De la suzeraineté à la souveraineté
Par Raze • 8 Novembre 2018 • 2 755 Mots (12 Pages) • 505 Vues
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- Election et hérédité
Dans l’esprit des clercs la fonction royale demeure porteuse d’un idéal d’unité et d’une mission divine : c’est protéger l’Eglise et garantir la concorde entre les hommes. Seulement, les premiers capétiens ne parviennent pas à réaliser cet idéal. En fait, les rois assurent le renforcement de leurs pouvoirs en imposant le principe héréditaire. En fait, l’élection s’est effacée au profit de l’hérédité qui est le fruit d’une tradition associant pouvoir et naissance royale. Finalement, l’élection ne devient plus qu’une simple forme à respecter, une sorte de rite consécutif s’intégrant dans le rite fondamental qu’est le sacre. Le terme d’élection a une double connotation : élu par Dieu, élu par les grands du royaume.
A partir du moment où la situation de la succession s’est avérée un peu délicate, on a redonné à l’élection une dimension essentielle. Toutefois, même durant la période où le pouvoir était éclaté, les capétiens ont réussi à mettre à profit la clarification de la structure féodale pour renforcer leur autorité. Les rois capétiens sont de plus en plus attentifs dans le fait de recevoir de serment et l’hommage, et malgré quelques revers, leur autorité n’est plus contestée au XIIIème siècle.
Section 2 : L’affirmation de la suzeraineté royale
Il existe un grand spécialiste de la suzeraineté à l’époque du roi, c’est Suger. Dans ses écrits tout une série d’éléments dont la portée est plus symbolique que pratique, contribue à légitimer le principe selon lequel au sommet de la pyramide féodaux-vassalique, il ne peut y avoir que le roi.
Paragraphe 1 : Les théories contribuant au renforcement du pouvoir royal
- La mouvance et l’unité du royaume
Les théoriciens royaux mettent l’accent sur l’idée de mouvance, c'est-à-dire les démembrements des terres dont la primauté dans le lien féodaux-vassalique se dégage au XIIème siècle. Il s’organise autour d’un schéma extrêmement logique, en fait, chaque fief est supposé provenir d’un fief plus vaste dont il a été issu lors du démembrement féodal, de sorte que, si on remonte l’histoire du morcellement des tenures, on peut affirmer que les grandes principautés sont supposées être tenues en fief du roi.
On raisonne de la même manière à propos des châtellenies, elles sont supposées être tenues en fief des comtes, dont les comtés sont eux-mêmes supposés être tenus en fief par les ducs et princes. C’est une période de reconstitution du pouvoir qui profite à tous les puissants, à ceux qui ont partagé leur territoire. Cette vision hiérarchique permet de faire renaître l’idée d’un royaume, et progressivement les grands du royaume s’accordent pour faire allégeance au roi, pour lui prêter hommage pour l’ensemble de leurs principautés. Ainsi, ces principautés sont conçues comme un fief mouvant provenant du royaume. Autrement dit, la mouvance implique que toute entité territoriale procède d’une autre plus vaste.
Finalement, l’idée d’un territoire militaire, d’un regum placé sous l’autorité du roi, cette idée redevient consistante alors qu’elle s’était diluée dans le processus de dissémination de l’autorité. A l’époque, la notion de frontières pas la même qu’aujourd’hui. Finalement, l’espace carolingien était devenu une mouvance et à l’époque capétienne, les limites du royaume n’avaient pas plus d’importance que n’importe quelle autre limite. Le terme de frontière est apparu seulement au XIVème siècle, et il désigne les régions les plus menacées d’un royaume. Le concept de royaume est assez intellectuel et pas vraiment matériel, il ne se traduit pas réellement sur le territoire. (Première carte de France a été élaboré en 1525).
- Les métaphores pour symboliser le pouvoir
Au XIIème siècle, les théoriciens utilisent une métaphore organique, une image, celle d’un corps pourvu d’une tête, de bras et de jambes. Cette image est utilisée pour imposer une vision unitaire et hiérarchisée de la société. Ainsi, le royaume est présenté comme un corps entier dont le roi occupe la tête et dont chaque entité territoriale constitue une partie ou un membre. Autre concept utilisé par les jurisconsultes : le concept de couronne. A partir de la deuxième moitié du XIIème siècle, la couronne est considérée de plus en plus comme une entité abstraite distincte de la personne physique du roi. On parle de fidélité au royaume et à la couronne. Le concept va dépasser l’individu qui porte la couronne et qui est investi temporairement de l’office royal. Le concept de couronne permet d’assurer la continuité du pouvoir dans la mesure où la fidélité n’est plus limitée à un possesseur, à un maître donc au roi, mais à une autre réalité qui elle ne meurt jamais, c’est la couronne qui annonce la continuité de l’Etat.
- La royauté suzeraine
Au sommet de la mouvance se trouvent les vassaux (feudataires), et au sommet de ceux-ci se trouve le roi (autorité non remise en cause et dispose de prérogatives extraordinaires). Cette vision hiérarchique est inspirée par la réforme grégorienne qui a mis en place un système hiérarchique avec le pape à sa tête. Se dégage alors l’idée d’une monarchie suzeraine supérieure à tous les degrés. Pour que cette hiérarchie reste solide, deux idées apparaissent à la fin du XIIème siècle sous le règne de Philippe Auguste, le roi tente par tout les moyens d’agrandir son territoire d’influence :
- Le roi peut acquérir un fief sans avoir à prêter l’hommage : dispense exclusive au roi. Cela lui permet d’agrandir son royaume sans être amené à dépendre des seigneurs -> évolution juridique et politique dans ces territoires.
- Le seigneur du fief peut être invité à renoncer à sa seigneurie moyennant une compensation financière. Le roi peut récupérer un fief sans avoir à rendre des comptes, sinon une indemnité. Ce procédé est une sorte d’expropriation du seigneur.
Cette évolution conduit des auteurs, notamment Philippe de Beaumanoir à résumer la situation et à proposer des adages qui permettent de comprendre le statut privilégié du roi : le roi ne tient de personne (sauf de Dieu). Cette règle est interprétée de la façon suivante : le roi est au sommet d’une double pyramide, celle des droits réels et celles des droit personnels -> dimension
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