La juridiction administrative doit-elle être supprimé ?
Par Raze • 3 Décembre 2018 • 2 024 Mots (9 Pages) • 677 Vues
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juridictions peut induire en erreur le justiciable et représenter pour lui une source de complexité. De cela peut naitre alors un ralentissement des procédures.
Au travers de questions préjudicielles posées par le judiciaire à l’administratif les chiffres viennent à nuancer cette critique, en effet alors que des millions de décisions de justice ont lieu tous les ans, le tribunal des conflits n’est saisi qu’une cinquantaine de fois.
Ces critiques sont donc clairement à relativiser et n’ont qu’une portée limitée sur la juridiction administrative. Cependant, il existe deux limites auxquelles elle est confrontée.
b. Deux limites imparfaitement traitées
S’il fallait trouver à la juridiction administrative une limite première, elle serait alors dans l’office du juge administratif. Son arrêt du 6 novembre 1936 « Arrighi », le conseil d’Etat se refuse de contrôler un acte administratif au regard de la constitution car une loi existait entre les deux. On parle alors de « loi-écran », le juge administratif ne contrôle pas la constitutionnalité d’un acte administratif si il est pris en application d’une loi. Ce refus peut sembler justifié car il serait alors indirectement jugé constitutionnel. Le mécanisme de la question prioritaire de constitutionnalité apparu le 1er mars 2010 a heureusement permis de combler en casi-totalité cette lacune. Depuis sa création, en trois ans le conseil d’Etat a alors renvoyé 165 questions prioritaires de constitutionnalité.
La deuxième limite à laquelle s’est confrontée la juridiction administrative est la conciliation entre droit européen et droit national. La prise en compte du droit européen était insuffisante. Le conseil d’Etat a du par une série d’arrêts intégrer ce droit européen au droit national comme ce fût le cas lors des arrêts du 8 février 2007 « Arcelor Atlantique », « Goroledieu ». Par ses arrêts le conseils d’Etat a montré une fois de plus son adaptabilité quant à ses limites. Ses affaires comme le cas Vincent Lambert a également montré la coopération entre les juridictions administratives et la Cours Européenne des Droit de l’Homme, respectant la décision en conformité avec le droit national.
La juridiction administrative a donc su concilier les critiques et les limites qu’elle a rencontré pour se construire et subsister jusqu’à nos jours, dans cette évolution elle a su se montrer indispensable sur deux aspects : les libertés fondamentales et l’Etat de droit.
II. La juridiction administrative, protectrice essentielle des libertés fondamentales et garante de l’état de droit
Elément déterminant dans sa construction, le conseil d’état a fondé se plus grande compétence sur la protection de l’administré. Cette protection s’avère être au fur et à mesure des jurisprudences relatives aux libertés fondamentales.
a. Les libertés fondamentales, cheval de bataille de la juridiction administrative
Il y a plus de cent ans, dans son arrêt « Abbé Olivier » le conseil d’Etat a le 19 février 1909 commencé à se poster comme le protecteur des libertés fondamentales. Dans cet arrêt, c’est la liberté de culte qui fût défendue. S’en suivi alors la liberté de réunion en 1933, la liberté de commerce et d’industrie en 1951, la liberté d’association en 1956 ou encore la liberté de la presse en 1960. C’est grâce aux principes fondamentaux reconnus par les lois de la république et des différents mécanismes qu’elle a mis en place que la juridiction a pu se porter comme protectrice de ces libertés. La protection de la vie privée fût également une liberté fondamentale très jurisprudentielle pour le conseil d’Etat que ce soit dans le cadre de la protection des données personnelles (26 octobre 2011), « Association pour la promotion de l’image et autre » ou encore dans l’autonomisation de ces données. Les droits des détenus bénéficient également d’une avancée majeure grâce au conseil d’Etat qui va élargir les voies de recours devant la juridiction administrative par le biais des référents. Des fonctionnaires vont également bénéficier de l’élargissement de ces voies de recours. Finalement le conseil d’Etat va également intervenir sur les questions de droit d’asile et de règle de la libre concurrence.
La juridiction administrative a su donc créer ses propres outils pour assurer les protections des libertés fondamentales, c’est le cas du très large recours pour excès de pouvoir, mais elle a su également approfondir son contrôle continu « normal ». De ces outils elle est devenue un organe essentiel dans la protection des libertés fondamentales, duquel on ne peut plus se séparer de peur de perdre la base jurisprudentielle mise en place.
Plus récemment, c’est lors de l’état d’urgence mis en place suite aux attentats qui ont frappé la France en 2015 et 2016 que la juridiction administrative a su se montrer comme une composante de l’état de droit.
b. Une contribution nécessaire à l’état de droit
Déclenché le 13 novembre 2015, aux attentats de Paris, l’état d’urgence s’est prolongé jusqu’au mois d’octobre dernier. Mesure d’exception, sa durée dans le temps a vivement été critiquée de par les mesures administratives qu’elle permet. C’est dans ce contexte que la juridiction administrative a su se montrer comme un élément à part entière de l’état de droit. Si elle a joué un rôle dans le développement des libertés fondamentales sous l’état d’urgence elle a su montrer sa force de contrôle sur les mesures de polices administratives. Dans le cadre de l’arrêt « Burkini » rendu par le conseil d’état à l’été 2016, le conseil d’état a agi à l’encontre des arrêtés pris par les différentes communes en effectuant un contrôle de proportionnalité avec la notion d’ordre public. Il limite également les pouvoirs de la police et des maires qui ne peuvent alors plus restreindre l’accès à un espace public en raison d’une tenue. La loi sur le renseignement viendra également renforcer le contrôle de la juridiction administrative qui veut alors des conditions spécifiques pour effectuer un contrôle jurisprudentiel de l’activité de renseignement. Par son contrôle exercé sur l’administration, le conseil d’état et plus largement la juridiction, le conseil d’état est plus largement un garant de l’état de droit assurant un contrôle des différentes intensités tel que la proportionnalité comme dans l’affaire Dieudonné ou total dans l’affaire Lambert. Sous cette juridiction, il y aurait
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