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La Constitution de la Ve République : la réhabilitation du pouvoir exécutif a-t-elle eu lieu ?

Par   •  31 Mai 2018  •  3 696 Mots (15 Pages)  •  598 Vues

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A. Une hyperpresidentialisation résultant de la pratique gaullienne du pouvoir

En effet, Michel Debré avait qualifié le président de la Vème République de « Monarque républicain », relativement à l'exercice du pouvoir par le Général de Gaulle.

Les successeurs du Général ont confirmé, puis accentué cette pratique du pouvoir, et l'on a pu évoquer à propos du président Sarkozy la monarchisation de la Vème République, l'hyper ou l'omni-président. Cependant, la Vème République, même transformée par la pratique, n'est pas devenue pour autant présidentielle. Les mécanismes du régime parlementaire ont été conservés (droit de dissolution et responsabilité politique du gouvernement devant le Parlement). Le régime présidentiel est fondé sur la séparation des pouvoirs et implique, outre un parlement puissant, des élections parlementaires à mi-mandat présidentiel, tous éléments absents de la Vème République.

En outre, les facteurs de l'hyperprésidentialisation du régime sont multiples et convergents. La guerre d'Algérie, qui a conduit à l'élaboration de la nouvelle Constitution, impliquait évidemment l'engagement total et personnel du Général de Gaulle dans la conduite de la guerre puis dans la conclusion des accords d'Evian. Investi de la confiance réitérée du peuple, par référendum, le Général ne pouvait se cantonner à un rôle neutre d'arbitre face à la classe politique discréditée. L'élection directe du président par le peuple, à partir de 1962, le conduit à traduire dans la politique les promesses de la campagne approuvées par le peuple. Investi par le peuple, le président est politiquement responsable devant ce dernier exclusivement. L'élection populaire confère une légitimité charismatique et une toute puissance aux présidents successifs qui n'avaient auparavant aucune légitimité particulière, ni historique, ni populaire. La conférence de presse du 31 janvier 1964 fait du président la source de tout pouvoir, les autres pouvoirs tirant leur légitimité du président de la République. « Il doit être évidemment entendu que l'autorité indivisible de l'Etat est confiée tout entière au Président par le peuple qui l'a élu, qu'il n'en existe aucune autre, ni ministérielle, ni civile, ni militaire, ni judiciaire, qui ne soit conférée et maintenue par lui, enfin qu'il lui appartient d'ajuster le domaine suprême qui lui est propre avec ceux dont il attribue la gestion à d'autres », ainsi fut la réponse que donna Charles De Gaulle quant à la question de la nature des institutions de la Cinquième République, lors de la conférence de presse du 31 janvier 1964 ; Les compétences exercées par le président de la République sont discrétionnaires aussi bien dans leur étendue que dans l'absence de contrôle.

Les domaines du pouvoir exécutif réservés au président ont été définis par chaque président, et ont varié d'un septennat à l'autre. Ils concernent notamment les affaires étrangères, la défense nationale. Maintes décisions prises par le président de la République sont insusceptibles de tout contrôle. Il s'agit évidemment des pouvoirs propres, c'est-à-dire dispensés de l'exigence de contreseing, énumérés par l'article 19 de la Constitution (nomination du premier ministre, recours au référendum, dissolution de l'Assemblée Nationale, pouvoirs de crise, droit de message au parlement, nomination de trois membres du Conseil Constitutionnel et saisine de ce dernier). Pourtant, maintes décisions du président sont qualifiées d'actes de gouvernement : recours à l'article 16 de la Constitution et durée des pouvoirs de crise (Conseil d'État , arrêt Rubin de Servens du 2 mars 1962), reprise des essais nucléaires (Conseil d’État, 29 septembre 1995, Association Greenpeace France), nomination de trois membres, dont le président, au Conseil Constitutionnel, engagement des forces militaires françaises dans des conflits extérieurs qui ne dépend que du Président (Conseil d’État, 5 juillet 2000, M. MEGRET).

En revanche, le juge administratif exerce un contrôle de légalité sur la nomination à des emplois laissés à la décision du gouvernement, sur l'exercice du droit de grâce, comme sur la décision du président de faire fleurir la tombe du maréchal Pétain (Conseil d’État, 27 novembre 2000, Association Comité tous frères) et toute autre décision présentant un caractère administratif.

Enfin, la réforme du quinquennat (en 2000) et l'organisation des élections législatives suivant les élections présidentielles font des élections législatives un troisième tour de l'élection présidentielle. L'assemblée nationale élue ne sert qu'à mettre en œuvre les engagements pris par le président devant la Nation.

Nous avons ainsi montré que la prédominance du Président sous la Vème République provient de l’expérience gaullienne de l’exécutif. Toutefois, l’hyperprésidentialisation cause parfois un usage du pouvoir exécutif contra constitutionem ; Étudions désormais l’écart considérable entre la pratique constitutionnelle et la lettre de la Constitution.

B. Une hyperprésidentialisation au travers d’un décalage croissant entre la pratique constitutionnelle et la lettre de la Constitution

Le texte de la Constitution de 1958 organise des rapports entre les pouvoirs publics qui n'existent pas dans la pratique et qui sont dépourvus d'effectivité.

En effet, bien souvent la prédominance présidentielle influe en période normale sur la fonction exécutive du Gouvernement. Par exemple, le président peut mettre fin discrétionnairement aux fonctions du premier ministre alors que l'article 8 subordonne la cessation des fonctions du premier ministre à la présentation par celui-ci de la démission de son gouvernement. Il n'est soumis ni à l'obtention de certaines autorisations, ni à la survenue de certaines situations politiques. Le Président a le choix du moment et de la personne. Même le vote d'une motion de censure ne conditionne pas le choix du Président. Il peut maintenir en fonction le Premier ministre sortant (après sa démission).

D’autre part et contrairement à l'article 20, c'est le président de la République qui détermine et conduit la politique de la Nation, et non le gouvernement, comme l'exige le texte constitutionnel.

En outre, le choc du décalage entre la lettre de la Constitution et la pratique constitutionnelle

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