Droit privé
Par Ninoka • 6 Novembre 2018 • 18 485 Mots (74 Pages) • 364 Vues
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§2 : Le caractère coercitif (contraignant) de la règle de droit
La règle de droit a la particularité d'être sanctionnée par la contrainte. En principe, une règle non-obligatoire n'est pas une règle de droit car elle ne peut pas atteindre son but qui est de réguler les relations sociales.
Dire que la règle de droit est contraignante signifie deux choses :
→ En 1er lieu, cela signifie qu'elle est obligatoire. Il peut y avoir des degrés d'obligation : la règle peut être supplétive (possibilité de l'écarter au profit d'une autre règle par un contrat) ou peut être impérative – ou d'ordre public (aucun choix n'est offert). Même lorsqu'elle est supplétive, la règle est obligatoire car elle doit être appliquée et le non-respect de cette règle sera sanctionné par le juge.
→ En 2nd lieu, elle se traduit par la nécessite d'une sanction étatique (par l’État). C'est l’État qui doit rendre le service public de la justice, c'est aussi son devoir. À ce titre, il doit sanctionner le non-respect de la règle de droit. Cette règle peut être de nature civile. À ce titre, il peut y avoir une sanction. La règle de droit peut aussi être de nature pénale, là aussi l’État devra sanctionner sa violation. La règle de droit peut être civile ou pénale.
Il existe plusieurs types de sanction :
- L'exécution. C'est la première sanction de la règle. L’État va contraindre l'individu à exécuter ses obligations (ex : expulser un locataire de son logement). Il y a aussi l'astreinte. L’État va demander à une personne de payer chaque semaine/mois, à faire quelqu'un chose : plus il attend, plus il paie.
- La sanction réparatrice : elles sont nombreuses en droit. Ça peut être l'annulation d'un acte juridique qui ne respecte pas ses conditions de formation. Quand le contrat ou l'engagement ne respecte pas les conditions, le contrat est annulé. Lorsque l'annulation n'est pas possible, la réparation du dommage causé par la violation de la règle se fera par équivalent par le biais de dommages et intérêts. Il s'agit d'une somme d'argent qui correspond au préjudice subi par un individu.
- La punition : c'est une peine essentielle en matière pénale : les citoyens craignent cette peine. Ils sont donc incités à ne pas enfreindre la règle, c'est une prévention de l'action. Les sanctions pénales sont diverses et elles varient selon la gravité de l'infraction. Il n'y a pas que des peines pénales.
D'autres peines du droit connaissent aussi des sanctions comme le droit du travail (licenciement), le droit civil (privé de succession).
Le caractère coercitif est donc l'aspect le plus original de la règle de droit. Il permet en effet de la distinguer des autres systèmes normatifs. Les règles morales et religieuses ne reçoivent pas de sanction de l’État.
Aujourd'hui, il existe des règles de droit dépourvues de toute sanction. Il s'agit de lois que l'on qualifie comme « imparfaites » car elles ne reçoivent pas de sanction (ex : article 371 du Code Civil « l'enfant doit respect et honneur à ses parents »).
Aujourd'hui se développe le Soft Law (droit souple) qui a le même objet que les règles traditionnelles. Au lieu d'imposer un comportement, le Soft Law suggère un comportement. C'est un substitut à la règle contraignante.
Aujourd'hui toutefois, les règles de droit sont majoritairement contraignantes, la question se pose donc de savoir pourquoi ces règles sont obligatoires, pourquoi ces sujets de droit respectent la règle. Cela conduit à s'interroger sur le fondement du caractère contraignant de la règle de droit.
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Section 2 : Les fondements du caractère coercitif de la règle de droit
§1. L’école spiritualiste ou idéaliste : les théories du droit naturel
Selon la théorie du droit naturel, au-delà du droit positif, il existe un droit idéal vers lequel les règles de droit doivent tendre pour que leur caractère contraignant soit justifié. Cette théorie a deux conséquences : elle implique en 1er lieu que ceux qui édictent la règle doivent chercher à réaliser la justice par cette règle. En 2nd lieu, ceux qui y sont soumis peuvent refuser d'appliquer la règle si elle n'est pas juste. Dans cette théorie, la règle de droit doit être respectée non pas parce que c'est une règle mais parce qu'elle est juste.
L'idée de droit naturel est ancienne. Elle est apparue dans l'Antiquité avec Platon et Aristote (IVe siècle av. J-C). Leur conception est celle d'un droit naturel classique. Selon eux, le droit doit respecter la nature des choses. Au Moyen-âge, le christianisme a fait évoluer cette théorie et pour notamment St-Thomas d'Aquin, la règle de droit doit respecter la loi éternelle révélée par Dieu.
Au XVIIe siècle, Hugo de Groot fonde l'école de la nature et du droit des gens. Sa doctrine est totalement laïque, plus de référence à Dieu. Il recherche le droit naturel à travers l'observation de l'homme et de la nature humaine. Sa méthode conduit à des règles très rigides qui ont dans sa conception une valeur universelle. Ses théories du droit naturel ont été beaucoup critiquées car elles paraissent inexactes. À l'évidence, les hommes n'ont pas tous le même besoin et ces besoins évoluent avec le temps. Ses théories du droit naturel sont par ailleurs jugées inutiles car elles n'ont jamais empêché le législateur d'adopter des textes injustes et qui pourtant se sont imposés aux citoyens. Ses théories ne permettent pas au justiciable d'échapper aux lois injustes. Si le justiciable veut éviter une sanction, il doit respecter la loi même si la juge est injuste.
§2. L’école matérialiste ou positiviste
Pour cette école, il ne convient pas de rechercher si la règle est juste ou injuste car la règle a une valeur en soi en elle-même puisqu'elle assure l'ordre dans la société. Elle doit être respectée pas parce qu'elle est juste mais parce que c'est une règle.
Le positivisme juridique
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