ETAT D'URGENCE et POLICE ADMINISTRATIVE
Par Orhan • 26 Septembre 2018 • 5 642 Mots (23 Pages) • 652 Vues
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jours, c’est une loi qui vient habiliter les autorités civiles à conserver les pouvoirs étendus que le décret leur a conféré. Couvre-feu, remise des armes, contrôle de la presse : la « palette » d’action de la police administrative n’est jamais si grande qu’en cas d’état d’urgence.
La France connait actuellement la sixième application de l’état d’urgence. Trois durant la Guerre d’Algérie, de la Toussaint sanglante de 1954 au Putsch des Généraux de 1961. Il est déclaré en Nouvelle-Calédonie en 1986, à ce jour unique utilisation du régime dans les territoires d’Outre- Mer (devenu collectivité). Enfin, en 2005, Jacques Chirac décréta l’état d’urgence à la suite des émeutes en banlieues, et cela pour une durée de 2 mois. L’état d’urgence est de nouveau au centre de l’actualité à la suite des attentats de Paris du 13 novembre 2015. Déclaré le soir même, il est prorogé le 20 novembre pour 3 mois par une loi. Le 26 février, il est à nouveau reconduit pour 3 mois par une écrasante majorité de parlementaires.
L’heure semble être à la constitutionnalisation de l’état d’urgence. Il est vrai que cela pourrait permettre, entre autres, d’éviter un nouveau transfert des compétences étendues de la police à l’armée, comme cela a souvent été le cas durant la guerre d’Algérie.
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Le 24 novembre, la France a informé le Conseil de l’Europe qu’elle allait « déroger » à la CEDH en vertu de son article 15. Plus précisément, les autorités ont fait état d’« un certain nombre de mesures prises dans le cadre de l’état d’urgence instauré à la suite des attentats terroristes de grande ampleur perpétrés à Paris qui sont susceptibles de nécessiter une dérogation à certains droits garantis par la Convention européenne des droits de l’homme ». Cette révélation, que l’on peut à la fois analyser comme une volonté profonde d’endiguer le terrorisme ou comme un aveu de faiblesse de la part du gouvernement, nous montre à nouveau les tensions récurrentes entre police administrative, état d’urgence et libertés fondamentales. Sous couvert d’une protection de l’ordre public, les autorités sont amenées à considérablement restreindre les droits les plus fondamentaux des citoyens français. Il y’a là toute l’ambiguïté de l’ordre public, qui vise à protéger les libertés, et au nom duquel on restreint largement ces dernières. Face aux polémiques soutenues, il semble légitime de se demander l’état d’urgence n’engendre pas une extension inconsidérée des pouvoirs de police administrative.
Pour répondre à cela, notre argumentaire sera constitué en deux axes. Il s’agira dans un premier temps d’étudier la nécessaire protection de l’ordre public, en cas de menace grave, par un renforcement des pouvoirs de police (I). Puis, dans un second temps, il conviendra d’analyser la nécessaire conciliation entre restriction et protection des libertés fondamentales (II).
I. La protection de l’ordre public par le renforcement des pouvoirs de police
dans le cadre de l’état d’urgence
A. Des prérogatives de police administrative accrues
L’état d’urgence est une mesure exceptionnelle qui permet de renforcer les mesures de police administrative. C’est un régime intermédiaire entre l’état de siège qui implique les forces armées et la situation normale. D’ailleurs l’état d’urgence et l’état de siège ne peuvent pas être appliqués simultanément sur un même territoire.
Son régime juridique est organisé par la loi du 3 avril 1955, pendant les événements d’Algérie et afin d’éviter la proclamation de l’état de siège qui nécessite une guerre étrangère ou une insurrection armée. A l’époque on parle seulement de troubles ou d’événements en Algérie. Cependant on peut douter de la différence entre état de siège et état d’urgence et selon Edgar Faure : « La simple vérité est que le terme état de siège évoque irrésistiblement la guerre et que toute allusion à la guerre doit être soigneusement évitée à propos des affaires d’Algérie ».
Les lois relatives à l’état d’urgence votées sous la Ve République n’ont pas fait l’objet d’un contrôle de constitutionnalité avant leur promulgation. En 1985, le Conseil constitutionnel confirme que la Constitution de 1958 n’a pas abrogé la loi de 1955 mais ne se prononce pas sur la conformité de cette loi à la constitution.
Pour être utilisée la procédure de l’état d’urgence doit répondre à certaines conditions :
L’état d’urgence peut être déclaré sur tout ou partie du territoire métropolitain ou des départements d’outre-mer, dans deux hypothèses :
• soit en cas de péril imminent résultant d’atteintes graves à l’ordre public
• soit en cas d’événements présentant, par leur nature et leur gravité, le caractère de calamités publiques. (= catastrophes naturelles)
L’état d’urgence est déclaré par décret en conseil des ministres pour une durée initiale de 12 jours. Sa prolongation doit être autorisée par le parlement par le vote d’une loi.
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Mesures de l’état d’urgence
Le but premier de l’état d’urgence est de renforcer les prérogatives de police administrative afin de prévenir les troubles à l’ordre public. Ainsi :
L’état d’urgence accorde des pouvoirs particuliers aux préfets dont le département est couvert par la déclaration d’urgence :
Pouvoir du préfet : Article 5
Limitation ou interdiction de la circulation sous forme notamment de couvre feu
Zone de protection ou de sécurité où le séjour des personnes est réglementé
Interdiction de séjour dans le département à toute personne cherchant à entraver l’action des pouvoirs publics
De nouveaux pouvoirs sont aussi donnés au ministre de l’intérieur :
Pouvoir du ministre de l’intérieur : Article 6
prononciation d’assignation à résidence : En temps normal, l’assignation à résidence est prononcée par le juge d’instruction, ou le juge des libertés et de la détention, comme alternative à un emprisonnement à l’encontre d’une personne mise en examen ou condamnée à une peine inférieure
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