le cas échéant, d’interdiction d’âge. Ce mouvement a été déclenché par l’arrêt de Section du Conseil d’Etat du 30 juin 2000 dit Association promouvoir qui annule le visa d’exploitation assorti d’une interdiction aux moins de 16 ans accordé au film Baise-moi.

En outre, le Conseil d’Etat va encore consacrer une autre composante de l’ordre public qui est celle de la dignité de la personne humaine dans un arrêt du 27 octobre 1995 dit Commune de Morsang-sur-Orge. Dans cet arrêt, les juges relèvent que « le fait d’utiliser un projectile sur une personne affectée d’un handicap physique est présentée comme telle et porte atteinte à la dignité de la personne humaine ».

Aujourd’hui encore, la notion de dignité humaine fait l’objet d’une jurisprudence abondante. Récemment, elle a posé la question de savoir si un maire était en droit ou non de s’abstenir puis de refuser d’utiliser ses pouvoirs de police d’administration générale. Dans ledit arrêt Société Grasse Boulange du Conseil d’Etat, la boulangerie SARL Grasse Boulange exposait au public des pâtisseries fabriquées et commercialisées sous le nom de « dieu » et « déesse » faisant référence à l’iconographie colonialiste. Le juge des référés du tribunal administratif de Nice avait été saisi d’une demande, présentée par le Conseil représentatif des associations noires, sur le fondement de l’article L. 521-2 du Code de justice administrative, tendant à ce qu’il soit enjoint au maire de la commune de Grasse d’interdire l’exposition au public, dans la vitrine de la boulangerie de la société Grasse Boulange, ces pâtisseries en chocolat noir. Le tribunal administratif avait donné droit à la société mais le Conseil d’Etat a annulé l’ordonnance considérant ainsi que « l’abstention puis le refus du maire de Grasse de faire usage de ses pouvoirs de police (…) ne constituent pas (…) une illégalité manifeste portant atteinte à une liberté fondamentale qu’il appartiendrait au juge administratif des référés de faire cesser ».

Aujourd’hui, la protection des citoyens ne cesse d’être renforcée par la multiplication des composantes de l’ordre public qui visent à accroitre le rôle de la police administrative générale (A). Pour satisfaire cette mission différents acteurs exercent ce rôle de protection de l’ordre public. Ils ne doivent pas porter atteinte aux droits et libertés fondamentaux des citoyens sous peine de sanction du juge qui se veut arbitre des mesures prises (B).

- L’exercice d’un contrôle du juge administratif sur les mesures préventives prises par les acteurs de la police administrative générale participant au maintien de l’ordre public

Pour pouvoir mener à bien une mission de préservation de l’ordre public, les acteurs recouvrant la police administrative générale sont nombreux (A). Les mesures préventives prises par ces derniers font l’objet d’un contrôle étendu de la part du juge administratif qui se veut arbitre et protecteur des libertés fondamentales des citoyens (B).

- Une multiplicité d’acteurs constitutifs de la police administrative générale : une finalité tendant à la préservation de l’ordre public par la mise en place de mesures préventives

La police administrative générale vise à faire respecter l’ordre public et pour ce faire, les acteurs investis de ce pouvoir de police administrative générale sont divers. Au niveau local, le maire et le préfet sont compétents tandis qu’au niveau national et ce, depuis un arrêt dit Labonne du 8 août 1919, le Premier Ministre exerce cette fonction. En effet, le Conseil d’Etat a admis que les pouvoirs de police générale confiés au maire et au préfet pouvaient être transposés sur le plan national à l’autorité chargée de déterminer, celles des mesures de polices, qui doivent en tout état de cause être appliquées sur l’ensemble du territoire.

Pour savoir quand la police administrative générale n’est pas compétente, trois règles s’appliquent. D’une part, si une mission est attribuée à une autorité différente de celle qui est territorialement compétente pour protéger l’ordre public, la police spéciale

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