Anthologie sur la prison
Par Andrea • 2 Mai 2018 • 4 467 Mots (18 Pages) • 499 Vues
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L'évadé
Boris Vian
Il a dévalé la colline
Ses pas faisaient rouler les pierres
Là-haut entre les quatre murs
La sirène chantait sans joie
Il respirait l’odeur des arbres
Avec son corps comme une forge
La lumière l’accompagnait
Et lui faisait danser son ombre
Pourvu qu’ils me laissent le temps
Il sautait à travers les herbes
Il a cueilli deux feuilles jaunes
Gorgées de sève et de soleil
Les canons d’acier bleu crachaient
De courtes flammes de feu sec
Pourvu qu’ils me laissent le temps
Il est arrivé près de l’eau
Il y a plongé son visage
Il riait de joie il a bu
Pourvu qu’ils me laissent le temps
Il s’est relevé pour sauter
Pourvu qu’ils me laissent le temps
Une abeille de cuivre chaud
L’a foudroyé sur l’autre rive
Le sang et l’eau se sont mêlés
Il avait eu le temps de voir
Le temps de boire à ce ruisseau
Le temps de porter à sa bouche
Deux feuilles gorgées de soleil
Le temps d’atteindre l’autre rive
Le temps de rire aux assassins
Le temps de courir vers la femme
Il avait eu le temps de vivre.
[pic 1]
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bourreau !
De tous ces dieux vengeurs qu'adora ta démence,
Tu n'en oublias qu'un, ô peuple ! la Clémence !
Essayons d'un culte nouveau.
Le jour qu'oubliant ta colère,
Comme un lutteur grandi qui sent son bras plus fort,
De l'héroïsme populaire
Tu feras le dernier effort ;
Le jour où tu diras : Je triomphe et pardonne !...
Ta vertu montera plus haut que ta colonne
Au-dessus des exploits humains ;
Dans des temples voués à ta miséricorde
Ton génie unira la force et la concorde,
Et les siècles battront des mains !
" Peuple, diront-ils, ouvre une ère
" Que dans ses rêves seuls l'humanité tenta,
" Proscris des codes de la terre
" La mort que le crime inventa !
" Remplis de ta vertu l'histoire qui la nie,
" Réponds par tant de gloire à tant de calomnie !
" Laisse la pitié respirer!
" Jette à tes ennemis des lois plus magnanimes,
" Ou si tu veux punir, inflige à tes victimes
" Le supplice de t'admirer !
" Quitte enfin la sanglante ornière
" Où se traîne le char des révolutions,
" Que ta halte soit la dernière
" Dans ce désert des nations ;
" Que le genre humain dise en bénissant tes pages :
" C'est ici que la France a de ses lois sauvages
" Fermé le livre ensanglanté ;
" C'est ici qu'un grand peuple, au jour de la justice,
" Dans la balance humaine, au lieu d'un vil supplice,
" Jeta sa magnanimité."
Mais le jour où le long des fleuves
Tu reviendras, les yeux baissés sur tes chemins,
Suivi, maudit par quatre veuves,
Et par des groupes d'orphelins,
De ton morne triomphe en vain cherchant la fête,
Les passants se diront, en détournant la tête :
Marchons, ce n'est rien de nouveau !
C'est, après la victoire, un peuple qui se venge ;
Le siècle en a menti ; jamais l'homme ne change :
Toujours, ou victime, ou bourreau !
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La ballade des pendus
François Villon
Frères humains, qui après nous vivez,
N'ayez les cœurs contre nous endurcis,
Car, si pitié de nous pauvres avez,
Dieu en aura plus tôt de vous mercis.
Vous nous voyez ci attachés, cinq, six :
Quant à la
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