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Contrat administratif et loyauté

Par   •  5 Juillet 2018  •  1 691 Mots (7 Pages)  •  701 Vues

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qui rend les possibilités de nullité de ces derniers fort importants. En effet, tous les moyens ayant trait à la nullité du contrat sont d’ordre public, ce qui conduit, le cas échéant, à bouleverser les conclusions mêmes des parties. Le contrat peut être mis à néant, alors même qu’aucune des parties ne l’a initialement recherché.

Bien plus, le juge du contrat, saisi par les parties, n’était pas pleinement en mesure d’apprécier et, le cas échéant, d’infléchir les conséquences d’une irrégularité sur la validité du contrat. Il ne pouvait en particulier pas proportionner les effets de sa propre décision à la gravité de cette irrégularité et aux risques d’atteinte à l’intérêt général. Dès lors, non seulement le juge du contrat saisi par les parties apparaissait moins bien équipé que ce même juge saisi par les tiers, mais la spécificité de son office, qui l’invite à veiller à la loyauté des relations contractuelles, était en grande partie méconnue.

Pour stopper ces risques multiples, croissants et excessifs d’insécurité juridique, l’office du juge du contrat a progressivement été refondé.

II. La notion de loyauté épanouie : le juge du contrat, un vrai juge de plein contentieux

L’office du juge s’est petit à petit étendu grâce à de nouveaux outils (A) afin de préserver efficacement la stabilité des relations contractuelles (B). Autrement dit, le principe de loyauté des relations contractuelles.

A. L’évolution des pouvoirs du juge

Pendant très longtemps, le juge du contrat administratif était prisonnier d’une alternative : soit le contrat était légal et il fallait dès lors se placer sur le terrain contractuel ; soit il existait une illégalité, ce qui le conduisait inéluctablement à constater la nullité de l’engagement contractuel ou à régler le litige sur le terrain extracontractuel. Le juge du contrat était donc un juge de la légalité objective, légalité dont toute méconnaissance devait être sanctionnée par la disparition rétroactive du contrat. Cela a, notamment, été affirmé par le Conseil d’Etat, dans un avis « Préfet de la Côte-d’Or » du 10 juin 1996.

Néanmoins et depuis quelques années, l’office du juge du contrat tend à se redessiner. Une première pierre a ainsi été posée en 2007 par l’arrêt d’Assemblée du Conseil d’Etat « Société Tropic Travaux Signalisation ». Désormais, il est possible pour les candidats évincés de la conclusion du contrat d’agir. Ensuite, la jurisprudence Tropic a été élargie par l’arrêt du Conseil d’Etat de 2014, « Département de Tarn et Garonne », le recours contre un contrat étant ainsi ouvert à tout tiers qui y a intérêt.

En complément de cette voie nouvelle les autorisant à contester, on trouve aussi des recours d’urgence. Les concurrents évincés peuvent contester, avant la signature d’un contrat, l’irrégularité de la procédure de passation, en saisissant en urgence le juge du référé précontractuel, issu de la loi du 4 janvier 1992. Une fois le contrat signé, ils peuvent encore saisir le juge du référé contractuel, issu de la directive du 11 décembre 2007. Ce dernier ne prononce alors « la nullité du contrat » que dans des cas restreints et prévu par le code de justice administrative, notamment en cas d’absence totale de mesures de publicité lorsqu’elles sont requises ou encore en cas de signature du contrat avant l’expiration du délai.

B. La consécration des pouvoirs du juge et de la notion de loyauté avec les arrêts « Commune de Béziers »

Les trois arrêts « Commune de Béziers » sont une saga jurisprudentielle étalée sur six années. Cette saga a permis à l’exigence de loyauté dans les relations contractuelles de faire irruption dans le droit des contrats administratifs.

C’est ainsi que le premier arrêt « Commune de Béziers », rendu par l’Assemblée du Conseil d’Etat en 2009, cristallise cette évolution et procède à une très nette redéfinition des pouvoirs du juge du contrat. Le Conseil d’État admet que les parties à un contrat administratif peuvent invoquer devant sa juridiction la violation de l’obligation de loyauté.

Ensuite, le deuxième arrêt « Commune de Béziers » rendu par la Section du contentieux du Conseil d’Etat en 2011 opère un revirement de jurisprudence permettant aux parties de contester la décision de résiliation d’un contrat administratif (et recevoir des dommages et intérêts) et au juge de demander la reprise des relations contractuelles. Par conséquent, la marge décisionnelle de l’Administration est restreinte, comme on peut le voir dans l’arrêt du Conseil d’Etat de 2014, « Société Grenke Location » mais aussi dans l’arrêt du Conseil d’Etat de 2015, « Commune de Béziers ». Pour le moment, cet arrêt vient terminer la saga « Commune de Béziers » en posant des limites à la résiliation pour motif d’intérêt général dans les contrats entre personnes publiques, la rendant exceptionnelle. Par conséquent, les motifs justifiant la résiliation légale du contrat sont le bouleversement économique du contrat et la disparition de la cause.

Cette exigence de loyauté semble alors découler d’une obligation générale de bonne foi contractuelle, qui n’était pas jusqu’à lors, directement invocable dans le contentieux administratif. Le CE s’approprie, par conséquent, cette notion de nature privatiste et l’applique au domaine administratif. Ce faisant, il replace le contrat administratif “au coeur du contentieux contractuel alors qu’il était auparavant focalisé sur le respect de la légalité”.

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