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Le harcèlement moral en droit du travail ivoirien

Par   •  4 Mai 2018  •  7 196 Mots (29 Pages)  •  850 Vues

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- LA CONSTITUTION DU HARCELEMENT MORAL

Le harcèlement moral est un délit au sens civil du terme. En tant que tel son étude commande nécessairement de s’intéresser, pour mieux l’appréhender, aussi bien à ses élément matériel (A) qu’à son élément intentionnel (B).

- L’élément matériel du harcèlement moral

Conformément à l’alinéa 5 de l’article 5 du nouveau code du travail, « Constituent un harcèlement moral les comportements abusifs, les menaces, les attaques, les paroles, les intimidations, les écrits, les attitudes, les agissements répétés à l'encontre d'un salarié, ayant pour objet ou pour effet la dégradation de ses conditions de travail et qui comme tels sont susceptibles de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. » Il ressort donc de ce texte que le harcèlement moral est caractérisé par la combinaison des agissements qui en constituent le moyen et par son résultat produit (les conséquences) sur la victime (2).

- Le moyen du harcèlement moral

Au regard de la disposition précitée, le harcèlement moral se manifeste par des actes précis : « les comportements abusifs, les menaces, les attaques, les paroles, les intimidations, les écrits, les attitudes, les agissements répétés ».

S’il est indiscutable que le législateur ivoirien contrairement à son homologue français, a pris le soin de donner une liste des faits susceptibles d’entrainer un harcèlement moral, il convient de reconnaitre que cette liste reste indicative et non exhaustive vu le caractère générique de certains termes (« comportements », « agissements »). Même si on peut justifier cette flexibilité terminologique par le souci de prendre en compte un maximum d’actes, le comportement du harceleur n’étant pas aisé à prévoir, la crainte d’une insécurité juridique bien réelle. Par exemple, que faut-il entendre exactement par « comportement abusif » ? Est-ce une menace, une attaque, une parole, une intimidation, un écrit, une attitude ou un agissement répété ? Ou faut-il comprendre que l’article 5 énumère des actes autonomes, isolés les uns les autres au point qu’on aurait entre autre, les comportements abusifs, les menaces, les attaques, les paroles, les intimidations, les écrits, les attitudes et les agissements répétés ? En tout état de cause, il apparait constant en droit comparé (en droit français notamment) que l’acte de harcèlement doit cumuler deux caractères essentiels : le caractère abusif et le caractère répété. En considérant ces deux caractères essentiels, on pourrait comprendre en droit ivoirien, que l’acte de harcèlement moral, peu importe qu’il soit une menace, une attaque, une parole, une intimidation, un écrit, une attitude ou un agissement, doit être répété et constitué un abus de son auteur.

En guise de référence, des études réalisées par la Confédération Générale du Travail (CGT) en France[11] et par l’Organisation Mondiale de la Santé[12] nous donnent quelques exemples d’actes susceptibles de constituer un harcèlement moral. De façon pratique, ces actes peuvent être rangés en deux sous-groupes selon qu’ils portent atteinte à la personne de la victime ou qu’ils portent atteinte à ses conditions de travail.

Au sujet des premiers, nous pouvons citer entre autre l’exclusion qui peut se manifester par la mise à l’écart de la victime (changement de son bureau), par l’interruption de la communication d’avec elle, ou tout simplement par son ignorance dans la société ; On peut citer le commérage à son sujet (consistant à faire courir des rumeurs à son sujet ; on utilise des sous-entendus, des non-dits, des remarques blessantes, des sarcasmes à son égard), la destruction de ses biens personnels (on occasionne des dégâts à son véhicule, à ses objets personnels au bureau), les humiliations (consistant à se moquer de ses handicaps ou de son physique ; on l’imite ou on la caricature), les complots (on envahit sa vie privée par des coups de téléphone ou des lettres, on la suit dans la rue, on la guette devant son domicile) ; la ridiculisation et les injures (par l’utilisation des propos méprisants pour la qualifier, des gestes de mépris (soupirs, regards méprisants, haussements d’épaules…), on la discrédite auprès des collègues, des supérieurs ou des subordonnés, on se moque de ses origines ou de sa nationalité, on s’attaque à ses croyances religieuses ou à ses convictions politiques ou syndicales…)

Quant aux actes portant atteinte à ses conditions de travail, on peut retenir qu’elles peuvent se présenter sous diverses formes tout comme les précédentes. Ces actes consistent le plus souvent, à :

- retirer à la victime son autonomie professionnelle ;

- refuser de lui transmettre délibérément les informations utiles à la réalisation d’une tâche ;

- contester systématiquement toutes ses décisions ;

- critiquer son travail injustement ou exagérément ;

- lui retirer l’accès aux outils de travail : téléphone, fax, ordinateur... ;

- lui retirer le travail qui normalement lui incombe ;

- lui donner en permanence des tâches nouvelles ;

- lui attribuer volontairement et systématiquement des tâches inférieures à ses compétences ;

- faire pression sur elle pour qu’elle ne fasse pas valoir ses droits ;

- lui attribuer contre son gré des travaux dangereux ;

- lui attribuer des tâches incompatibles avec sa santé ;

- occasionner des dégâts à son poste de travail ;

- lui donner délibérément des consignes impossibles à exécuter ;

- la pousse à la faute.

Ces quelques actes que nous venons d’exposer, peuvent constituer des actes de harcèlement s’ils sont répétés et présentent un caractère abusif.

Le caractère abusif de l’acte se mesure par rapport au préjudice qu’il cause au salarié victime :

- atteinte à ses droits et sa dignité ;

- altération de sa santé physique

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