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La représentation de la mort au théâtre doit-elle nécessairement avoir une dimension pathétique?

Par   •  17 Avril 2018  •  3 029 Mots (13 Pages)  •  1 299 Vues

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la montrer et pourtant accentuer le pathétique.

1* Quant à la mort naturelle, elle peut être à peine citée et pourtant créer une impression forte sur l’auditoire à travers la mise en scène.

5* Pourtant cette dimension pathétique dans la représentation de la mort n’est pas toujours nécessaire.

3* Au XVIIe siècle, les règles du théâtre classique, dites les règles de bienséance, interdisaient toute représentation de mort sur scène : il était malséant de montrer un corps mort. Comme dans toute tragédie, le dénouement annonce la mort du héros, et celle-ci ne pouvait aucunement être représentée sur scène, car elle pouvait heurter le spectateur. La mort devait donc se dérouler hors scène et être racontée sous forme de récit. Ainsi, Corneille et Racine, auteurs classiques, n’utilisaient que très parcimonieusement le ressort de la mort « pathétique ». Dans Antigone d’Anouilh, écrite pourtant au XXème siècle, la mort de l’héroïne et de son fiancé est décrite par un messager. Cet envoyé nous décrit la mort de ces deux amoureux, il laisse donc le spectateur se représenter leur mort, sans prendre le risque de les choquer.

1*La mort ayant lieu en dehors de la vue du spectateur, n’a pas le caractère « émouvant » et « pathétique » des oeuvres romantiques. L’absence de vision du meurtre ou le récit seul transmettent une charge émotionnelle moins intense que la vision réelle du meurtre. Le spectateur ressent la mort, par le texte, les gestes, les didascalies et pourtant la représentation de la mort n’apparait pas sur scène puisqu’ interdite ; la dimension pathétique s’en trouve amoindrie .

1*Il existe toutefois quelques œuvres du XVIIème siècle où la représentation de la mort a lieu sur scène. Dans Cléopâtre, tragédie classique d’Isaac de Benserade, Marc-Antoine se donne la mort sur scène, face aux spectateurs, par un énorme coup d’épée et une giclée de sang (ce qui choqua Louis XIII). À la fin de la pièce, Cléopâtre boit de l’aspic et meurt à son tour sur scène. De la même manière, Phèdre de Racine se suicide sur scène mais sa mort progressive n’est pas violente. Racine évite de représenter les scènes sanglantes et se « limite » à les faire revivre par le récit. Le spectateur ne voit ni Pyrrhus assassiné dans Andromaque, ni Bajazet étranglé, ni Eriphile immolée dans Iphigénie, ni Britannicus empoisonné.

3* Toutefois, des astuces vont naître et permettre de parler de la mort, de la mettre en scène sans qu’apparaisse nécessairement une dimension pathétique au sens « classique » du terme.

1*Pour toucher encore plus le spectateur, on peut mettre en scène une mort de manière surprenante. Ainsi, la tendance de la tragédie contemporaine a détourné

la dimension pathétique de la représentation de la mort en donnant une dimension comique voire burlesque à la représentation de la mort. La dimension pathétique peut-être une façon de provoquer le rire. Dans L’illusion comique de Corneille, toute la pièce repose sur l’illusion et le principe du théâtre dans le théâtre (mise en abyme). Alcandre se moque d’une certaine manière de la mort. L’auteur fait mourir plusieurs personnages et, au dernier acte, révèle qu’ils sont en vérité tous en vie, et qu’ils n’étaient en fait qu’en train d’interpréter une tragédie. Par la prépondérance du décor et l’illusion, le dramaturge baroque veut semer le doute et faire réfléchir sur la confusion; se dessine alors une réflexion sur le fait que le monde est un théâtre. Dans Hamlet de Shakespeare , le prince fait représenter par des comédiens la scène du meurtre de son père afin de percevoir les réactions des coupables et de confondre les assassins.

1* Les tragédies modernes, font de la mort de leurs personnages, tel Béranger 1er dans Le Roi se Meurt de Ionesco, des personnages « comiques », « burlesques ». Camus, utilise « la mort pathétique »dans Caligula, mais d’une façon différente. Le dramaturge met le « ridicule » en avant: c’est le théâtre de l’absurde. Des situations étranges sont installées et peuvent déranger le spectateur. Dans La Leçon de Ionesco, c’est le fossé de connaissances entre le maitre et l’élève qui finissent par tuer cette dernière.

Le dramaturge peut considérer que le comique et le tragique sont intimement liés et chercher à désamorcer le pathétique. Dans Le Roi se Meurt, d’Eugène Ionesco, la mort du roi Béranger 1er est une scène « absurde », comique par la situation du personnage qui rend sa mort ridicule. Le roi perd son sang-froid, sa dignité en criant à son peuple qu’il va mourir. La situation du personnage provoque le mépris de ses proches et des spectateurs. Le burlesque de la situation du roi est accentué par les champs lexicaux de la mort, du burlesque, du comique et de l’absurde. Le sort de Béranger 1er montre que la mort au théâtre n’a pas nécessairement une dimension pathétique, ni une dimension tragique. En l’occurrence la représentation de la mort du roi se retrouve dans les registres du quasi-comique, du burlesque, voire de l’absurde.

1*Certains auteurs ont fait le choix de faire « cohabiter » la dimension pathétique et le quasi-comique dans la représentation de la mort des personnages. C’est le cas dans Caligula d’Albert Camus. Les dimensions quasi-comique et pathétique cohabitent avec le tragique de la mort de Caligula. Le burlesque prévaut. Mais la mort de Caligula et le désarroi qui l’accompagne engendrent le pathétique. Comme Béranger 1er, la situation de Caligula est comique car, lui aussi se refuse à mourir. La dimension pathétique bien que non dominante se retrouve dans les champs lexicaux des émotions, de la douleur et surtout dans celui de la fatalité. Malgré sa volonté, d’échapper à la mort, Caligula est en quelque sorte condamné d’avance par le destin : « c’est une mort « attendue ».

1* Enfin, en représentant la mort de façon imagée, elle peut devenir plus marquante que si elle était représentée de manière réaliste ; sans avoir recours au pathétique. Le dramaturge peut considérer que le comique constitue un contrepoint à la mort. Dans la mort du héros éponyme Dom Juan de Molière , le personnage de Sganarelle réclamant ses gages après la disparition de Dom Juan neutralise le pathétique. La mort y est masquée. Cette pièce baroque, entre comédie et tragédie mêle les registres tragiques et comiques et fait place au merveilleux. La mort est représentée par la statue du commandant avec un côté fantastique qui la rend bien plus impressionnante.

5* Ces exemples montrent que la représentation de la

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