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La notion de patrimoine en droit français

Par   •  6 Novembre 2018  •  3 000 Mots (12 Pages)  •  450 Vues

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la personnalité juridique y est au centre, elle est indéniablement nécessaire dès que la notion de patrimoine est insérée.

Enfin dans cette théorie, le caractère pécuniaire du contenu du patrimoine apparaît comme logique ; en effet s’il se voit comme l’ensemble du passif répondant à l’actif d’une personne, des droits extra-patrimoniaux ne peuvent avoir leur place ici, il faut donc émettre une réserve quand à l’évolution de certains droits, notamment par rapport à leur patrimonialisation ou leur extra-patrimonialisation. Nous nous plaçons donc dans une vision unitaire, personnelle et pécuniaire du patrimoine.

Ainsi ces auteurs ont ajouté à la notion de patrimoine une notion d’unicité très forte pendant un temps, qui va cependant rencontrer des difficultés dues aux professionnels qui, ne pouvant créer une autre personnalité juridique (une personne morale), ont essayé de protéger leur patrimoine personnel contre leurs créanciers professionnels.

B. Un cloisonnement du patrimoine en vu de se protéger face à des créanciers professionnels

Face à l’unicité du patrimoine et le fait majeur que tout l’actif réponde de tout le passif d’une personne, le législateur a dû réagir pour protéger les entrepreneurs de leurs créanciers professionnels. Le législateur a d’abord, par une loi du premier août 2003 instauré une déclaration d’insaisissabilité. Cela permet aux entrepreneurs individuels immatriculés à un registre de publicité légale de faire déclarer insaisissables certains biens immobiliers de leur patrimoine, à ses créanciers professionnels. Cela est incroyable car ainsi, l’actif ne répond plus par sa totalité au passif d’une personne, et depuis une loi de 2015, cette déclaration s’applique de plein droit sur la résidence principale, ce qui ferait presque sortir un bien immeuble du patrimoine d’une personne, comme s’il était cloisonné et organisé afin qu’une partie réponde des créanciers professionnels, et l’autre de ses créanciers personnels. Nous sommes face à une première remise en cause de l’unicité du patrimoine. Cependant elle ne s’applique qu’aux biens immeubles d’un entrepreneur individuel, ce qui reste donc une avancée limitée.

Mais le législateur ira encore plus loin, et va créer le statut de l’EIRL, soit l’entrepreneur individuel à responsabilité limitée, ce nouveau concept est une véritable révolution car il permet pour une personne physique de se constituer un nouveau patrimoine distinct de son patrimoine personnel sans créer de personne morale, soit sans créer une nouvelle personnalité juridique. Il va donc permettre à l’entrepreneur, en cas de faillite, de protéger ses biens personnels et de les mettre à l’abri des créanciers professionnels. Ce concept est complètement contraire à l’exigence de la théorie d’Aubry et Rau qui n’acceptait qu’un patrimoine par personnalité juridique. Ce statut a été créé pour les petits entrepreneurs qui n’avaient pas les moyens de se constituer une société car pour cela il faut être deux protagonistes. Ainsi il y avait à l’époque énormément de fraudes par la constitution de sociétés fictives accompagnées de beaucoup de conventions de prête-noms, afin d’éviter que les créanciers professionnels ne saisissent des biens de leur patrimoine personnel. La question de l’unicité du patrimoine paraît presque être dangereuse pour l’ordre public car elle amenait à des conventions frauduleuses afin de la contourner, pour pouvoir se protéger. Cependant il est à noter que ce nouveau concept est lui-même limité en cas de fraude à la loi, car les deux patrimoines se retrouvent alors à nouveau réunis sur la tête de la personne. Néanmoins cette avancée théorique a une limite, car quand une personne n’attribue qu’une partie de ses bien à sa vie professionnelle, généralement les banques et établissements qui font crédit vont exiger des garanties, et le patrimoine d’affectation n’est que rarement suffisant, ainsi les garanties se porteront à nouveau sur la patrimoine personnel de son titulaire. Cette évolution notable se limite donc aux exigences des créanciers qui peuvent considérer que la teneur du patrimoine professionnel est trop faible face au passif du débiteur, devant alors engager ses biens personnels.

Ce problème de protection de patrimoine personnel n’est qu’un début de la modification de la notion de patrimoine selon la théorie classique d’Aubry et Rau, qui va devoir se conformer à des problèmes pratiques naissant de son application dans une société moderne aux mœurs changeants.

II. Des difficultés pratiques obligeant la théorie classique à s’adapter à la société moderne

La notion de patrimoine, d’une époque à une autre, doit subir des modifications, parfois en contradiction avec ses principes, le droit positif français a inclus dans la notion de patrimoine la possibilité que ce dernier soit affecté à un objectif grâce à des influences de pays voisins (A) mais des questions environnementales et éthiques ont finalement remis en question l’attachement du patrimoine à une personnalité juridique (B).

A. La finalité des patrimoines, un morcellement de l’unicité ?

En raison de la théorie de l’unicité du patrimoine d’Aubry et Rau, la France devait se confronter au manque d’attractivité de son droit. En effet dans d’autres pays comme les pays anglo-saxons, le « trust » permet aux individus de se constituer des patrimoines séparés des leurs, chose qui était impossible dès lors en France. La loi du 19 février 2007 instaure alors la fiducie, qui peut être une fiducie sûreté ou une fiducie gestion. L’objectif de la France était donc de rendre le droit français plus attrayant en se dotant d’un instrument juridique capable de concurrencer les fiducies étrangères, et d’éviter les délocalisations d’opérations financières. Ainsi la fiducie permet à une personne (le constituant) de placer des biens dans une sorte de patrimoine d’affectation sous la garde d’une autre personne (le fiduciaire) qui aura pour but de gérer ces biens, au bénéfice d’une tierce personne (le bénéficiaire), ou le fiduciaire pourra aussi vouloir garder ses biens à l’abri. Les biens donnés en gérance ne rentrent pas dans le patrimoine du fiduciaire mais dès la fin du contrat de fiducie, les biens reviennent dans le patrimoine du constituant, en cas de décès ils feront partie de plein droit dans la succession. Cette nouveauté va à l’encontre de la théorie de l’unicité du

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