L'échec de la IVème République
Par Andrea • 5 Septembre 2018 • 2 666 Mots (11 Pages) • 345 Vues
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Le problème, c’est que la stabilité gouvernementale n’est pas liée à l’obtention par le Gouvernement de moyens législatifs et budgétaires ; or si le Gouvernement engage sa responsabilité politique à la majorité relative sur une loi ordinaire ou budgétaire, rien n’est prévu s’il échoue. Les autres techniques de rationalisation d’importance mineure peuvent être étudiées à partir de la description de l’organisation des pouvoirs publics. - le pouvoir législatif est confié de nouveau à un Parlement bicaméral; les 2 chambres sont: - une Assemblée Nationale élue à la RP au suffrage universel direct ; mais bientôt, une loi dite des "apparentements" du 9 mai 1951 introduira un élément majoritaire. (les listes apparentées qui l’emportent dans une circonscription gagnent tous les sièges comme avec le scrutin majoritaire).
un Conseil de la République élu à partir de la loi du 23 septembre 1948 comme le Sénat de la IIIème République. Ce Conseil n’a au départ qu’un rôle consultatif; c’est-à-dire qu’il ne vote pas la loi. Il se contente de donner un avis sur les projets et propositions de loi. Mais s’il vote une modification de la loi voulue par l’Assemblée nationale, cela à la majorité absolue, alors l’Assemblée Nationale ne peut passer outre qu’à la suite d’un vote acquis dans les mêmes formes. Après une réforme de 1954, le Conseil de la République retrouvera comme le Sénat de la IIIème république le pouvoir de voter la loi. - le pouvoir exécutif est donné à : * un Président de la République élu pour 7 ans par le Parlement; il n’est plus chef de l’Exécutif et perd au profit du Président du Conseil de nombreuses prérogatives. * un Président du Conseil qui dirige le Gouvernement qu’on veut stable; il dispose pour cela notamment des compétences suivantes: - Il est seul à pouvoir poser la question de confiance après autorisation du cabinet - Il dispose du droit de dissolution qui ne peut intervenir que si dans un délai de 18 mois, 2 crises ministérielles dans les formes "constitutionnelles" sont intervenues (c’est-à-dire si le Gouvernement est tombé soit parce que la question de confiance a été rejetée à la majorité absolue, soit parce qu’il a été victime d’une motion de censure votée à la majorité absolue). de plus, une dissolution ne peut intervenir dans les 18 premiers mois d’une législature (article 51). Il faut ajouter que, jusqu’en 1954, en cas de dissolution, le Président de l’Assemblée Nationale remplaçait le Président du Conseil dans ses fonctions et désignait, en accord avec le bureau de l’Assemblée, un nouveau ministre de l’Intérieur. Après, ce n’est que dans le cas où la dissolution fait suite à un vote de censure que le Président de l’Assemblée Nationale remplace le Président du Conseil. Il fait alors aussi fonction de ministre de l’Intérieur.
Comme on le voit, par rapport au premier projet de constitution, ce projet prend réellement en compte le problème de l’instabilité ministérielle. Mais de façon contradictoire, il ne rompt pas avec la tradition révolutionnaire et même républicaine qui identifie souveraineté nationale et souveraineté parlementaire ; ce qui se traduit par le fait que le Gouvernement continue de procéder étroitement du Parlement; il n’a pas d’autonomie réelle et donc peut être très affaibli si la rationalisation ne marche pas.
II. La rationalisation manquée, vecteur de l’échec
Marquée par les partis, la Constitution subira leur influence, l’évolution politique du régime entraînant l’échec des procédures censées rationaliser le parlementarisme.
Cela nous amènera à voir les dérives de la rationalisation (A) puis l’effondrement de la IVe République (B)
A. Les dérives de la rationalisation
La rationalisation fut un échec à cause de dérapages.
Ils concernent : - l’investiture: elle doit avoir lieu normalement à la majorité absolue. Or, Ramadier, premier Président du Conseil nommé sous la IVème République accepte après avoir été investi le 21 janvier 1947 de revenir une seconde fois devant l’Assemblée nationale pour répondre à des interpellations concernant la composition de son Gouvernement. Dès lors va se développer la pratique de ce qu’on appelle la "double investiture": une première investiture à la majorité absolue sur le nom du président du Conseil et le programme du Gouvernement une deuxième investiture à la majorité relative sur la composition du Gouvernement qui va l’affaiblir. - la question de confiance : normalement, le Président du Conseil devait utiliser la question de confiance dans des cas rares compte tenu de la prise de risque qu’elle suppose. Mais, dans la pratique, il y eut inflation de questions de confiance. Le Président du Conseil en usa très souvent pour contraindre sa majorité à voter des projets de lois qu’il jugeait indispensables. Or les députés s’arrangèrent pour rejeter la question de confiance à la majorité relative. En conséquence, le Gouvernement n’obtenait pas ce qu’il voulait, soit l’adoption de son projet de loi et était mis en minorité; ce qui l’obligeait à démissionner. Comme de plus, le rejet de la question de confiance n’avait pas eu lieu à la majorité absolue, cela ne pouvait être comptabilisé comme une crise ministérielle constitutionnelle permettant de dissoudre. - la réapparition des interpellations: les interpellations interdites par la Constitution de 1946 réapparurent très vite. Elles avaient l’avantage pour les députés de leur permettre de renverser le Gouvernement à la majorité relative (ou des suffrages exprimés) ; ce qui empêchait là encore l’utilisation du droit de dissolution. En réalité, la procédure officielle de la motion de censure faite pour renverser le Gouvernement (adoptée à la majorité absolue) n’entraîna jamais la démission du Gouvernement. - la non utilisation du droit de dissolution: le droit de dissolution était assorti comme on l’a vu de conditions qui rendaient son utilisation improbable (Cf rappel des conditions); de plus, les députés en renversant le Gouvernement dans des conditions non prévues par la Constitution avaient réussi à priver le Gouvernement de cette arme. Une seule dissolution intervint le 2 décembre 1955 faite par E. Faure (la dernière était celle du 25 juin 1877) à la suite de deux erreurs de tir des députés: en février 1955, P. Mendès-France, puis E. Faure en décembre ayant été renversés à la majorité
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