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Droit pénal général, introducation générale

Par   •  23 Septembre 2018  •  33 537 Mots (135 Pages)  •  313 Vues

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Les questions de l’époque se posent encore aujourd’hui et les conceptions s’opposent toujours. Après que le droit pénal se soit émancipé, le système présentait un certain nombre de problèmes. Le droit pénal de l’Ancien régime est d’abord caractérisé par une immensité de textes, et donc par une très grande inégalité. D’une part car selon la région, les hommes ne sont pas soumis aux mêmes lois. Il y a des coutumes dont la plupart ont été rédigées. En 1670, sous Louis XIV, est adoptée une ordonnance qui pose une procédure unique, mais les infractions ne sont pas les mêmes selon le lieu. D’autre part, suivant le statut, suivant l’ordre social, les hommes ne sont pas soumis aux mêmes règles. En particulier, les nobles bénéficiaient d’un privilège de juridictions et étaient soumis à des juridictions plus favorables. Il y avait également un problème d’arbitraire. La justice pénale d’Ancien régime est arbitraire en ce sens que c’est le juge qui décide comme il souhaite de la sanction infligée à la personne. Ce n’est pas prévu par la loi ou la coutume. Ce droit pénal a aussi un caractère très désorganisé. C’est un système très complexe avec plein de juridictions dépendant du roi, des seigneurs ou des nobles. Le système est arbitraire et la justice est très violente : la plupart des peines sont corporelles, et souvent publiques (démembrement, écartèlement, peine de mort). Par ailleurs, la justice pénale est arbitraire et illégale mais ne fonctionne pas car la criminalité est importante (de nombreux cadavres sont ramassés dans la Seine chaque jour). De là arrive un mouvement réformateur de la justice pénale qui naît au XVIIIème siècle au moment du mouvement des Lumières, dans la continuité du mouvement humaniste des XVème et XVIème siècles. Au titre de ce mouvement réformateur européen et pas seulement français, on peut citer Cesare Beccaria qui publie en 1762 le Traité des délits et des peines, dans lequel il propose un certain nombre de grands principes et règles inspirés par la raison et qui protègent les libertés. Il a un succès considérable, traduit dans de multiples langues et popularisé par Voltaire. Dans ce texte sont développées des idées réformatrices. C’est dans ce cadre que se formera un nouveau système pénal révolutionnaire. Dans les cahiers de doléance, dans l’année qui précède la Révolution, Louis XVI réunit les États généraux pour mettre fin à la crise sociale. La deuxième chose la plus critiquée, après l’impôt considéré injuste et inéquitable, est la justice pénale, aussi injuste. Ce projet pénal n’est pas encore totalement accepté aujourd’hui, ce qui explique le fait de l’instabilité de la loi pénale et ses nombreuses réformes.

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La rupture du droit pénal révolutionnaire : le droit à la sûreté

En 1789, il y a la volonté de construire un droit pénal cohérent qui veut agir en opposition concrète contre le droit pénal d’Ancien régime. Dans la DDHC de 1789, au moins la moitié des articles concerne le droit pénal. L’idée de sûreté est très importante car ce concept est aujourd’hui très largement inconnu ou est mal interprété. La sûreté n’est pas la sécurité. Grâce à l’exercice de la répression et de l’efficacité des pouvoirs de police, on pourrait mettre en place la sécurité. Aujourd’hui, plus de 13 000 comportements sont des infractions. Dans les situations de conflit, d’opposition, qui sont inhérentes à la vie sociale, on garantit la primauté de la loi et non pas la sûreté. Promettre la sûreté selon les révolutionnaires, c’est promettre la protection de la loi aux individus dans n’importe quelle situation. Pour les révolutionnaires, plus on a de responsabilités plus on est soumis à une exigence d’exemplarité, à l’inverse de la situation d’Ancien régime. La sûreté va fonder le nouveau régime. Elle se traduit par un certain nombre de principes proclamés dans la DDHC, qui ont une valeur constitutionnelle et qui sont reconnus au niveau européen, notamment par la CEDH.

Le premier principe primordial est la légalité : on ne peut prendre de mesures coercitives à l’égard de quelqu’un, qui le privent de sa liberté, que si cela est présent dans un texte légal, et on ne peut appliquer de sanctions envers autrui que si elles étaient prévues avant l’acte. Le deuxième principe est celui de nécessité. Dans une société démocratique où la liberté est le principe (choix politique majeur dans la Révolution), tout ce qui n’est pas réprimé est permis. Avec ce principe, on ne limite la liberté que si cela est nécessaire pour préserver la cohésion sociale. On ne doit incriminer que les actes qui sont dangereux (cf. art. 8 DDHC). Le législateur ne peut pas incriminer tout et n’importe quoi, il doit démontrer que le comportement est nuisible à l’intérêt général et que l’on est obligé de passer par la banalisation pour empêcher ce comportement avant de l’incriminer. Le troisième principe est la proportionnalité : lorsqu’on déclenche une procédure pénale contre quelqu’un, on doit utiliser le minimum de coercition. Par exemple, on ne peut en principe placer quelqu’un en garde à vue que si cette mesure est absolument indispensable à la protection des investigations et à la préservation de la cohésion sociale. Lorsqu’on déclare quelqu’un coupable, il en est de même : on doit prononcer la sanction la plus proportionnée par rapport à l’infraction commise. Ceci prend le contrepied de ce qui était le cas sous l’Ancien régime, où les peines étaient disproportionnées et démesurées (cf. Michel Foucault, Surveiller et punir). Il faut donc des sanctions mesurées, pondérées. Le dernier principe est celui de la juridictionnalité ou de contrôle juridictionnel : pour assurer l’effectivité de ces principes, on va soumettre le contrôle du litige à quelqu’un d’extérieur, soit le juge, pour assurer la protection des droits et libertés.

Ce modèle pénal des Lumières est donc centré sur ces quatre grands principes fondamentaux, qui prennent le contrepied total de ce qui était pratiqué sous l’Ancien régime. De plus, la répression doit aussi favoriser l’amendement de la personne. En ce sens, certains auteurs ont parlé d’un « humanisme pénal ». Cette idée centrale d’amendement permet la réhabilitation. Ceci rejoint l’idée de sûreté : on profite de la protection de la loi même si on a purgé une peine.

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Une mise en œuvre précaire

Les lois de procédure des 22 juillet et 19 septembre 1791 adoptent

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