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Le Parlement de la Ve République est-il encore aujourd’hui le législateur ?

Par   •  6 Juin 2018  •  2 668 Mots (11 Pages)  •  654 Vues

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Également, la décentralisation accentue ce double processus de perte de pouvoirs et de contestation de légitimité : les élus municipaux, départementaux, régionaux, désignés au suffrage universel direct exercent des pouvoirs croissants, gèrent des budgets très importants et apparaissent comme des interlocuteurs plus proches des citoyens et dotés de moyens plus efficaces que les parlementaires.

Aujourd’hui le Conseil constitutionnel est devenu un véritable juge constitutionnel, il est une arme de l’opposition contre la majorité politique. Pouvant être saisi de différentes façons, il peut censurer des textes de loi et ainsi légiférer négativement. En outre, la Constitution de 1958 prévoit plusieurs mécanismes de protection du domaine d’intervention réglementaire. Selon l’article 41 de la Constitution, le Gouvernement et le président de l’assemblée saisi (depuis 2008) peuvent, pendant la discussion parlementaire, opposer l’irrecevabilité à tout amendement ou à toute proposition de loi qui concernerait le domaine réglementaire. Enfin, en vertu de l’article 37 de la Constitution, le Gouvernement peut saisir le Conseil constitutionnel pour que celui-ci l’autorise à modifier par décret une loi qui serait intervenue dans une matière de nature réglementaire. En effet, dans sa décision Loi sur l’évolution de la Nouvelle-Calédonie du 23 aout 1995, le Conseil Constitutionnel a noté que la loi « n'exprime la volonté générale que dans le respect de la Constitution ».

Dès lors, il est discernable que le Parlement subit une pression sur son domaine d’intervention par différentes institutions, mais il subit également une lutte directe avec le gouvernement.

- Le Gouvernement, un concurrent grandissant pour le Parlement

Avant 1958, la loi n’avait pas de bornes: elle pouvait intervenir dans tous les domaines. Le pouvoir réglementaire n’avait, quant à lui, qu’une fonction d’exécution des lois. Il n’existait pas de pouvoir réglementaire autonome. Ainsi, un décret était le plus souvent un décret d’application d’une loi. Le Titre V de la Constitution de la Vème République « Des rapports entre le Parlement et le gouvernement» a permis de limiter les pouvoirs du Parlement. La loi se voit cantonnée dans un domaine d’attribution. L’article 34 du texte constitutionnel énumère les domaines dans lesquels la loi, soit fixe les règles, soit détermine les principes fondamentaux, le détail étant renvoyé à des décrets d’application. Tous les domaines non évoqués dans cet article 34 relèvent du pouvoir réglementaire, selon l’article 37. Ainsi, en rupture avec la tradition juridique française, les normes réglementaires deviennent les normes de droit commun.

De la même manière, l’article 49 prévoit trois procédures distinctes permettant la mise en place de la responsabilité politique du gouvernement. L’aliéna premier traite de la question de confiance, le deuxième alinéa s’occupe la motion de censure, tandis que le troisième alinéa porte sur l'engagement de responsabilité du gouvernement sur un texte qui permet à celui-ci de forcer son adoption, sauf si l'Assemblée nationale est prête à le renverser.

En outre, le gouvernement peut demander au Parlement l’autorisation de prendre lui-même des mesures relevant normalement du domaine de la loi afin de mettre en œuvre son programme selon l’article 38 de la Constitution, avec des ordonnances, appelées sous les IIIème et IVème Républiques, les décrets-lois. Ainsi, déjà limité, le domaine de la loi peut être envahi par le pouvoir exécutif. On peut notamment remarquer que de nombreuses ordonnances ont été prises par les gouvernements pour transposer des directives relevant du domaine de la loi.

Comme vu précédemment, l’article 41 de la Constitution permet également une rationalisation des amendements : un cavalier législatif, c'est-à-dire un article de loi qui introduit des dispositions qui n'ont rien à voir avec le sujet traité par le projet de loi, peut faire l’objet d’irrecevabilité par le gouvernement. Également, les amendements ayant pour effet la diminution des ressources publiques ou à l’aggravation d’une charge publique sont irrecevables, d’après l’article 40 de la Constitution. Mais aussi, le recours à la procédure accélérée par le gouvernement ainsi que la possible commission mixte paritaire, de l’article 45 alinéa 2 de la Constitution limite les pouvoirs du Parlement.

L’institution parlementaire est ainsi limitée sous la Vème République, pressée par des institutions et concurrencée par le gouvernement. De cette façon, le pouvoir constituant dérivé essaye de rénover sa fonction législative.

- Une volonté de rénovation relative de la fonction législative du Parlement

Dans un premier temps, une analyse de la tendance à rééquilibrer les pouvoirs et donner plus de puissance au Parlement sera dressée (A) avant d’analyser le blocage continuel que subit ce dernier (B).

- La volonté de rééquilibrer les pouvoirs, comme produit des révisions constitutionnelles.

Plusieurs réformes constitutionnelles ont rééquilibré les pouvoirs entre l’exécutif et le législatif afin de donner plus de poids à ce dernier : la possibilité pour soixante députés ou soixante sénateurs de saisir le Conseil constitutionnel en 1974, la consultation du Parlement sur les actes communautaires relevant du domaine de la loi en 1992, l’établissement d’une session unique et d’une séance mensuelle réservée à un ordre du jour choisi par chaque assemblée en 1995, l’examen et le vote annuels des lois de financement de la sécurité sociale en 1996 participent d’un renouveau du Parlement.

Mais la principale réforme en la matière vient de la loi constitutionnelle du 23 juillet 2008 de modernisation des institutions de la Ve République visant « à renforcer le rôle du Parlement, à rénover le mode d’exercice du pouvoir exécutif et à garantir aux citoyens des droits nouveaux ».

En matière d’ordonnance auparavant, la jurisprudence du Conseil d’État admettait la ratification implicite d’une ordonnance, résultant de sa modification par une loi. Depuis 2008, l’article 38 de la Constitution exige que la ratification soit explicite.

La maitrise de l’ordre du jour, c'est-à-dire la liste des sujets qu’une assemblée doit aborder au cours d’une séance, a également été rénovée. Elle était d’abord propriété principale du gouvernement. Ainsi près de 90% des textes de loi

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