Les conditions générales d’accès à la profession de commercial
Par Raze • 26 Mars 2018 • 25 284 Mots (102 Pages) • 606 Vues
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- La protection du patrimoine
Le patrimoine peut être défini comme un ensemble de droits et d’obligations qui forment une universalité juridique. Le droit français admet traditionnellement depuis une théorie célèbre du XIXe siècle qui est la théorie d’Aubry et Rau : il s’agit de la théorie de l’unité du patrimoine. Cela signifie qu’une personne ne peut avoir qu’un seul patrimoine. A chaque patrimoine correspond donc nécessairement à une seule personne.
L’article 2285 du Code civil dispose que « Les biens du débiteur sont le gages commun de ces créanciers. Le prix s’en distribue entre eux par contribution à moins qu’il n’y ait entre les créanciers des causes légitimes de préférence ». Cela signifie que tout le patrimoine d’un débiteur peut être appréhendé par ses créanciers et permettre donc leur paiement. Le paiement des créanciers est donc garanti par l’ensemble du patrimoine de leur débiteur. Appliqué à un commerçant, personne physique, si celui-ci connait des difficultés financières dans le cadre de son activité commerciale, ses créanciers, professionnels, pourront saisir l’ensemble de ses biens, l’ensemble de son patrimoine pour se faire payer, y compris les biens qui servent à sa famille (résidence principale à condition qu’il en soit propriétaire).
Différentes techniques ont été créées par la loi pour tenter de protéger certains biens du commerçant. Parmi ces techniques, on retrouve :
- L’entrepreneur individuel à responsabilité limitée (1)
- La création d’une société (2)
- La déclaration d’insaisissabilité (3)
- L’entrepreneur individuel à responsabilité limitée (EIRL)
Lorsqu’on commence une activité commerciale, le minimum est de s’organiser et d’essayer de mettre à l’abri certains de ces biens en utilisant ce recours. L’EIRL a été créé par la loi du 15 juin 2010 et marque une exception flagrante au principe d’unité du patrimoine. L’EIRL est régi par le Code de commerce et on retrouve sa définition dans son article L.526-6 alinéa 1er qui dispose que « Tout entrepreneur individuel peut affecter à son activité professionnelle un patrimoine séparé de son patrimoine personnelle sans création d’une personne morale ». Par cet article, une personne physique qui a une activité professionnelle peut avoir plusieurs patrimoines :
- Un patrimoine personnel qui va regrouper les biens qui servent à sa vie non professionnelle
- Un ou plusieurs patrimoines professionnels, chaque patrimoine étant affecté à une activité professionnelle
Dans l’article L.526-6 alinéa 2 dispose que « Ce patrimoine est composé de l’ensemble des biens, droits, obligations et sûretés, dont l’entrepreneur individuel est titulaire, nécessaire à l’exercice de son activité professionnelle. Il peut comprendre également les biens, droits, obligations et sûretés, dont l’entrepreneur est titulaire, utilisés pour l’exercice de son activité professionnel et qu’il décide d’y affecter. Un même bien, droit, obligation ou sûreté ne peut entrer dans la composition que d’un seul patrimoine affecté ». On distingue ici deux catégories de biens, droits, obligations ou sûretés qui peuvent faire partie du patrimoine professionnel :
- Les biens nécessaires : ceux qui sont indispensables au fond de commerce. Ce sont des biens professionnels par nature.
- Les biens utilisés : ce sont des biens professionnels par destination et c’est donc là la volonté de l’entrepreneur qui est prépondérante. C’est donc l’entrepreneur qui décidera quels biens utiles doit faire partie du patrimoine affecté à l’activité professionnelle.
L’article L.526-7 du Code de commerce précise que pour créer ce patrimoine affecté à l’activité professionnelle, il faut faire une déclaration aux greffes chargées de tenir le registre du commerce et des sociétés, ou bien faire une déclaration qui sera inscrite au répertoire des métiers (pour les artisans), ou bien faire une déclaration qui sera mentionnée dans un registre spécial tenu aux greffes du tribunal qui statue en matière commerciale du principal établissement de l’entrepreneur lorsque celui-ci n’est pas immatriculé ni au registre des sociétés, ni au répertoire des métiers. Ce registre spécial concerne par exemple un professionnel indépendant (consultant). Les agriculteurs, eux, puisqu’ils peuvent aussi recourir à cette institution de l’EIRL, doivent faire leur déclaration auprès de la Chambre d’agriculture. Le registre spécial dont la loi fait mention a été créé par un décret du 29 décembre 2010 et on appelle le registre spécial le registre spécial des entrepreneurs à responsabilité limitée. Il est régi dans la partie réglementaire du Code de commerce aux articles R.526-15 et suivants du Code de commerce.
A propos de cette déclaration d’affectation, on peut préciser qu’elle ne vaut pas, en principe, pour les créanciers antérieurs à la déclaration. La déclaration d’affectation ne produira ses effets qu’à l’égard des créanciers postérieurs à la déclaration. Si elle avait produit ses effets à l’égard des créanciers antérieurs, il y aurait eu une atteinte portée à l’économie des conventions légalement formées. Le principe est que la déclaration ne vaut pas à l’encontre des créanciers antérieurs à celle-ci. Donc, l’article L.526-12 alinéa 1er du Code de commerce dispose : « La déclaration d’affectation est opposable de plein droit aux créanciers dont les droits sont nés postérieurement à son dépôt ».
L’article L.526-12 alinéa 2 du Code de commerce vient poser une exception : « Elle est opposable aux créanciers dont les droits sont nés antérieurement à son dépôt à la condition que l’entrepreneur individuel à responsabilité limitée le mentionne dans la déclaration d’affectation et en informe les créanciers dans les conditions fixées par voie réglementaire ». Ces conditions figurent à l’article R.526-12 alinéa 2 du Code de commerce qui précise que « L’information en question est donnée à chacun des ces créanciers personnellement par lettre recommandée avec accusé de réception dans le mois qui suit le dépôt de la déclaration ». Ensuite, les créanciers dont les droits sont nés avant la déclaration peuvent s’opposer à ce que la déclaration produise des effets à leur
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