CE 25 juillet 1986 Commune de Mercœur
Par Raze • 26 Juin 2018 • 1 805 Mots (8 Pages) • 1 839 Vues
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—> En l’espèce le CE admet que la création d’un bar-restaurant peut être un élément d’animation de la vie locale car ce dernier avait pour objet « de doter la commune d’installations permettant l’organisation des repas collectifs et des réunions […] et de contribuer à l’animation de la vie locale ». Cela correspondant à un intérêt public local car ces repas et réunions constituent normalement la vie administrative et sociale de ce chef-lieu de canton.
De plus, le CE a considéré que la décision de la construction d’un bar-restaurant permettrait de faciliter l’exploitation du commerce d’alimentation, du fait qu’il n’y en existait pas dans la commune et cela, représentant un « besoin pour la population ».
—> Le CE a également admis un besoin local de la population dans une décision de 1954 « Berthold » relatif à la fourniture funéraire.
Cependant, la légitimité de l’action tenant au respect des circonstances locales particulières de temps et de lieux ainsi que l’intérêt public local, ne saurait suffire si l’intervention de la commune portait atteinte au principe de la liberté du commerce et de l’industrie.
II - Le respect du principe de la liberté du commerce et de l’industrie
La commune n’a pas porté illégalement atteinte au principe de la liberté du commerce et de l’industrie du fait de l’absence de la concurrence à l’initiative privée (A), cependant se principe tend à s’affaiblir car l’évolution jurisprudentielle aboutirait à sa substitution au principe d’égale concurrence entre les opérateurs économiques intervenant sur le marché (B).
A - L’absence d’atteinte illégale au principe du fait de la non concurrence à l’initiative privée
—> Ce principe est à valeur constitutionnelle (Conseil constitutionnel 16 janvier 1982), et découle de l’arrêt du CE, 1951 « Daudignac » qui dispose que les autorités administratives doivent respecter les libertés de commerce et d’industrie En l’espèce le conseil municipal s’il veut que sa délibération soit acceptée, elle doit être conforme au principe de la liberté du commerce et de l’industrie.
—> Principe réaffirmé par la loi du 2 mars 1982, permettant aux collectivités territoriales des interventions directes ou non dans le domaine économique local, sous réserve que soit respecté le principe de la liberté du commerce et de l’industrie. Le CE avait censuré la délibération d’un conseil municipal dans une affaire en date de janvier 1988, « Commune de Cluzaz » car celle-ci portait atteinte à ce principe.
—> en l’espèce, le fait qu’il n’y aucun « commerce de cette nature », à savoir des commerces d’alimentation, cela ne fait aucunement concurrence à l’initiative privée et permet au conseil municipal de rendre légal sa délibération du 12 décembre 1980 relative à la construction d’un bâtiment à usage de commerces d’alimentation.
—> Le CE conserve une position constante car elle a affirmé dans l’affaire de « l’Ordre des avocats au barreau de Paris » en 2006 que si les personnes publiques indépendamment de leurs missions de service public, veulent prendre en charge une activité économique, elles doivent respecter la liberté du commerce et d’industrie.
Cependant on peut se demander si ce principe ne tendrait pas à s’affaiblir dû à une évolution jurisprudentielle tendant à la substitution de ce principe à celui de l’égale concurrence entre les opérateurs économiques intervenant sur le marché.
B - Un affaiblissement du principe par la substitution du principe d’égale concurrence entre les opérateurs économiques
—> L’interdiction qui pendant longtemps a pesé sur les personnes publiques, d’exercer ou de soutenir des activités industrielles ou commerciales était liée à l’inégalité que leur statut risquait d’introduire à leur profit et cela au détriment des entreprises, car elles fausseraient la concurrence, défavorisant l’initiative privée.
—> L’égalité est devenue une condition même de la légalité des interventions publiques concurrençant l’initiative privée.
« Le droit de l’intervention économique publique, qui reposait sur un principe de non-concurrence entre les activités publiques et privées, cherche désormais un nouveau fondement dans le principe d’égale concurrence entre les opérateurs économiques intervenant sur un marché, quel que soit leur statut public ou privé », CE, 2000 « Société Jean-Louis Bernard Consultants ».
—> Principe de concurrence admis par le CE, 2006, « Ordre des avocats du barreau de Paris » qui a considéré que l’autorité publique peut légalement prendre en charge une activité économique si elle le fait dans le respect de la liberté du commerce et de l’industrie et que pour intervenir sur un marché elle son intervention doit « se réaliser suivant les modalités telle qu’en raison de la situation particulière dans laquelle se trouverait cette personne publique par rapport aux autres opérateurs agissant sur le même marché, elle fausserait le libre jeu de la concurrence sur celui-ci ».
Il serait donc difficile d'affirmer que la jurisprudence de « Commune de Mercoeur » est dépassée car le principe de liberté du commerce et de l'industrie, qui avait pourtant pour objectif d'éviter que les personnes publiques concurrencent les personnes privées, et semble être remis en cause par certaines décisions du Conseil d'Etat. Cependant, certains textes législatifs et certaines décisions du Conseil d'Etat continuent de s'y référer. Ainsi, l’évolution jurisprudentielle pourrait aboutir à substituer le principe de non-concurrence entre personnes publiques et privées à celui d'une égale concurrence entre celles-ci.
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