La liberté
Par Sény BAMBARA • 31 Juillet 2023 • Cours • 2 223 Mots (9 Pages) • 327 Vues
Lycée Mame Cheikh MBAYE Année Scolaire 2022 – 2023
Monsieur BAMBARA Classe : TL
La liberté
Introduction
A la question qu’est-ce que la liberté, l’on s’empresse parfois à répondre : l’absence totale de contrainte. C’est du moins la définition la plus fréquente : être libre, c’est faire ce qui nous plaît, c’est accomplir nos désirs sans obstacle ni contrainte. Cette acception de la liberté comme la possibilité de faire tout ce qui nous plait rejoint d’ailleurs son sens premier : pour les anciens, un homme libre est un homme qui n’obéit qu’à lui-même, contrairement à l’esclave qui agit sous le commandement d’un autre. Mais peut-on considérer comme libre un homme qui agit sous le diktat de son plaisir ? Agir sans contrainte suffit-il pour définir une parfaite liberté ? Certainement pas, car je peux volontairement me précipiter dans la servitude comme un animal se jette étourdiment dans un piège. Qu’est-ce donc qu’agir librement ? Ce sont donc là quelques une des questions auxquelles nous allons répondre dans ce cours.
I. La liberté comme acceptation du destin.
I.1. La conception stoïcienne de la liberté.
La conception stoïcienne de la liberté doit sa pertinence à la distinction entre ce qui relève de la volonté humaine et ce qui relève de la volonté de Dieu. En effet, le sage stoïcien reconnait avec humilité ses limites et accepte certains événements comme la manifestation d’une volonté supérieure à laquelle il doit respect et obéissance. Pour eux, la liberté ne consiste pas dans l’abandon aux impulsions du désir ; elle réside plutôt dans l’assentiment à l’ordre providentiel de la nature. Puisqu’il y a des choses que l’homme ne peut en aucune façon changer – les événements du monde, la maladie, la mort, etc. –, il doit, de l’avis des Stoïciens, et notamment pour Epictète, vouloir pleinement ce qui lui arrive. Ainsi, consentir à la nécessité, vouloir ce que veut la divine raison qui gouverne et ordonne toutes choses, telle est, pour le sage stoïcien, la voie de la liberté.
I.2. La liberté comme compréhension de la nécessité.
A l’instar des stoïciens, Spinoza considère la nature comme soumise à la nécessité. Dire que la nature est soumise à la nécessité, c’est reconnaitre que tous les êtres qui la composent le sont également. Par conséquent, tous les êtres de la nature sont donc déterminés par les lois qui gouvernent le monde. Ce que nous nommons liberté n’est rien d’autre que notre ignorance des lois et des causes qui nous déterminent à l’image de toutes les créatures de la nature. Car l’homme, précise Spinoza, est d’abord un esclave : soumis aux erreurs des sens et aux illusions de la passion et souffrant des limites de son être, il s’agite de tous côtés, voyant quelquefois le meilleur, faisant souvent le pire. Si le déterminisme naturel fait de l’homme un esclave, comment convertir alors en liberté cette servitude originelle ? Par la connaissance, répond Spinoza. La liberté suppose donc la compréhension de la nécessité (tout ce qui m’arrive est donc nécessaire, rien n’est contingent). Vu sous cet angle, nous pouvons affirmer aussi bien avec les stoïciens qu’avec Spinoza que le véritable esclave, loin d’être celui dont le corps et la vie sont à la merci du maître, est et demeure plutôt celui dont l’âme est prisonnière des désirs excessifs, qui vont à l’encontre de la nature et de la nécessité.
Toutefois, il convient de distinguer soigneusement le fatalisme qui asservit et le déterminisme qui libère. Le premier dit : cet événement que vous craignez tant est inévitable ; quoi qu’il arrive auparavant, quoi que vous fassiez pour l’éviter, il se produira tout de même. Dans la tragédie de Sophocle, Œdipe est destiné à tuer son père et à épouser sa mère. Quels que soient les événements qui le précèdent, le résultat final est « nécessaire ». Ainsi, le fatalisme rend impossible cette liberté que le déterminisme autorise et permet. (Voir également III.1)
Mais l’homme est-il entièrement soumis à la nécessité ? Certes, notre corps est soumis à la nécessité. Certes, je ne peux pas me soustraire à la loi de la pesanteur, mais il m’est toujours loisible de dire ou de ne pas dire la vérité. Dès lors, ma liberté se présente d’abord à moi-même comme le pouvoir de choisir entre plusieurs actions possibles : c’est précisément ce que l’on appelle le libre arbitre. Mais cette liberté de choix possède, de l’avis de Descartes, deux degrés.
II. Le libre arbitre.
II.1. La liberté d’indifférence.
Il arrive parfois que le choix auquel je suis confronté me jette dans le plus grand embarras du moment que je n’ai aucune raison de porter ma préférence sur une solution plutôt que sur une autre. C’est précisément cette situation qu’un philosophe du XIVe siècle, Jean Buridan, nous invite à méditer sur le cas d’un âne qui aurait autant faim que soif et qui finit par mourir car, placé à égale distance d’une mesure d’avoine et d’un seau d’eau, il n’a pas pu prendre une décision. Cette analyse de Buridan, loin de résoudre la question de la liberté, la pose. L’indifférence caractérisée de l’âne exprime-t-elle une parfaite liberté ? Celle-ci est-elle possible sans une réelle capacité de discernement ? En tout cas, toute prise de décision, estime le philosophe, nécessite le pouvoir de se déterminer même quand aucun motif de l’emporte. Descartes considère que cette liberté que l’on appelle par ailleurs la « liberté d’indifférence » est le plus bas degré de liberté. Elle s’exerce toujours à l’occasion de choix insignifiants, dérisoires – par exemple, lorsqu’on hésite entre une boule rouge et une boule noire, entre un nombre pair et un nombre impair –. L’indifférence est donc l’état dans lequel se trouve la volonté lorsque, confronté à un choix, « elle n’est pas poussée d’un côté plutôt que de l’autre par la perception du vrai ou du bien ». Elle n’est nullement la condition de la liberté, car celle-ci suppose une réelle capacité de discernement de la meilleure des solutions.
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