Rousseau le contrat social.
Par Ramy • 10 Mai 2018 • 1 387 Mots (6 Pages) • 658 Vues
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Les Nationalismes d'Europe (1820-1920)La fin de l'ère des mouvements de libération nationale aux Amériques coïncide assez étroitement avec l'âge du nationalisme en Europe. Or, ces mouvements européens ont comme caractéristique le fait que les langues d'imprimerie nationale ont eu une importance idéologique et politique centrale, tandis que l'espagnol et l'anglais n'avaient jamais été des enjeux dans les Amériques révolutionnaires. Le XIX° voit la “révolution lexicographique européenne”. Le latin, le grec, l'hébreu perdent leur caractère sacré; la philologie (études des langues) se développe. On assiste à l'âge d'or de la vernacularisation (publication de grammaires et de dictionnaire de russe, serbo-croate, norvégien, roumain...). Ceci se traduit par le développement de la publication d'ouvrages en langue vernaculaire. Les bourgeois, qui lisent les livres, prennent conscience qu'ils ont des semblables par milliers: il se crée une nouvelle forme de solidarité entre les bourgeois. ”Dans l'histoire universelle, les bourgeois forment les premières classes à asseoir leur solidarité sur des bases fondamentalement imaginées. Mais dans l'Europe du XIXeme siècle, où le capitalisme de l'imprimerie avait évincé depuis plus de deux siècles le latin, la lisibilité des langues vernaculaires limitait l'extension de ces solidarités”. D'où réduction de la taille de la communauté possible et nationalisation de ces communautés imaginées. De plus, la narration imprimée de la Révolution française
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ou des indépendances américaines produisit de nouveaux concepts, de nouveaux modèles dont beaucoup s'inspirèrent: “sitôt couchés par écrit, les mouvements d'indépendance des Amériques devinrent des " concepts ", des " modèles " et en fait des " projets "” (p 90), comme les Etats-nations, les institutions républicaines, les hymnes nationaux... On peut donc dire que dès 1820 existait un modèle d'Etat national indépendant. Il a été repris démagogiquement en Europe par les groupes sociaux les plus rétrogrades.
Setton-Watson appelle cette reprise “nationalisme officiel”. Le “nationalisme officiel” est la fusion volontaire de la nation et de l'empire dynastique (l'Empire, par définition, n'a pas de nationalité). Mais ce nationalisme officiel a pour caractéristique de s'être développé après et en réaction aux mouvements nationaux populaires qui proliféraient en Europe depuis 1920. Il s'agit de réponses apportées par des puissants (essentiellement dynastiques et aristocratiques) menacés d'être exclus ou marginalisés dans les communautés imaginées populaires. Ces nationalismes officiels sont des politiques conservatrices, voire réactionnaires, calquées sur les nationalismes populaires largement spontanés qui les avaient précédés. Ce nationalisme officiel s'est particulièrement exprimé dans l'impérialisme; Anderson y décèle une contradiction universelle: “les Slovaques allaient être magyarisés, les Indiens anglicisés, et les Coréens nipponisés, sans qu'on les autorisât à se joindre aux pèlerinages qui leur permettraient d'administrer des Magyars, des Anglais ou des Japonais [refus de leur admission dans l'Administration et de l'égalité](...). Le racisme n'est pas seul en cause: le fait est aussi qu'au coeur des Empires apparaissent aussi des nations - hongroise, anglaise et japonaise. Et d'instinct, ces nations résistaient aussi à la domination " étrangère "” (p 118). Les deux guerres mondiales mirent un terme à ces nationalismes officiels en Europe. Cette conception du nationalisme officiel est discutable : les nationalismes officiels ne sont pas seulement une réponse aux mouvements populaires ; ils ont largement contribué à les nationaliser dans l'Europe du XIXeme siècle.
La dernière vague de nationalisme: l'indépendance des coloniesSoudure des nouveaux principes nationaux et des anciens principes dynastiques (l'Empire britannique), le nationalisme officiel a conduit à une “russification” dans les colonies extra-européennes (intégration forcée par le biais de la langue et de l'école). Les Etats coloniaux ont créé des systèmes scolaires de type “russificateur” dont le but était en partie de produire des cadres subalternes nécessaires à l'administration publique et aux entreprises. D'où des pèlerinages vers les capitales des colonies pour se former, ce qui conduit à un brassage de population et donc à la création de la base territoriale de nouvelles communautés imaginées dans lesquelles les indigènes pouvaient se considérer comme nationaux. Ces élites formées scolairement se voyaient exclues du capitalisme colonial. Ces intelligentsias bilingues avaient accès, via le capitalisme de l'imprimé, à des modèles de nation, de formes nationales et de nationalisme distillés par les expériences tumultueuses et chaotiques de plus d'un siècle d'histoire américaine et européenne.
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