Les modes de la connaissance
Par Andrea • 18 Avril 2018 • 1 867 Mots (8 Pages) • 709 Vues
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des vérités particulières ou individuelles.5» En effet, les théories de l’empirisme qui supposent que l’expérience seule peut permettre de développer une connaissance omettent le fait que même plusieurs vérités peuvent s’avérer être des faussetés. Ce n’est pas parce qu’un individu perçoit régulièrement un objet de la même façon à chaque fois, que nécessairement sa connaissance par rapport à cet objet est véridique. Il ne suffit que d’un seul contre-exemple de cette idée conçue par rapport à l’objet en question pour venir contredire la connaissance acquise seulement par l’expérience. De plus, une connaissance ne pourrait pas être développée seulement par une expérience sensorielle, car l’objet qu’un individu perçoit dans son environnement quotidiennement peut être différent chez un autre individu dans un autre environnement. Par exemple, dans «Le mythe de la caverne» de Platon6, on isole des hommes dans une caverne et on leur montre des ombres d’objets projetées sur un mur de celui-ci durant toute leur vie. Donc, pour ces hommes, la réalité se résume à des ombres sur un mur. C’est ce qu’ils perçoivent quotidiennement et c’est ce dont se compose leur expérience sensorielle. Toutefois, étant prisonniers dans la cave, ils ignorent qu’il existe un monde extérieur, avec des objets en trois dimensions. Pour les hommes qui n’ont pas vécu dans la cave, leur connaissance du monde est complètement différente de celle des hommes qui ont vécu dans la cave. Il ne serait donc pas possible de développer une connaissance par l’expérience seule, puisque celle-ci ne s’applique que de manière individuelle et non universelle.
En effet, un individu qui ne se base que sur ses expériences sensorielles pour acquérir une connaissance ferait preuve de mauvais jugement. D’ailleurs, dans «Petit cours d’autodéfense intellectuelle7», une œuvre de Normand Baillargeon traitant sur le jugement critique, un très bon exemple a été donné sur la manière que devrait être interprétée une perception. Quatre individus voyagent en train en Australie pour la première fois. Ils perçoivent un mouton noir de profil dans un champ. Un homme affirme donc que les moutons en Australie sont noirs. Un autre spécifie que tout ce qui peut être conclu est que certains moutons en Australie sont noirs. Un troisième réfute qu’on ne peut seulement affirmer qu’au moins un mouton est noir en Australie. Le dernier, quant à lui, conclut que dans ce pays, il y a au moins un mouton dont au moins un des côtés est noir. Donc, tant que les hommes n’ont pas vus l’autre côté du mouton, ils ne peuvent pas affirmer que le mouton est noir au complet. De plus, même s’ils étaient sortis du train pour aller voir l’autre côté du mouton et même s’ils s’étaient aperçus que le mouton était réellement noir au complet, cette connaissance acquise aura tout de même besoin de plus d’un mode de la connaissance pour se développer. Par exemple, si les hommes décident de partir à la recherche de tous les moutons présents en Australie afin de déterminer les différentes couleurs possibles des moutons dans ce pays, ils devront utiliser le mode de la mémoire pour se rappeler de la couleur noire du premier mouton et aussi de celle des autres à venir, afin d’élaborer leur inventaire de moutons. Dans un même sens, il est insensé de dire qu’un seul mode de la connaissance peut permettre de développer une connaissance, car tous les modes requièrent une interaction avec d’autres modes automatiquement. Par exemple, un individu peut percevoir une maison dans son ensemble, puis mémoriser cette connaissance sur l’allure de la maison. De cette façon, lorsqu’il repassera devant cette même maison le lendemain, mais qu’il ne percevra que la devanture de celle-ci, il pourra s’imaginer le reste de la maison2. Dans ce cas-ci, la perception, la mémoire et l’imagination ont été utilisées pour développer une connaissance toute simple.
En conclusion, il est impossible de développer une connaissance par un seul mode de la connaissance, puisque malgré les théories de l’empirisme qui soutiennent que l’expérience seule le permet, cela ne tient pas en compte le fait que plusieurs croyances d’une vérité peuvent s’avérer fausses. De plus, les modes de la connaissance sont tous reliés entre eux, rendant impossible d’en utiliser un sans un autre. Selon Platon, une connaissance doit être «vraie et justifiée». Toutefois, il arrive souvent que des théories scientifiques, par exemple, qui se disaient vraies et justifiées à l’époque, s’avèrent être fausses lorsque de nouvelles découvertes scientifiques font surface et contredisent les anciennes. Donc, même si un individu acquiert une connaissance, il ne peut pas savoir s’il s’agit réellement ou non d’une connaissance avant qu’une autre vienne la contredire.
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Médiagraphie
1Anouk Barberousse, «Connaissance,» dans Dictionnaire des concepts philosophiques, Collection-In Extenso (France : Larousse – CRNS ÉDITIONS, 2006), p.139.
2 LESSARD, Jean-François, Théorie de la connaissance 1, notes de cours.
3 Denis Huisman, «I. LA SENSATION ET LA RÉFLEXION, SOURCE DE NOS IDÉES,» dans Les pages les plus célèbres de la philosophie occidentale, (France : Perrin, 2003), p. 184.
4 Denis Huisman, «I. CRITIQUE GÉNÉRALE DES IDÉES ABSTRAITES,» dans Les pages les plus célèbres de la philosophie occidentale, (France : Perrin, 2003), p. 206.
5 Denis Huisman, «III. CONNAISSANCE SENSIBLE ET CONNAISSANCE RATIONNELLE,» dans Les pages les plus célèbres de la philosophie occidentale, (France : Perrin, 2003), p. 200.
6 Denis Huisman, «I. LE MYTHE DE LA CAVERNE,» dans Les pages les plus célèbres de la philosophie occidentale, (France : Perrin, 2003), p. 39.
7 Normand Baillargeon, «3.3 Juger,» dans Petit cours d’autodéfense intellectuelle, (Québec : Lux, 2006), p.200.
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