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Chambre criminelle, mercredi 4 décembre 1996 - la perte de chance

Par   •  5 Juillet 2018  •  5 028 Mots (21 Pages)  •  417 Vues

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B – De la perte de chance à la disparition d’une éventualité favorable

La jurisprudence a donné une définition de la perte d’une chance en 1975 et elle a évolué jusqu’à l’avant-projet de la réforme de la responsabilité civile. La perte d’une chance est un préjudice qui consiste en la disparition d’une espérance future de la victime, dont il est impossible de savoir si cette espérance se serait réalisée en l’absence du fait dommageable. Il y a donc une incertitude sur la situation de la victime future si le fait dommageable n’avait pas eu lieu. En l’espèce, la perte de chance est « la perte des privilèges d’avancement » (promotion). La perte d'une chance de bénéficier d'un élément favorable ou d'éviter un événement défavorable constitue un préjudice spécifique. Ainsi la perte de chance est indépendante du préjudice final. Sous peine d'être censuré par la Cour de Cassation, les juges ont même l'obligation de préciser que l'indemnisation accordée correspond effectivement à une perte de chance. Cependant, un risque suffisamment certain n'est pas suffisant à lui seul pour caractériser la perte de chance, pas plus qu'un préjudice final hypothétique. On dit que le dommage doit être réel, pas de problème quand il est actuel. On l’applique au cas de l’espèce, le fait générateur est « l’accident dont Arwin Y…a été reconnu responsable » et l’évènement favorable est « l’avancement au sein de la fonction publique ». Le dommage/préjudice corporel de l’agent de l’Etat lui a fait perdre une chance d’exercer son métier alors qu’elle aurait pu prétendre à une élévation d’indice qui lui aurait permis d’avoir une retraite plus élevée (« qu’en conséquence la différence entre la retraite qu’elle touchera effectivement et celle qu’elle aurait dû toucher »). La disparition de l’événement favorable doit être acquise. Autrement dit, la victime ne doit pas avoir d’autres possibilités de se voir représenter cet évènement dans le futur, en ce sens l’évènement est définitivement perdu. C'est plus délicat pour des dommages futurs car certains d'entre eux pourront être réparé des lors qu'ils sont certains. Mais pas de réparation des dommages futurs qui sont hypothétiques (non-certains). Lorsqu’il y a perte de chance, c’est comme une perte d'espoir raisonnable d'un avantage futur donnant lieu à une indemnisation partielle. Par exemple, un cheval gagnant, par un accident est blessé et ne peut pas concourir, donc une indemnisation partielle est possible. Cela correspond à une partie du prix, c'est-à-dire la perte de chance d'avoir couru le grand prix car la perte de chance du prix est éventuelle. L'indemnisation de la chance perdue sera d'autant plus importante que la probabilité sera forte que se produise l'événement espéré ou à redouter. Ainsi il s'agit de la réalisation fortement prévisible d'un dommage présent ou futur. Le juge doit donc apprécier l'espoir déçu par le fait générateur de la responsabilité. L'utilisation de statistiques permet d'évaluer l'existence de la perte de chance. Mais un lien avec le préjudice final peut être retenu en l'absence de lien de causalité entre le fait générateur et le dommage (cela s'est surtout développé dans le domaine médical : omission, défaut d'information ou de conseil, retard appliqué les bons soins...). Ainsi, le fait que la faute a une influence certaine suffit ainsi à engager la responsabilité sur le fondement de la perte de chance en présence de probabilité forte que le dommage ne se serait pas produit.

Après avoir étudier les caractères du dommage, nous allons voir que la victime d’un dommage corporel à la possibilité d’obtenir réparation d’un préjudice direct et certain lié à la perte de chance. Mais cette réparation est limitée, et la notion de « perte de chance » évolue considérablement avec la jurisprudence.

II – Le caractère réparable de la perte de la chance

Il s’agit ici d’étudier l’étendue de la réparation de la perte de chance, pour cela, les juges exercent un calcul de probabilité sur le préjudice subi par la victime (A). Cependant, la notion de perte de chance reste un thème difficile à apprécier pour les juges en France (B).

A - Un préjudice de perte de chance subordonné à un calcul de probabilité par les juges

Concernant l’étendue de la réparation, il ne faut pas perdre de vue encore une fois, qu’il s’agit d’indemniser la perte de chance. Dans la perte de chance, il ne faut pas faire abstraction du caractère aléatoire. Lorsque la Cour de cassation parle de « probabilité d’un évènement favorable », elle vient en l’occurrence introduire cette idée d’aléa, il ne s’agit pas d’un fait qui s’est produit mais qui aurait pu éventuellement se produire. L’aléa pèse sur l’avancement professionnel. Selon la requérante, le dommage corporel a entraîné la « disparition de cette probabilité » d’avancement professionnel, puisque « l’avancement au sien de la fonction publique étant quasi-automatique ». Donc, si l’accident n’avait pas eu lieu, la probabilité serait toujours d’actualité. Lorsque le tribunal reconnaît qu’il y a une perte de chance constitutive d’un préjudice, l’indemnité n’est pas égale au gain espéré mais a une partie de celui-ci plus ou moins importante selon la probabilité du succès. Autrement dit, il ne sera pas possible d’obtenir 100% du gain qui était escompté, car il y a toujours une incertitude concernant la réalisation de la chance. C’est d’ailleurs ce que rappelle la Cour de cassation en précisant que « la réalisation d’une chance n’est jamais certaine ». Nous pouvons nous demander dès lors, quel montant sera versé. Afin d’évaluer l’étendue de la réparation à ce préjudice, le juge va donc faire des calculs de probabilité, et il se réfère aussi à un critère temporel, c'est-à-dire que l'avantage escompté aurait dû se réaliser après ce délai. Mais la perte de chance fait le plus souvent l'objet d'une réparation partielle égale à un pourcentage de la valeur de la chance perdue. En outre, le juge appréciera in concreto la possibilité de réalisation de cet évènement, il va l’apprécier en fonction des circonstances de l’affaire et le juge va estimer que la chance perdue doit être sérieuse. Le dommage corporel subis par « blessures involontaires » et qui a causé un préjudice à l’agent de l’Etat « d’une incapacité permanente

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