Cours de droit foncier marocain.
Par Orhan • 4 Juin 2018 • 23 820 Mots (96 Pages) • 823 Vues
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Ses attributions sont fixées par le Dahir du 29 décembre 1953.
- Il contrôle l'exercice des fonctions dont les conservateurs sont chargés par l'article 4 de l'arrêté viziriel organique du 4 juin 1915 (21 rejeb 1333) ;
- Il donne aux conservateurs, qui doivent lui soumettre toutes les questions et affaires importantes nécessitant une décision de principe, toutes instructions générales ou particuliers propres à assurer cette unité ;
- Il peut évoquer, aux fins de décision, toutes affaires d'immatriculation on d'opérations subséquentes, soit d'office, soit à la requête des intéressés.Ses décisions peuvent, dans tous les cas, faire l'objet du recours judiciaire prévu par l'article 96 de la loi 14-07, modifiant et complétant le Dahir susvisé du 12 août 1913 sur l'immatriculation des immeubles.
En outre, le conservateur général dresse des circulaires aux conservateurs depuis 1917 jusqu’à nos jours, circulaires qui sont considérées comme étant l’une des principales sources du droit foncier, comme on le verra plus loin. Leur lecture, comme le souligne le Professeur « Paul Decroux » dans son livre intitulé « Droit foncier marocain »[2], révèle les nombreuses difficultés auxquelles ont dû faire face les conservateurs ainsi que les directives du Conservateur Général pour pallier à celles-ci[3].
- Caractéristiques du droit foncier marocain
- Un droit révélant une dualité des régimes juridiques
La dualité caractérisant le droit foncier marocain est due à la coexistence de deux régimes qui sont appelés à composer entre eux. Il s’agit du régime traditionnel et du régime moderne.
- Le régime traditionnel
Celui-ci est régi par les principes du droit musulman et les coutumes légales. Il régit les pratiques ancestrales foncières qui sont inspirés du droit musulman selon lequel les droits sont consacrés et authentifiés par des actes adoulaires.
Cela dit, le régime traditionnel comporte plusieurs inconvénients[4] dont on cite principalement :
- L'absence de publicité des droits prétendus;
- La méconnaissance par les tiers, (et parfois par les ayants droits) de l'immeuble concerné, sa situation, sa consistance, ses limites, ainsi que de la nature et de l'étendue de droits qui s'y exercent et de leurs véritables détenteurs;
- L'insécurité des transactions car le droit prétendu existe jusqu'à preuve du contraire,
- La difficulté d'accès aux crédits puisque la garantie réelle est incertaine ;
- La faiblesse de l'investissement ;
- La multitude des litiges entre riverains et d'autres prétendants qui constituent plus de 50 % des affaires pendantes devant les tribunaux.
- Le manque total de publicité concernant les immeubles non immatriculés et leurs détenteurs rend le secteur traditionnel d'une "opacité" impropre à la circulation des biens, à l'investissement et à la modernisation.
Il convient de signaler, enfin, que, dans le régime en cours d’examen, le droit de propriété est fondé, en cas d'existence de documents écrits probants, soit sur : la possession paisible publique, à titre de propriété, permanente d'une durée supérieure à 10 ans lorsqu’elle est invoquée à l'encontre d’un tiers, et à 40 ans quand elle est invoquée à l'encontre de parents; ou encore sur l’acquisition au profit du possesseur au-delà de la durée précitée.
- Un régime moderne
Il s’agit du régime de l’immatriculation foncière a été instauré à partir de 1913 et qui est régi, actuellement par le Dahir de 1913 tel quil a été complété et modifié par les la loi 14-07, est caractérisé par la publicité et la force probante des inscriptions sur les livres fonciers.
Ce dernier système présente de nombreux avantages juridiques, topographiques économiques et sociaux, cependant, il demeure facultatif ce qui entrave sa généralisation. Parmi les avantages, on peut citer :
- Il a un effet de purge qui annule tout droit réel antérieur non révélé au cours de la procédure d'immatriculation;
- Chaque immeuble est individualisé par un nom, plan, et un numéro propre. C'est le titre foncier qui constitue pratiquement l'état civil de la propriété et lui donne un nouveau départ ;
- Le titre foncier dès son établissement est définitif et inattaquable;
- Les droits inscrits sur le titre ont un effet légal et une force probante entre les parties, vis-à-vis des tiers et auprès des tribunaux; Tout droit acquis doit être détenu de la personne précédemment inscrite, ce qui écarte toute usurpation ou prescription. Il ne peut y avoir de rupture dans la chaîne des inscriptions, l'accès au crédit et à l'investissement, etc.
Nous constatons la présence côte à côte de deux régimes dont l'un malgré ses défauts, préserve l'intimité des propriétaires, et l'autre, malgré ses qualités, dévoile à tout venant des données qui devraient être personnelles et confidentielles.
- Un droit consacrant une variété de statuts fonciers
L'espace foncier est structuré par des statuts, dont certains ne procurent pas la stabilité et les garanties nécessaires pour entreprendre des investissements sur le long terme:
- Le Melk, largement prédominant : c’est un droit de propriété, qui porte essentiellement sur les immeubles (la terre). Les règles s’y appliquant trouvent leur origine dans le droit musulman, rite malékite, règles à la mise en œuvre desquelles le colonisateur ne s’opposera pas, puisque son intervention en la matière se limitera à l’adoption de quelques dispositions légales, celles relatives à la procédure d’établissement des actes de propriété[5].
Les auteurs musulmans classiques considèrent un tel droit comme relevant de la pleine propriété privative, que celle-ci soit individuelle ou familiale, avec ou sans indivision.
- Les immeubles domaniaux possédées par l'Etat, personne morale de droit public, classés en Domaine Public (rues, plages, ports,...), Privé (provenant
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