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1e Chambre civile 7 mars 1989

Par   •  23 Septembre 2018  •  2 269 Mots (10 Pages)  •  556 Vues

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B. Un traitement unifié entre le tiers victime et le contractant victime

Initialement, l’obligation contractuelle de sécurité issue de la jurisprudence de 1911 fut inventée dans l’intérêt des victimes contractantes d’accident corporel pour mettre en jeu une responsabilité sans faute qui est une responsabilité contractuelle.

Cependant, depuis un arrêt du 13 février 1930, les tiers au contrat de transport qui subissait un dommage pouvaient eux aussi mettre en jeu la responsabilité du transporteur, sans avoir à prouver de faute de sa part, mais en se basant sur la responsabilité du fait des choses. En effet, lorsqu’une chose jouait un rôle actif dans la réalisation d’un dommage, son gardien était responsable de plein droit. Puis dans la seconde moitié du 20e siècle, l’obligation de sécurité a proliféré, mais dans la majorité des cas elle n’était qu’une obligation de moyen, comme cela aurait été le cas en l’espèce si on n’avait pas eu un revirement de jurisprudence de la part de la Cour de cassation. En conséquence, un contractant victime devait prouver la faute du transporteur pour être indemnisé.

Dans son arrêt du 7 mars 1989, la 1e Chambre civile de la Cour de cassation décide, en se fondant sur l’article 1384 du Code civil, que la responsabilité de la société de transport à l’égard de son contractant est une responsabilité de nature extracontractuelle.

On constate donc que cela donne lieu à éviter à une différence de traitement entre l’indemnisation du contractant et l’indemnisation du tiers. En effet, le tiers était paradoxalement mieux traité que le contractant auparavant, alors que le contractant devrait pouvoir logiquement bénéficier d’une protection supérieure au tiers pour s’être engagé dans une relation contractuelle. La décision de la Cour de Cassation permet ainsi au contractant de faire jouer, comme le tiers, la responsabilité sans faute du gardien de la chose qui a causé le dommage. Par conséquent, la Cour de cassation aligne le sort du contractant victime à celui du tiers victime. A travers sa décision, la Cour de cassation a donc déplacé cette frontière pour une raison d’opportunité : éviter que le contractant soit moins bien traité que le tiers.

Par conséquent, la Cour de cassation évite une « discrimination » dans l’indemnisation du tiers et du contractant. Cependant, on peut penser que la Cour de cassation aurait pu dire que l’obligation de sécurité est toujours de moyens.

II. L’engagement de la responsabilité délictuelle du transporteur à l’égard du voyageur admise

On verra dans un premier temps qu’il y a une responsabilité délictuelle favorable au contractant victime (A). Dans un deuxième temps, on verra que ce choix de la responsabilité délictuelle n’est peut-être pas qu’un changement ponctuel, mais préfigure une évolution importante de la distinction entre responsabilité contractuelle et responsabilité extracontractuelle (B).

A. Une responsabilité délictuelle favorable au contractant victime

L’article 1384 du Code civil, qui est invoqué par la Cour de cassation dispose que l’ « on est responsable non seulement du dommage que l’on cause par son propre fait, mais encore de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre, ou des choses que l’on a sous sa garde ».

Dans l’arrêt de 1930, la Cour de cassation créait un principe général de responsabilité sans faute du fait des choses car lorsqu’une personne non contractante était victime d’un dommage causé par une faute, elle n’avait pas besoin de prouver la faute pour être indemnisée. En l’espèce, la victime se trouve en dehors de l’espace contractuel lorsque le dommage survient. On peut ainsi considérer qu’un tel cas peut s’appliquer à cette situation d’espèce.

Lorsque la chose en mouvement qui entre en contact avec la victime est à l’origine du préjudice subi, on a une quasi-certitude quant à son rôle causal dans la survenance du préjudice. La victime doit alors seulement prouver l’intervention matérielle de la chose, la jurisprudence présumant son rôle actif dans la production du dommage.

Or en l’espèce, l’accident subi par le contractant (dû à sa chute sur la plaque de verglas) survient au moment où le train duquel il était descendu démarrait. Le train était donc en mouvement. Par conséquent, le train a eu une incidence sur l’accident de la victime. En tant que gardien de la chose ayant provoqué l’accident, c’est-à-dire le train, le transporteur est responsable. L’intervention matérielle est donc facile à prouver. Par conséquent, la victime n’a pas à prouver la faute de la SNCF, ce qui permet de mieux le protéger.

Mais bien que le rejet de la responsabilité contractuelle est eu pour but l’uniformisation du régime du tiers victime et du contractant victime, permettant ainsi une meilleure protection de la victime contractante, il est peut être une solution bien plus importante que ce que l’on peut croire au premier regard dans l’évolution de notre droit de la responsabilité.

B. Une potentielle mutation de la distinction entre les ordres de responsabilités

Cette double éjection de l’obligation de sécurité et de l’obligation contractuelle exprime potentiellement la volonté de la Cour de cassation de limiter ces obligations, dont la portée est assez étendue alors que ce sont des obligations d’exception.

D’une manière générale, la doctrine semble favorable à la fin de cette distinction entre responsabilité contractuelle et responsabilité extracontractuelle. Selon le professeur Geneviève Viney, « dans l’avenir, la distinction entre responsabilité contractuelle et responsabilité extracontractuelle est appelée à perdre de son importance au profit d’une autre distinction qui tend aujourd’hui à s’affirmer de plus en plus entre le droit commun de la responsabilité et les régimes spéciaux de responsabilité civile ».

Un avant-projet de réforme du droit de la responsabilité civile a également été publié par le ministère de la justice en avril 2016. Ce dernier a été diffusé dans la communauté juridique et judiciaire afin de recueillir des observations de toutes les personnes intéressées par ce droit. On peut ainsi y lire au sein de son article 1233 alinéa 2 que « le dommage corporel est réparé sur le fondement des règles de la responsabilité extracontractuelle alors même qu’il serait causé par l’inexécution d’une obligation contractuelle ». Par conséquent, il est possible si ce texte voit le jour, que la distinction entre les deux ordres

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