Dette publique et souveraineté sous la Renaissance
Par Stella0400 • 20 Septembre 2018 • 1 623 Mots (7 Pages) • 524 Vues
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R. Bonney illustre ce propos par l’exemple de la Hanse germanique. Précisons que la Hanse était une association de cités marchandes de la mer Baltique et de la mer du Nord du XIIè au XVIIè siècles. En 1356, une réunion des villes de la Hanse entraine la décision de l’envoi d’ambassades auprès des princes étrangers. Cette décision est, en principe, une compétence de la puissance suprême, c’est-à-dire l’État. Ceci soulève donc la question la détention de la souveraineté dans la Hanse germanique. La compétence de ce type de décision revient-elle à la Hanse, elle-même, ou à chacune des villes la composant ?
Cette question s’élargit encore aux XVIè et XVIIè siècles puisque la Hanse se retrouve dans une situation de subordination par rapport à l’empereur des Romains.
B - L’endettement des cités-États, conséquence de leur souveraineté subordonnée à celle de l’empereur
R. Bonney fournit une nouvelle définition de la cité-État, en y incluant la notion de souveraineté: "un État territorial dans lequel la souveraineté était exercée par la cité fondatrice et sa classe dominante, celle-ci n’ayant fait qu’élargir son pouvoir hors des murs de la capitale." Ainsi, pour ce qui est des grandes villes hanséates, des "villes impériales libres", on constate qu’elles sont finalement soumises à l’empereur et aux différentes taxes qu’il leur impose. Outre la perte de souveraineté en elle-même, cette subordination a également pour conséquence l’endettement des cités-États.
Sous la menace d’être réduites en sujétion par les États territoriaux, les villes devaient financer leur sécurité, en s’endettant. Au cours du XVè siècle, les villes étaient ainsi obligées à rouer au moins 12% de leur budget au service de la dette.
La technique de la rente perpétuelle a également été utilisée par les États modernes pour s’endetter.
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II - La perte de souveraineté des États modernes sur leurs finances publiques, conséquence d’une gestion néfaste de la dette publique
Les États modernes se sont constitués par un processus logique de mauvaise gestion de la dette, entrainant une perte de confiance (A), qui a elle-même conduit à une diminution considérable de la souveraineté de l’État sur ses finances publiques (B).
A - L’irresponsabilité financière de l’État absolutiste en matière de dette entrainant une perte de sa crédibilité
La crédibilité accordée à un État par les prêteurs est forcément liée à sa gestion des finances publiques et, plus particulièrement, de la dette publique. Ainsi, l’absolutisme de la monarchie française du XVIIè siècle se caractérisait par une gestion irresponsable des dettes de l’État. Les monarques s’endettent mais font régulièrement défaut aux prêteurs. On note par exemple que la France fait défaut 8 fois entre 1550 et 1800. Comme l’écrit Hilton L. Root dans La construction de l’État moderne en Europe. La France et l’Angleterre, "Sous l’Ancien Régime, le jeu des finances de l’État avait, dans ses règles mêmes, une limite à son efficience: le joueur principal - le roi - était au-dessus des lois." En tant que souverain absolu, le monarque français du XVIIè siècle ne se sent pas obligé, tenu du remboursement intégral d’une dette, puisqu’il prétend être au-dessus des lois de finances.
La conséquence principale de cette irresponsabilité financière est la perte de confiance accordée par les prêteurs en la personne du roi. Or, cette confiance est nécessaire, sinon pour se voir accorder des prêts, tout simplement, pour ne pas se voir demander des intérêts à des taux extrêmement élevés.
Pour contourner ces taux d’intérêts très élevés, le monarque se voit dans l’obligation d’utiliser des intermédiaires en qui les prêteurs avaient davantage confiance et à qui ils demandaient donc des intérêts à des taux plus raisonnables, pour contracter des emprunts.
B - La perte de crédibilité de l’État entrainant une perte de souveraineté sur ses finances publiques
Pour pouvoir continuer à emprunter, la monarchie passe par plusieurs intermédiaires. Le Roi s’adresse ainsi aux organismes corporatifs. En contrepartie de servir de banquiers au Roi et de faire ce qu’il demande, ces différents types d’intermédiaires recevaient de sa part une reconnaissance officielle, avec notamment l’accord de privilèges. Ainsi, le système d’affermage des impôts, par lequel le Roi confie à des fonctionnaires le soin de recouvrer l’impôt en versant par avance au Roi la somme demandée, ou encore la vente des offices aux bourgeois, qui consiste en l’achat, par les bourgeois, de titres émis par les fermiers généraux, ont permis au Roi d’emprunter de manière indirecte.
Toutefois, le Roi devient rapidement dépendant de ses intermédiaires. En effet, à la fin du XVIIIè siècle, alors qu’on réalise que l’État gagnerait à l’élimination de ces privilèges, les intermédiaires qui servaient de banquiers au Roi avaient grandement étendu leur emprise sur les ressources financières de la Nation, de telle sorte qu’on se demander si le Roi est toujours le souverain, c’est-à-dire le propriétaire d’une puissance suprême, soumise à aucune autre.
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