Les sources des droits fondamentaux dans l’Union Européenne
Par Junecooper • 2 Septembre 2018 • 2 854 Mots (12 Pages) • 587 Vues
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- La consolidation formelle opérée à partir du Traité de Maastricht
Cette consolidation formelle va se retrouver à travers 2 aspects. Le premier correspond à la réflexion portant sur une éventuelle adhésion de la Communauté Economique Européenne à la CEDH dans les années 90. L’idée aurait été ainsi de parvenir directement à un système très élaboré et qui fonctionne depuis déjà un certain nombre d’années. La cour a été saisie d’une demande d’avis sur la question déposée au greffe le 26 avril 1994. Elle a dû répondre à la question de savoir si une éventuelle adhésion de la Communauté Européenne à la CEDH serait compatible avec le traité instituant la CE. Le Conseil avait subordonné une potentielle ouverture de négociations à l’avis favorable de la CJCE. Cependant, la Cour a répondu négativement qu’en « l’état actuel du droit communautaire, la Communauté n’a pas compétence pour adhérer à la CEDH ». La CJ estime qu’aucune disposition dans les traités de l’époque ne conférait à la C.E une compétence pour conclure une convention internationale en matière de droits fondamentaux. En effet, cela revêtirait une proportion constitutionnelle et dépasserait ainsi les limites de l’article 235. Les juges ont affirmé que cette adhésion ne « saurait donc être réalisée que par la voie de modification du traité CE ». Face à cet avis défavorable de la Cour, l’idée de l’adhésion a été abandonnée et c’est sur le deuxième aspect de la consolidation formelle que la question des droits fondamentaux va être étudiée.
C’est le Traité de Maastricht qui va procéder à la principale consolidation du travail prétorien effectué depuis la fin des années 1960 dans les traités eux-mêmes avec l’insertion de l’article 6§2 du TUE qui dispose : « L’Union respecte les droits fondamentaux, tels qu’ils sont garantis par la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950, et tels qu’ils résultent des traditions constitutionnelles communes aux États membres, en tant que principes généraux du droit communautaire. » La règle est très clairement posée ici : les deux sources principales des droits fondamentaux à l’issu du traité de Maastricht sont la CEDH et les principes généraux du droit tels qu’ils résultent des traditions constitutionnelles communes aux Etats membres. On voit naitre ici une certaine notion d’autonomie à travers les PGD, qui sont propres à l’Union. Le traité d’Amsterdam qui suit les traces du Traité de Maastricht va encore plus loin en communautarisant une partie du pilier Justice et Affaires Intérieures (JAI) pour le placer dans le champ du premier pilier. Le pilier JAI étant se révélant être une source de contentieux s’agissant des droits fondamentaux, la Cour va pouvoir dégager encore plus de PGD consacrant de tels droits et effectuer des contrôles pour garantir leur respect. Une sanction a également été prévue en cas de violation grave et persistance des droits fondamentaux tels que garantis par l’Union : la perte du droit de vote. En l’espèce, ce mécanisme n’a jamais été utilisé, sûrement parce qu’il implique un aspect éminemment politique et qui pourrait se révéler source de tension. On imaginerait très bien aujourd’hui la Hongrie de M. Viktor Orbán se voir retirer son droit de vote au Conseil. Toutefois, des Etats membres avec l’Allemagne à leur tête ont émis l’hypothèse de créer un véritable catalogue des droits fondamentaux garantis par le droit de l’Union. Ainsi, en juin 1999, le Conseil Européen de Cologne a mandaté une convention pour réfléchir et élaborer un tel projet, composé à la fois de parlementaires européens et nationaux. Cette convention a abouti à l’adoption symbolique de la Charte des Droits Fondamentaux de l’Union Européenne lors du Conseil Européen de Nice en décembre 2000. Symbolique parce qu’il était prévu que cette Charte n’aurait pas de portée juridique contraignant. C’est ce qu’ont obtenu les Etats membres réticents comme le Royaume-Uni ou le Danemark. Bien que l’apport principal de cette Charte soit d’apporter un véritable catalogue des droits fondamentaux avec des droits nouveaux qui n’étaient pas forcément au cœur du projet du Conseil de l’Europe, la portée de cette source subsidiaire va rester très limitée jusqu’à la signature du Traité de Lisbonne en 2007.
- L’ère post Traité de Lisbonne, révolution ou stagnation pour la protection des droits fondamentaux ?
Si le traité de Lisbonne a permis de manière bienvenue mais incomplète d’élever la Charte en tant qu’acte juridique contraignant (A), encore faut-il articuler le droit de l’Union et la Convention Européenne des Droits de l’Homme en matière de droits fondamentaux (B).
- L’élévation bienvenue mais incomplète de la Charte en tant qu’acte juridique contraignant
Le Traité de Lisbonne est à l’origine de nombreuses innovations dans la refonte de l’Union Européenne. S’agissant de la protection des droits fondamentaux, ce traité a eu le principal apport d’ériger la Charte des droits fondamentaux de l’UE en acte juridique contraignant ce qui n’a pas été aisé. En effet, les Etats n’ont pas réussi à se mettre d’accord sur la portée qu’ils voulaient conférer à la Charte ce qui a abouti pour les Etats « anti Charte » comme la Pologne, le Royaume-Uni ou encore la République Tchèque à obtenir des dérogations. Pour le Royaume-Uni par exemple, il ne sera lié par les dispositions de la Charte que si elles existent préalablement dans son système juridique interne. Quoi qu’il en soit, le caractère contraignant de la Charte a été admis. En pratique, la Charte est annexée sous la forme d’une déclaration au Traité de Lisbonne et le nouvel article 6 effectue un renvoi à celle-ci. Cet article affirme ainsi : « L'Union reconnaît les droits, les libertés et les principes énoncés dans la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne du 7 décembre 2000, telle qu'adaptée le 12 décembre 2007 à Strasbourg, laquelle a la même valeur juridique que les traités. » La Charte acquière ainsi une véritable reconnaissance mais également une certaine portée juridique l’élevant ainsi au rang de source primordiale des droits fondamentaux au même titre que la CEDH ou les PGD.
Toutefois, les conséquences juridiques de l’élévation de la Charte en acte juridique contraignant restent limitées. En effet, on peut distinguer à l’intérieur même de la Charte une dichotomie au sein des droits
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