Commentaire dames Dol et Laurent
Par Matt • 20 Novembre 2018 • 1 703 Mots (7 Pages) • 711 Vues
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– L’extension des pouvoirs de l’Administration
•L’assouplissement des règles de forme
-L’Administration voit ses pouvoirs étendus de plusieurs façons (CE,28/06/1918, Heyriès), il s’agit de la suspension d’une règle législative par un acte administratif. Le Conseil d’Etat juge donc valables, durant ces périodes, l’empiètement des autorités administratives sur les pouvoirs du législateur (CE, 5/03/1948, Marion). Il peut arriver, en période troublée, que l’Administration soit dans l’impossibilité d’accomplir sa mission et que des citoyens se substituent à elle. Le juge administratif considère, alors, que, bien que pris par une personne privée, les décisions adoptées revêtent un caractère administratif, à condition bien sûr qu’elles soient prises dans l’intérêt général.
•L’assouplissement des règles de fond
-L’autorité administrative peut faire des actes portant des atteintes graves aux libertés, atteintes jugées illégales en temps normal. Ainsi, en l’espèce, le préfet maritime porte atteinte à la liberté individuelle et à la liberté du commerce. Jurisprudence avec la liberté de circuler qui est affectée en raison d’une éruption volcanique (CE, 18/05/1983, Rodes).
-Le caractère exceptionnel des circonstances peut donc changer la qualification des actes et le partage de compétence entre les deux ordres de juridiction. Le caractère particulier des circonstances justifie que l’Administration s’affranchisse des règles normales de la légalité. Le juge reste cependant très vigilant quant au contrôle qu’il opère dans ce type d’affaire.
II – Le contrôle du juge en matière de circonstances exceptionnelles
A – L’appréciation juridictionnelle de la notion
•La diversification du champ des circonstances exceptionnelles
-Le juge considère que la guerre est la circonstance exceptionnelle par excellence, d’où le qualificatif de « théorie des pouvoirs de guerre ». Cette théorie va cependant trouver matière à s’appliquer à des périodes autres que les guerres. Le juge l’applique aussi aux périodes d’après-guerre (CE, 27/06/1924, Chambre syndicale des patrons confiseurs et chocolatiers).
-L’extension du champ des circonstances exceptionnelles est l’arrêt reconnaissant comme situations exceptionnelles les périodes de menace de grève générale (CE, 18/04/1947, Jarrigion). Une éruption volcanique a même été considérée comme une circonstance exceptionnelle justifiant des mesures restrictives des libertés publiques (CE, 18/05/1983, Rodes).
-Chaque fois qu’il n’est pas possible d’assurer la sauvegarde de l’intérêt public sans violer la légalité, il y a circonstances exceptionnelles. Cette notion confère donc des pouvoirs importants au juge puisque c’est lui seul qui apprécie s’il y a ou non circonstances exceptionnelles.
• Une appréciation de plus en plus concrète
-Le juge administratif a posé plusieurs conditions pour que soit constatée l’existence de circonstances exceptionnelles. Il faut d’abord qu’existe une situation anormale et exorbitante. C’est donc une analyse in concreto qu’il faut opérer pour déterminer s’il y a circonstance exceptionnelle ou pas.
-En l’espèce, la législation sur les pouvoirs de police et celle sur l’état de siège ne permettent pas de prendre des mesures aussi restrictives des libertés. Il n’est donc pas possible de préserver l’ordre public en utilisant les règles de la légalité traditionnelle. Il faut enfin qu’un intérêt public suffisamment important ait été mis en danger. Il peut s’agir de la défense nationale comme en l’espèce, ou plus fréquemment du rétablissement de l’ordre et de la continuité des services publics essentiels à la vie nationale comme dans l’affaire Heyriès.
B – La légalité des mesures du préfet maritime
• Une mesure justifiée par un trouble de l’ordre public
-L’ordre public retenu par le juge administratif est essentiellement un ordre matériel et extérieur celui-ci se compose exclusivement de la trilogie classique énumérée à l’article L 2212-1 du code général des collectivités territoriales. Il s’agit là des buts que toute autorité de police administrative générale doit défendre. L’on trouve la salubrité, la sécurité et la tranquillité publique.
-En l’espèce, c’est la salubrité et la sécurité publique qui sont posent problème. Le juge estime ainsi que l’atteinte à ces éléments de l’ordre public justifient les mesures prises par le préfet maritime. Le Conseil d’Etat estime ainsi que cette situation présente « un caractère tout particulier de gravité » et que les mesures prises étaient nécessaires « pour sauvegarder d’une manière efficace tout à la fois la troupe et l’intérêt national ». Surtout, le juge considère qu’existaient des risques importants de divulgation de secrets d’Etat au cours de ces rencontres. L’ensemble de ces faits a été apprécié par le juge au regard de la nature exceptionnelle des circonstances.
• Une mesure adaptée à la gravité de ce trouble
-Les libertés affectées, en l’espèce, par ces mesures étaient la liberté individuelle pour les filles galantes et la liberté du commerce pour les débitants de boisson Il est possible de mesurer la gravité de ces restrictions si l’on songe que même la loi sur l’état de siège ne permettait pas de prendre de telles mesures. Le juge estime, pourtant, que ces mesures sont bien adaptées par leur nature et leur gravité à l’importance des atteintes à la salubrité et à la sécurité publiques. Il faut cependant noter que ces mesures doivent être limitées à la période des circonstances exceptionnelles. En tout état de cause, les mesures sont, en l’espèce, jugées parfaitement légales. Et la requête des dames Dol et Laurent est rejetée.
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