Commentaire d'arrêt: CE, Sarran
Par Christopher • 18 Juin 2018 • 2 856 Mots (12 Pages) • 510 Vues
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- Le dévoiement de l’interprétation de cette suprématie
L’interprétation qu’opère le Conseil d’Etat dans l’arrêt Sarran pour poser le principe de la suprématie de la Constitutions sur les traités internationaux est critiquable.
Tout d’abord, il y a quelque chose d’un peu artificiel à tirer d’une simple règle d’habilitation un principe hiérarchique. Le juge administratif a trouvé dans l’article 55 de la Constitution une habilitation lui permettant de faire respecter la primauté des traités sur les lois, certes, mais aussi une habilitation lui permettant de confirmer la suprématie de la Constitution sur les traités en interprétant le mot « lois » comme excluant toute disposition de valeur constitutionnelle.
Ensuite, on a souvent considéré que la raison d’être de la hiérarchie est la concrétisation du droit. La Constitution habilite des organes à prendre des normes à différents stages: elle donne des compétences à d’autres organes pour concrétiser ses dispositions et pour l’appliquer. Mais cela peut être tourné par Raymond Carré de Malberg qui établit une correspondance entre la hiérarchie du texte et la hiérarchie de l’organe qui le pose. Pour lui, si l’on raisonne par rapport à l’organe, la Constitution est subordonnée à la loi car le législateur exprime au quotidien la volonté nationale tandis que la Constitution est un texte de principe qui s’est exprimé de manière instantanée. On peut appliquer cela au rapport de la Constitution et des traités internationaux avec le raisonnement selon lequel les Etats expriment une volonté générale bilatérale ou multilatéral au quotidien à travers les négociations et les traités qui doivent donc primer sur la Constitution pour les mêmes raisons.
En outre, la solution retenue par l’arrêt Sarran contrevenait à la règle Pacta sunt servanda « qui implique que tout traité en vigueur lie les parties et doit être exécuté par elles de bonne foi ». Le Conseil Constitutionnel l’avait rangé, dans une décision du 9 avril 1992, au nombre des « règles de droit public international » auquel se réfère le 14e alinéa du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946. Cet alinéa dispose que « la République française, fidèle à ses traditions, se conforme aux règles du droit public international ». Toutefois, les normes constitutionnelles peuvent faire exemption à la règle.[2] Dans l’arrêt Aquarone (1997), le Conseil d’Etat avait jugé que les dispositions du 14e alinéa du Préambule ne l’habilitaient pas à faire prévaloir la place de la coutume internationale sur la loi en cas de conflit entre ces deux normes.
Enfin, de nombreux commentateurs on soutenus une autre théorie et ont renversé la hiérarchie des normes en faveur du traité comme Denys Simond pour qui la Constitution n’aurait pas la capacité de placer le droit international au-dessus d’elle-même puisque le principe de la supériorité d’une norme ne saurait dépendre de l’énoncé d’une norme de rang inférieur.[3] Dans ses cours à l’Académie internationale de La Haye, le professeur Gaston Jeze se posait aussi la question de la suprématie des traités sur la Constitution.
On ne peut donc pas reprocher au juge de faire oeuvre d’autorité dans l’arrêt Sarran puisque le débat sur place de la Constitution par rapport au traités internationaux n’a jamais trouvé de réponse absolue en doctrine. Mais une chose est sure, le débat est re-ouvert puisqu’avec cet arrêt, le Conseil d’Etat s’est exposé.
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II. Une suprématie discutée
ça ouvre des pistes: C vraiment > ?
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- Le refus de reconnaitre une hiérarchie au sein de la Constitution même
Dans sa solution dans l’arrêt Sarran, le juge administratif aurait pu opérer un contrôle entre l’article 76 de la Constitution et les articles 1 et 6 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen ainsi que l’article 3 le Constitution de 1958. Le problème aurait été réglé vu qu’il tout à fait envisageable qu’il y ait incompatibilité entre les normes constitutionnelles.
D’une part, le juge administratif refuse dans cet arrêt de reconnaître une hiérarchie dans la Constitution même entre les textes composant le bloc de constitutionnalité (la Constitution proprement dite - avec son article 76 - et la Déclaration de 1789 avec ses articles 1er et 6e). Il convient alors de nier l’existence de cette hiérarchie. Cela est tout à fait logique car la hiérarchie est une relation de valise entres différentes normes. Par conséquent, s’il y a une hiérarchie entre les composants du bloc de constitutionnalité, ils doivent tirer leur validité les uns des autres. La norme de degré inférieur tire sa validité de la norme de degré supérieur. Alors, en cas de confit entre ces deux normes, la norme inférieure contraire à la norme supérieure sera invalidée par le juge. Or, comme on le sait, tous les composants du bloc de constitutionnalité tirent leur validité d'un seul et unique acte: le référendum constituant de 1958. Par conséquent, si un texte du le bloc de constitutionnalité est un conflit avec un des autres texte qui la composent, le juge doit les concilier par l’interprétation.
D’autre part, le juge administratif refuse dans cet arrêt de reconnaître une hiérarchie dans la Constitution même entre les différentes dispositions constitutionnelles (les articles 3 et 76 de la Constitution). De même, il convient de nier l’existence de cette hiérarchie. Nous pouvons affirmer que la critique générale adressée aux thèses posant une hiérarchie entre les textes composant le bloc de constitutionnalité peut être adressée aussi aux thèses posant une hiérarchie entre les différentes normes faisant partie de ces textes. En effet, les normes constitutionnelles ne différent les unes des autres ni en validité ni en force juridique car elles sont toutes édictées par le même vote et peuvent être modifiées ou abrogées selon la même procédure de révision.
Dans l’arrêt Sarran, le Conseil d’Etat prend le soin de rejet les moyens tirés de l’inconstitutionnalité du décret en précisant que ce dernier n’était pas contraire à l’article 76 de la Constitution mais qu'il en faisait une « exacte application » même. Selon le Conseil d’Etat, l’article 76 de la Constitution doit être commis comme une norme constitutionnelle spéciale
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