Contentieux constitutionnel (exposé)
Par Junecooper • 27 Mars 2018 • 2 816 Mots (12 Pages) • 492 Vues
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Toutefois, il important de relever que cette protection du droit au respect la vie privée était essentiellement restreinte aux seules atteintes publiques. En effet, le droit au respect de la vie privée, n’est pas contenu dans la Constitution française du 4 octobre 1958. D’ailleurs, il n’est aucunement mentionné un pareil droit dans le bloc de constitutionnalité avant la décision n° 94-352 DC du 18 janvier 1995, vidéosurveillance. Or, le juge constitutionnel est incompétent au delà des normes de références. D’ou cette limitation de protection aux seules atteintes publiques portées au droit à la vie privée par le mécanisme du contrôle de constitutionnalité des lois. Cette incompétence du juge constitutionnel se justifie par le fait que pendant longtemps, c’est le juge ordinaire qui a l’exclusif rôle de protection de la vie privée conformément aux dispositions de l’article 9 du Code civil. Cette disposition indique que les juges peuvent prendre des mesures pour faire cesser toute atteinte à « l’intimité de la vie privée ». Néanmoins, il est apparu que le juge constitutionnel pouvait également être attentif aux ingérences dans la vie privée qui pouvaient être le fait de personnes privées.
- Une protection élargie aux atteintes d’ordre publiques et privées à l’avenir
Assurer l’exercice des libertés publiques impose un certain nombre de contraintes à l’Etat. Dès lors, en tant qu’un sujet de droit, l’administration doit, d’une part, respecter les droits reconnus aux citoyens par le législateur, et, d’autre part, s’assurer éventuellement qu’aucune personne privée ne porte atteinte à ces droits. Cela ne signifie pas pour autant que les pouvoirs publics sont les seuls à devoir se préoccuper de l’effectivité des droits qu’ils reconnaissent. Au contraire, les titulaires de ces droits doivent être en mesure de pouvoir exiger eux-mêmes que leurs droits sont respectés.
En effet, les progrès techniques survenus depuis une vingtaine d’années dans le secteur des communications ont bouleversé les enjeux de la protection des personnes au travers de leur vie privée. Les méthodes de surveillance des individus sont toujours plus perfectionnées, et les interceptions de communications ou la vidéosurveillance peuvent être pratiquées aisément, pour un coût de moins en moins onéreux. De même, le développement de l'informatique autorise l’intégration et la centralisation, dans un seul fichier, d’informations confidentielles privées. Ce recoupement des données permet de connaître parfaitement les individus, parfois mieux qu’ils ne se connaissent eux-mêmes, et porte ainsi gravement atteinte à leur vie privée.
Se prononçant dans sa décision vidéosurveillance II[19] sur une disposition permettant la transmission aux services de police et de gendarmerie d’images captées par des systèmes de vidéosurveillance installés dans des lieux privés tels que les parties communes d’immeubles, le juge constitutionnel a estimé que le législateur n’avait pas prévu les garanties nécessaires au respect de la vie privée et a déclaré la disposition inconstitutionnelle. La particularité du dispositif résidait en ce que la transmission des images relevait de la seule initiative des propriétaires ou exploitants d’immeubles collectifs d’habitation ou de leurs représentants. Elle devait s’effectuer en temps réel et être strictement limitée au temps nécessaire à l’intervention des services de police ou de gendarmerie nationales ou, le cas échéant, des agents de la police municipale.
Il faut également noter que le juge constitutionnel s’est prononcé sur les conséquences qui pourraient résulter dans les relations privées de l’application de certains dispositifs publics et notamment sur les risques d’atteintes privées indirectes au sujet du pacte civil de solidarité[20]. Ainsi, « Après avoir rappelé les finalités de l’enregistrement et précisé que celui-ci n’avait pas pour objet de révéler les préférences sexuelles des pacsés, le Conseil constitutionnel a pris soin de formuler une réserve relative aux conditions dans lesquelles seraient traitées, conservées et rendues accessibles aux tiers les informations relatives au pacte civil de solidarité »[21]. De même, l'utilisation d’éléments relatifs à la vie privée, telles que les origines raciales, les mœurs, les opinions politiques, philosophiques et religieuses, ou les appartenances syndicales, emporte en effet des risques considérables « dans la mesure où elle met en jeu d'autres droits fondamentaux: la liberté d'opinion, la liberté de conscience, ou l'interdiction de toute discrimination en raison de ces caractères ». Suivant ce raisonnement, ces éléments doivent donc jouir d'une protection exceptionnelle afin que les autres droits, eux aussi inhérents à chaque citoyen, puissent être exercés normalement.
Toutefois, il reste que quelles que soient la nature et la finalité des fichiers, le Conseil constitutionnel a conditionné la constitutionnalité des lois autorisant leur création au respect d’un ensemble de garanties communes. En effet, le juge constitutionnel a retenu que « la collecte, l’enregistrement, la conservation, la consultation et la communication de données à caractère personnel doivent être justifiés par un motif d’intérêt général et mis en œuvre de manière adéquate et proportionnée à cet objectif[22] ».
- L’inconstance de la base juridique de protection du droit au respect de la vie privée
La valeur constitutionnelle du droit au respect de la vie privée a pendant longtemps suscité de vive controverse en droit français. Hormis l’inviolabilité du domicile qui bénéficiait d’une protection systématique du juge constitutionnel, il aura fallu la décision du 18 janvier 1995 pour que le Conseil constitutionnel se réfère expressément au droit à la vie privé. Ce droit fondamental a connu, au gré des décisions du juge constitutionnel, des variations sémantiques, des changements de consistance et des migrations normatives sans que l’ensemble de ces évolutions ne se soient traduites par des modifications significatives de son champ d’application, de sa portée et de son degré de protection[23]. Avant de fonder définitivement ses décisions sur les dispositions de l’article 2 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 (B), le Conseil constitutionnel s’est précédemment contenté de faire une lecture extensive des « libertés individuelles » et des « libertés personnelles » (A).
- De la conception extensive
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