La politique keynésienne a-t-elle un avenir ?
Par Raze • 19 Août 2018 • 3 433 Mots (14 Pages) • 492 Vues
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Keynes observe donc une dérégulation de l’économie ainsi qu’une insuffisance de demande et souhaite ainsi l’intervention de l’État afin de lisser la consommation des ménages. Mais ses idées vont par la suite être remises en cause.
Malgré le succès de cette théorie durant les années 1930 et post-guerre, elle est fortement repoussée par les politiques à partir de la fin des années 1970 et bien avant par certains économistes tel que Milton Friedman.
Les années 1970 sont un tournant puisque suite à la crise pétrolière, pour la première fois dans l’histoire économique moderne vont coexister chômage et inflation. Malheureusement, c’est une situation que Keynes n’avait pas prévue. L’existence de ces phénomènes en même moment s’explique du fait que l’inflation qui apparaît en 1973, n’est pas une inflation due à une demande agrégée excessive, mais une inflation due aux coûts. Les prix montent parce que le prix de l’énergie et du pétrole monte, le prix du baril est passé de $2 à $35. Donc malgré un manque de demande et un contexte de crise économique et donc de chômage, les prix ont continué de monter amenant l’inflation à coexister avec le chômage. L’inflation de demande s’est transformée en une inflation des coûts et Keynes ne donne pas de réponse sur comment combattre une inflation des coûts. Dès lors, les politiques, à l’image de Margaret Thatcher ou de Ronald Reagan, se tournent vers le libéralisme, créant une vague de néo-libéralisme pour retrouver de la croissance. Cependant, il ne faut pas oublier que cette décision est aussi motivée par le contexte de guerre froide, donc d’une lutte entre la démocratie et le libéralisme contre le communisme et l’économie planifiée. Le libéralisme souhaite que l’État intervienne au minimum et que seul les taux d’intérêts soient contrôlés. Sinon, il faut laisser le marché s’autorégulé et atteindre le Pareto-optimal. Il y a une volonté de s’intéresser bien plus à la microéconomie pour former une théorie macroéconomique contrairement à Keynes qui se concentre seulement sur une vue globale pour analyser l’économie et régler ses défis.
Un économiste qui a fortement combattu les idées de Keynes et dont les idées ont été ensuite reprises par les décideurs politiques est Milton Friedman. En effet, tout d’abord, il critique le multiplicateur keynésien car l'effet positif du multiplicateur keynésien repose sur des vagues d'augmentation successives de la consommation provoquées par une hausse de revenu initiale. Au cœur de ce mécanisme se situe la propension marginale à consommer, considérée par Keynes comme étant stable. Ainsi les agents réagissent-ils toujours favorablement, en matière de dépense, à une élévation de leur revenu courant. C'est cette stabilité et cette sensibilité induite que Friedman va remettre en cause. Il observe que les agents ont une sensibilité faible et imprévisible à un accroissement de leur revenu courant. Son hypothèse de revenu permanent tente d'expliquer ce résultat. Le revenu permanent désigne le revenu que l'individu s'attend à recevoir pendant les années à venir, compte tenu de ses revenus passés. Les ménages vont alors adapter leur niveau de consommation non pas au revenu courant, comme le pensait Keynes, mais au revenu permanent. Ce qui fait que même si leur revenu courant augmente ou baisse, les agents conservent un volume de dépenses stable dans le temps. Le multiplicateur keynésien en ressort considérablement fragilisé puisque son moteur s'avère, selon Friedman, non seulement poussif mais aussi chaotique. La politique budgétaire est donc inopérante, et même susceptible de déstabiliser l'économie en créant de l’inflation par la création monétaire. De plus, Friedman rappelle la lenteur des prises de décision des hommes et femmes politiques face aux crises, qui ne fait qu’empirer la situation. Sans oublier la critique monétariste qui affirme que l'arme monétaire ne produit un effet positif sur l'emploi qu'à court terme. Dès le moyen terme, le niveau de chômage antérieur réapparaît, accompagné cependant d'un taux d'inflation supérieur à celui de l'ancienne situation. Ainsi, la politique monétaire expansionniste s'avère inefficace et même nuisible. Sa démonstration s'articule autour de la notion d'anticipations adaptatives. Adaptatives car les agents anticipent en se basant sur les données du passé, en s'y adaptant. Si le taux d'inflation des années précédentes a été, en moyenne, de 3%, ils prévoiront pour l'année à venir une hausse des prix d'environ 3%. Les autorités publiques vont alors pouvoir profiter de ce regard tourné vers le passé et non vers le présent, pour tenter de relancer l'économie à l'aide d'une politique monétaire expansionniste. Par exemple, le taux d'inflation anticipé pour l'année en cours s'élève à 3%. La politique monétaire, en accroissant l'offre de monnaie, génère en réalité une inflation de 5%. Dans ce cas, ce peu d’inflation permet d’obtenir à court terme, une progression de l’emploi, le recul du chômage et l’augmentation de la production. Il y a une légère relance de l’activité économique. Mais à court terme seulement car les agents vont s'apercevoir au bout d'un moment, qu'ils se sont faits berner dans la mesure où ils s’aperçoivent que l’inflation générée par cette politique monétaire expansionniste annule l’augmentation des salaires nominaux et que leur salaire réel reste inchangé. Du côté des entreprises, les entrepreneurs vont réaliser que cette évolution ne leur a rien apporté de favorable, et même au contraire, cela augmente les coûts de production. Dès lors, le salaire nominal va être revu à la baisse par les employeurs afin de compenser les effets de l’inflation sur les coûts. Les salariés attirés par les perspectives d’un meilleur pouvoir d’achat du salaire, déchantent maintenant, et se retirent du marché du travail. Au total, le taux de chômage revient à son niveau initial mais avec un taux d’inflation désormais de 5%. Le seul moyen pour les autorités de faire reculer le chômage durant la prochaine période est de surprendre encore les agents qui anticiperont selon la logique adaptative une inflation d'environ 4%. Le taux d'inflation réel devra donc lui être sensiblement supérieur (au moins 6%). Mais comme précédemment, les résultats en matière d'emploi observés à court terme s'évanouissent dès le moyen terme, laissant derrière eux une inflation toujours plus forte. Friedman compare alors l'effet de l'inflation à celui de la morphine
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