Berenice jean racine
Par Stella0400 • 21 Janvier 2018 • 1 442 Mots (6 Pages) • 666 Vues
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de Titus, par Bérénice, malgré que ce soit dans un autre mode et un autre registre. Je cite :
« Demeurez. / Que je demeure »
En addition, le vers 10 : « C’en est fait. Vous voulez que je parte » peut être conçu comme étant la transition entre une tension totale et une première forme d’union. L’étude de la versification nous permet de constater que les reprises de paroles et les rimes, qu’elles engendrent, sont les moyens qui permettent à Titus de faire parler Bérénice et d’essayer d’étayer sa décision par des arguments affectifs :
« Non, je n’ai rien promis. Moi, que je vous haïsse !
Que je puisse jamais oublier Bérénice. »
Ici d’ailleurs, la reprise du « haïr » : « haïr / haïsse » avec la rime impossible de « haïsse / Bérénice » ont pour fonction d’unifier les deux amants, ce qui permet néanmoins à Titus de s’exprimer.
Enfin, le nombre affligeant d’interrogations posées par Bérénice, nous amèneront à voir une femme en colère, hors d’elle mais surtout indignée. Elle ne s’attend à aucune réponse, elle veut seulement fuir cette Rome qui lui afflige ce triste sort. En ce qui concerne Titus, nous garderons l’image d’un homme abattu d’une part, et révolté de l’autre, face à l’injustice qui lui est faite :
« Ô ciel, que vous êtes injuste ! »
[Transition]
Qui est qui ? Entre « orgueilleux » et « cruel » à qui des deux personnages pouvons- nous attribuer ces adjectifs ? Dépit et incompréhension, l’extrait de la scène 5 de l’acte V, renferme une certaine notion de « tragique » que l’on relèvera dans ce qui suit.
[3è axe : impossible depart
« L’honneur c’est comme la virginité, ça ne sert qu’une fois » (Georges Clemenceau). C’est cet honneur qu’à préférer sauver Titus à la place d’un pur amour, ce qui provoque une déception amoureuse des deux cotés (Titus et Bérénice). Abattu par cette décision, Titus est perdu tandis que la reine tente de le fuir indignée. D’ailleurs, elle ne cesse de dire « je pars » :
« 1- Je veux partir (v.2)
2- Et moi, j’ai résolu de partir tout à l’heure. (v. 11)
3- Et, je pars
4- Allons, Phénice (v.26)
5- Je pars (v.46) »
Ainsi, la reine affirme à cinq reprises qu’elle s’en va retrouver son pays natal, ses racines mais sans pour autant se déplacer. Elle ne fait que parler, elle insiste sur son désir de quitter les lieux, mais qu’importe, le déplacement (mouvement) reste impossible. La scène est immobile, aucun des deux personnages ne bougent, nous pouvons même imaginer des regards perdus, fuyant tout en se cherchant, ce qui est typique à la « maladie d’amour » dont on ne connaît pas le remède ! « Plaisir d’amour ne dure qu’un moment
Chagrin d’amour dure toute la vie » (Florian, Célestin)
Les deux amants sont touchés dans le plus profond de leur amour propre : se sentant trahit, Bérénice ne voit de ses appartements, soigneusement décorés par Titus « de festons où les noms des deux amants sont enlacés l’un dans l’autre », qu’un lieu de souffrance :
« Je ne vois rien ici dont je ne sois blessée.
Tout cet appartement préparé par vos soins,
Ces lieux, de mon amour si longtemps les témoins,
Qui semblaient pour jamais me répondre du vôtre,
Ces festons, où nos noms enlacés l’un dans l’autre,
A mes tristes regards viennent partout s’offrir,
Sont autant d’imposteurs que je ne puis souffrir »
L’antithèse « Vous m’aimez, vous me le soutenez
Et cependant je pars, et vous me l’ordonnez ! »,
marque le retournement d’un mouvement volontaire « Je veux partir » en une obligation « Vous me le soutenez ». A vrai dire, le tragique de l’extrait de la scène 5, de l’acte dont j’ai fait le commentaire, tient au fait que Bérénice veuille fuir Titus, après l’avoir tant réclamer précédemment, sans pour autant pouvoir quitter les lieux. Concernant Titus, le tragique est marqué par l’écartèlement entre la simple position de citoyen et celle d’empereur romain qui l’oblige à choisir entre le trône et l’âme de Bérénice.
[Conclusion]
En définitive, la problématique réside dans le fait que Bérénice, renvoyée, doit prendre elle- même la décision de partir. Ainsi, les deux amants sacrifient leur amour « malgré lui et malgré elle » comme l’a traduit Racine dans sa préface. Titus a misé pour l’Etat, comme qui dirait « l’amour n’est qu’un plaisir, l’honneur et un devoir » (Corneille, Le Cid). En dernier lieu, cette scène laisse deux êtres brisés, des promesse de bonheur étouffées, une séparation irrévocable et une absence éternelle : « L’amour qui naît subitement, est le plus lent
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