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L’apport de la jurisprudence internationale à la notion de jus cogens

Par   •  1 Octobre 2018  •  3 454 Mots (14 Pages)  •  513 Vues

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états à la convention considérée, une fois apaisées les tensions qui ont marqué la négociation.

Il n’en reste plus des lors au juge qu’à constater l’existence de normes générales de droit international public, portant ainsi à son terme le processus d’objectivisation.

La notion de jus cogens à travers la jurisprudence de la Cour internationale de justice

La cour internationale de justice a en effet utilisé à plusieurs reprises des concepts voisins du jus cogens, dans la mesure où ils se rattachent tous à la notion d’ordre public international.

La cour a tout d’abord consacré l’existence de valeurs juridiques éminentes dans l’ordre juridique international. Dans l’affaire du Détroit de Corfou, la Cour a ainsi écarté la convention VII de La Haye comme fondement à une obligation de l’Albanie de notifier au Royaume – Uni l’existence de mines dans ses eaux territoriales, au profit de « considérations élémentaires d’humanité », valables en dehors de tout lien conventionnel et « plus absolues encore en temps de paix qu’en temps de guerre » (Arrêt du 9 avril 1949). De la même manière, dans son avis sur les Réserves à la convention pour prévention et la répression du crime de génocide, la Cour souligne qu’un des buts poursuivis par la convention consiste à « confirmer et sanctionner les principes de morale les plus élémentaires », principes qui, dit-elle plus haut « sont des principes reconnus par les nations civilisées comme obligeant les Etats même en dehors de tout lien conventionnel » (Avis du 28 mai 1951). Ce caractère à la fois moral et élémentaire des principes invoqués permet certainement d’en déduire leur caractère indérogeable en droit international.

Un autre aspect de l’ordre public est invoqué par la Cour avec la notion d’obligation erga omnes, clairement consacrée dans son arrêt Barcelona Traction Light and Power Company Limited : dans cet arrêt, la Cour établit en effet qu’une « distinction essentielle » doit être opérée entre « les obligations des états envers la communauté internationale dans son ensemble et celles qui naissent vis-à-vis d’un autre Etat dans le cadre de la protection diplomatique ». La Cour souligne « l’importance des droits en cause » pour en déduire que tous les Etats peuvent etre considérés comme ayant un interet juridique à ce que ces droits soient protégés » et que « les obligations dont il s’agit sont des obligations erga omnes ». Soucieuse de préciser sa pensée, la Cour donne quelques exemples dans un fameux obiter dictum : « la mise hors la loi des actes d’agression et du génocide mais aussi des principes et des règles concernant les droits fondamentaux de la personne humaine, y compris la protection contre la pratique de l’esclavage et la discrimination raciale » (Arrêt 5 février 1970).

La notion d’obligation erga omnes sera reprise par la suite dans l’affaire du Timor oriental à propos du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes : dans cet arrêt, la Cour estime qu’il n’y a rien à redire à l’affirmation du Portugal selon laquelle ce principe est un droit international, rapprochant ainsi encore considérablement la notion de celle de « norme impérative » (Arret du 30 juin 1995).

L’ambiguïté est donc cultivée par la Cour qui ne sépare jamais vraiment le caractère essentiel. Cette ambigüité se trouve encore renforcée dans l’avis consultatif sur la Licéité de la menace ou de l’emploi d’armes nucléaires, ou la Cour parle, à propos des principes du droit humanitaire, de « principes cardinaux », mais également de « principes intransgressibles du droit international coutumier » qui s’imposent à tous les états « qu’ils aient ou non ratifié les instruments conventionnels qui les expriment ».

Ce jeu sur les mots rappelle le rendez-vous manqué de 1979, dans une ordonnance sur la demande e indication de mesures conservatoires rendue dans l’affaire des otages américains à Téhéran : le texte français mentionne les « obligations impératives » du droit des relations diplomatiques et consulaires. Mais le texte anglais qui constitue l’original utilise le même terme – « impérative » - alors que la traduction de « normes impérative » au sens de jus cogens est « preremptory norms ».

Cette ambigüité est caractéristique de la réserve de la Cour sur la question du jus cogens. Une telle réserve ne va toutefois pas empêcher les consécrations directes de se multiplier.

Si la jurisprudence s’est donné pour rôle de préciser la notion de jus cogens autant que de dégager de nouvelles règles, un autre phénomène s’est peu à peu dégagé : la jurisprudence tend à jouer un rôle de développeur du jus cogens. La portée de celui-ci s’en trouve alors étendue.

Portée du jus cogens et développement du droit par la jurisprudence

Les juridictions internationales développent le droit en influençant la portée du jus cogens dans différentes directions. Mais cette évolution du jus cogens n’a pas nécessairement que des conséquences positives (A) car elle fait l’objet de nombreuses critiques concernant son efficacité (B).

A) Une évolution de cette notion de jus cogens à travers la jurisprudence des autres juridictions internationales

Pendant très longtemps, la Cour a en effet évité soigneusement de prendre partie dans la querelle doctrinale qui divisait les états et les juges eux-mêmes comme en témoignent les opinions dissidentes. Elle préférait contourner le problème, quitte à interpréter les questions qui lui étaient posées de manière restrictive.

Ainsi, dans son avis consultatif sur la Licéité de la menace ou de l’emploi d’armes nucléaires, la Cour consacre un paragraphe entier à expliquer les raisons pour lesquelles elle ne se prononcera pas sur le caractère de jus cogens des règles de droit humanitaire : « la question de savoir si une règle fait partie du jus cogens a trait à la nature juridique de cette règle. La demande que l’Assemblée générale a adressée à la Cour soulève la question de l’applicabilité des principes et règles du droit humanitaire en cas de recours aux armes nucléaires à ces armes, mais elle ne soulève pas la question de savoir quelle serait la nature du droit humanitaire qui s’appliquerait à l’emploi des armes nucléaires. La Cour n’a donc pas à se prononcer sur ce point ».

Jusqu’ en 2006, la seule évocation positive et directe du jus cogens ne résulterait même pas d’une prise de position de la part

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