L'acculturation judiciaire du droit marocain
Par Orhan • 4 Octobre 2017 • 7 326 Mots (30 Pages) • 762 Vues
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à lui assistés d’un « amasaï » qui garantissait l’exécution du verdict. Dans les affaires délicates, l’anechchem choisi, pouvait faire appel à d’autres arbitres pour consultation, mais c’était à lui seul que revenait le droit des décisions.
Quand les justiciables ne s’entendaient pas sur l’anechchem, le demandeur peut appeler son adversaire devant la Djmaâ du Douar, cette dernière arrive souvent à concilier les plaideurs mais à défaut d’un accord commun elle se trouve dans l’obligation de leur designer un anechchem .
Au cas ou les deux parties n’arrivent pas à se mettre d’accord, le perdant peut demander la révision du procès par un second anechchem bien sûr en informant l’autre partie, sinon le perdant peut faire appel à un troisième arbitre dont la décision met fin à autre demande.
Une contrainte morale suffisait à faire rappeler le désobéissant à l’ordre de la chose par sa simple mise au banc de la tribu.
En cas d’absence d’une partie, c’est son amasaï qui exécute la décision de l’anechchem à son nom.
Paragraphe 2 : Sur le plan pénal
En droit pénal comme en droit civil, l’influence du droit musulman en pays de coutume est grande.
• Le talion ; œil pour œil dent pour dent etc.…,
• la peine vengeance par consentement ; quand les proches de la victime consentaient à éteindre cette dette par le paiement d’une somme d’argent en réparation du meurtre (diya).
• La réparation à gage de certaines blessures graves et moins graves en compensation.
Sont les peines prévues par les règles pénales qui constituaient les grandes bases de la coutume répressive berbère et qui ne différaient en rien du droit pénal musulman.
La rédaction par écrit en arabe des coutumes pénales en pays dit de droit coutumier est plus que révélatrice ; elle est le témoignage d’une symbiose parfaite entre deux droits qui se complètent.
Section II : l’acculturation islamique
On parlera donc d’une acculturation islamique avant (paragraphe 1) et pendant (paragraphe 2) le protectorat.
Paragraphe 1 : la justice du chraâ avant le protectorat
Le pouvoir judiciaire de Maroc précolonial était indépendant la mission d’élaborer le droit revenait aux Oulémas.
Le sultan nommait simplement les cadis, il ne jugeait pas.
Le cadi était le maitre de la juridiction précoloniale. Juge du droit commun, il est théoriquement compétant en toute matière.
Arbitre, notaire, et juge, le cadi est l’homme de la justice dans le droit musulman. Sa juridiction apparait comme une institution très originale, il n’est pas exagéré de dire qu’elle n’a de pareille dans aucune autre législation (..) la fonction elle-même confère à l’homme, en dehors de ses mérites et de son action personnelle, une haute influence morale.
La procédure :
Le demandeur cite publiquement et verbalement son aderssaire à comparaitre devant le cadi suivant la célèbre formule « allons devant le chraâ » si la personne refuse de comparaitre, le juge le fait amener de force par ses Aouns. Le procès est ouvert par un exposé des faits dressé par deux Adouls spécialement désignés par cette tache .si le procès soulève une question de fond, le cadi renvoie les parties devant les Oulémas dont la mission est de dire le droit sur la question posée et c’est de leur consultation qu’il tirera la sentence.
Cette organisation juridictionnelle se caractérisait par l’unité du juge, et l’unité de degré de juridiction.
A coté de ses attributions contentieuses écrites, le cadi exerçait la juridiction gracieuse, notamment en matière de partage des successions de tutelle des incapables, d’administration de leurs biens et d’émancipation. Il recevait encore les actes dressés par les Adouls, après en avoir contrôlé la validité, les titres produits par les parties. C’est là du moins ce qu’il devait faire .
Mais la faiblesse du Maroc précolonial, sa mauvaise organisation politique laissait déjà entrevoir une certaine défaillance judiciaire.
Les procès prenaient la forme de très longs débats, de procédure compliquées et de « Fatoua » interminables.
Mais, si la justice du chraâ s’est vue entrainer à la veille du protectorat dans le creuset de la partialité ; cette défaillance judiciaire incombe au premier chef au pouvoir central par le manquement à ses obligations vis-à-vis du corps judiciaire, et en deuxième lieu à l’insouciance des cadis d’un coté et à l’indifférence des justiciables de l’autre. Donc la défaillance judicaire n’est nullement le résultat d’une faillite de droit, mais d’une société en faillit.
Paragraphe 2 : Les juridictions du chraa pendant le protectorat
La réorganisation de la justice du chraâ a retenu, dès 1912 l’attention de l’administration française du protectorat. Mais il a été nécessaire d’y procéder avec beaucoup de prudence, car la loi du chraâ d’essence religieuse ne pouvait en principe être modifiée. De cette remarque capitale de J.caillé , nous pouvons retenir deux points fondamentaux.
La réforme du chraâ avait retenue dès les premiers jours du protectorat l’attention de l’administration française.
La vénération qui entourait la justice du chraâ rendait toute entreprise de changement difficile à concevoir et réclamait une prudence dans ce sens ; car en principe le chraa est un tout qui ne pouvait être modifié.
Donc les réformes introduites vont toucher d’abord les structures formelles si cela s’avère nécessaire. C’est dans ce sens qu’il faut interpréter la première circulaire du 1er Novembre 1912 réglementant provisoirement la compétence des cadis.
A- Les cadis et leurs compétences
Gardien du chraâ, le cadi est demeuré comme le passé, juge unique. Toutefois, les reforme introduites par le protectorat diminuaient ses compétences. Il n’est plus juge de droit commun, mais un cadi qui s’occupe seulement du droit successoral, du statut personnel et d’immeubles non immatriculés.
Il
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