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Souveraineté et gouvernance économique mondiale

Par   •  2 Mars 2018  •  3 275 Mots (14 Pages)  •  471 Vues

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Accepter de perdre sa souveraineté économique peut être considérer comme un sacrifice, la souveraineté étant considérée comme fondamentale pour les Etats-nations. Pourquoi alors acceptent-ils ce sacrifice ? Les théories classiques de l’économie internationale nous permettent de mettre en avant le gain à l’échange. La théorie des avantages absolus d’Adam Smith permet de montrer que si un pays se spécialise dans la production du bien pour lequel il est le plus compétitif importe les autres marchandises, il obtiendra alors plus de biens, à moindre coût. Pour que cette idée soit applicable à l’ensemble des pays, c’est à dire pour que même ceux qui ne disposent pas d’un avantage absolu puisse participer à l’échange, il est possible de faire appel à la théorie des avantages comparatifs de David Ricardo. Chaque pays se spécialise dans la production du bien pour lequel il possède un avantage comparatif, c’est à dire là où il est le plus productif par rapport au coût. Ainsi, les pays ont un intérêt à l’échange dès lors que chacun se spécialise. Le libre échange se justifie alors comme un mode de croissance. Bien que d’autres approches aient été développées par la suite pour dépasser les limites de ces deux théories, telles que la théorie HOS par exemple, la théorie des avantages absolus et la théorie des avantages comparatifs sont encore aujourd’hui les justifications premières du commerce international : il existe un gain à l’échange. L’économie mondiale a connu une nouvelle phase de libéralisation depuis la Seconde Guerre mondiale, et plus particulièrement depuis les années 1980-1990. Mais cette libéralisation a été choisie par les Etats, ils ont établi l’ordre économique mondial eux mêmes, ce même ordre économique mondial qui est à la source d’une perte de leur souveraineté économique. Le gain à l’échange semble donc être la justification première du « sacrifice » fait par les Etats lorsqu’ils renoncent en partie à leur souveraineté au profit des forces du marché.

Il est également important de voir comment l’idée d’une gouvernance économique mondiale est parvenue à se rendre rassurante, et a donc permis de dépasser cette peur de perdre sa souveraineté pour les Etats. Il serait possible de faire l’hypothèse que la solidarité l’emporte sur le nationalisme dans le cadre économique, mais si la perte de souveraineté économique est considérée comme choix de la part des Etats, la solidarité ne semble pas en être une motivation. Cela se constate par exemple en Europe : au sein de l’UE, de nombreux individus ne se sentent pas européens et pourtant une large partie de leur souveraineté économique a été déléguée au niveau européen. L’explication de l’abandon de la souveraineté réside donc ailleurs. Tout d’abord, la gouvernance permet d’assurer une certaine sécurité. En effet, la gouvernance économique mondiale permet la protection de pays qui ne sont pas forcément les plus dotés en ressources, et qui n’ont ainsi pas de « puissance » à faire valoir. La gouvernance étant multilatérale et basée sur la négociation collective, elle permet de protéger ces pays contre le

risque d’unilatéralisme de pays que l’on peut considérer comme plus puissants tels que les Etats Unis ou la Chine par exemple. Il est également rassurant, pour l’ensemble des pays, de savoir qu’il existe des institutions qui peuvent faire office de créancier en dernier recours, et que ne laisserons pas l’économie d’un pays s’effondrer économiquement. Enfin, le principe même de gouvernance suggère que les décisions prises dans son cadre seront collectives et négociées, ce qui rend donc la rend acceptable.

En plus d’apparaître comme rassurante, la gouvernance économique mondiale est parvenue à être considérée comme indispensable et comme étant la seule alternative viable sur laquelle l’ordre économique mondial doit reposer. La discipline que mettent en place les normes et les règles de la gouvernance économique mondiale apparaît comme nécessaire. Cela s’explique par la forte interdépendance entre les économies. On peut observer sur le graphique suivant que les cycles économiques de croissance sont corrélés, même entre différents « types » de pays. En effet, on pourrait penser que les pays avancés et les pays en développement par exemple ne réagissent pas de la même manière aux fluctuations de l’économie internationale. Il est évident que tous les pays n’ont pas la même sensibilité aux chocs, mais comme on peut le voir la tendance globale est commune.

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L’interdépendance qui caractérise ainsi l’économie mondiale a ses avantages et ses inconvénients. Elle permet d’une part de profiter de la croissance des autres parties du monde, mais elle rend aussi les crises faciles à propager. La gouvernance est donc une protection contre les risques liés à l’interdépendance, mais elle peut aussi être créatrice d’une dépendance, qui est alors une menace pour la souveraineté mais qui est cette fois subie. En effet, c’est ce qu’illustre les aides « conditionnelles » mises en place par le Consensus de Washington. A la fin des années 1980, de nombreux pays subissent une grave crise de la dette. Des institutions de la gouvernance économique mondiale, le FMI et la Banque Mondiale, vont alors octroyer des prêts aux Etats qui demandent de l’aide, mais sous réserve de la mise en place de certaines politiques économiques. C’est à partir de ce type de pratique que va émerger l’idée du « diktat » des institutions financières internationales.

La gouvernance économique mondiale est sujette à de nombreuses critiques, ce qui rend le renoncement à la souveraineté économique de moins en moins acceptable auprès des Etats. Il y a une véritable crise de légitimité des institutions économiques et financières internationales. Au delà de ça, il est vrai que les institutions internationales ont un certain pouvoir sur les Etats, et cela semble difficile à accepter pour certains Etats, on pense notamment aux Etats Unis. L’affaire du « Clean Air Act » ayant eu lieu aux Etats Unis dans les années 1990 avait déjà montré que l’OMC pouvait faire plier le géant américain, au profit du Venezuela qui avait porté plainte contre les nouvelles normes américaines sur la pollution atmosphérique qui en réalité ne faisaient que favoriser les raffineries américaines. Quelques années plus tard, en 2002, c’est un véritable bras de fer qui va s’ouvrir entre l’OMC et les Etats Unis, et qui cette fois concernera la décision américaine d’imposer

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