Explication Therese Desqueyroux Chapitre 1
Par Plum05 • 13 Février 2018 • 1 787 Mots (8 Pages) • 885 Vues
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- Larroque traite sa fille avec froideur : « Son père ne l’embrassa pas, ne lui donna pas même un regard » (l. 8), « petit homme aux jambes arquées qui pas une fois ne se retourna vers sa fille » (l. 39-40). Ces éléments montrent qu’il est plus intéressé par les répercussions de l’affaire que par le destin de sa fille. Pas une fois, il ne s'adresse à elle.
- Larroque et Duros traitent Thérèse avec mépris : « comme si elle n’eût pas été présente » (l. 30) ; « gênés par ce corps de femme, ils la poussaient du coude » (l. 31). Aux yeux des deux hommes, elle n'est plus qu'un « corps », un obstacle, et non une personne. « Ils n’avaient plus peur d ‘élever la voix » : ne la considèrent pas.
- Thérèse occupe une place à part, à l'écart des deux hommes : ils ne forment pas un trio et font comme si elle n'existait pas, à moins que ce ne soit elle qui prenne ses distances : « elle aurait pu choir au bord de ce chemin, ni lui ni Duros ne s’en fussent aperçus » (l. 40-41).Ici, Double sens de « choir » : chute physique ou chute morale.
- Les pronoms personnels opposent les personnages : il y a d'un côté « elle » (l. 9, 23, 29, 30, 31, 33, 36…), et de l'autre les deux hommes, « ils » (l. 26 et 31). Ce passage annonce l'opposition, dans la suite du livre, entre Thérèse et les autres membres de la famille Desqueyroux.
(Transition : La façon même dont l’auteur procède dans la narration fait que rien n’est clair ; il livre simplement certains indices, laissant l’incipit incomplet et obligeant le lecteur à formuler des hypothèses)
3. Un incipit incomplet
3.1 D’abord,des informations essentielles sont cachées par le narrateur
Le lecteur doit comprendre seul dans quel cadre spatio-temporel l’action se déroule :
- Le temps : Quelques indices disséminés çà et là dans le texte permettent par exemple de situer l'action en automne, en fin de journée : « des feuilles de platane étaient collées aux bancs trempés de pluie », « les jours avaient bien diminué » (l. 26-27).Mais valeur psychologique plus que narrative.
- Les lieux : ne sont pas non plus très précis. Seule est nommée la commune voisine de Budos (l. 24 et 28), en Gironde. Le lieu de départ de l'action du roman est un palais de justice : le lecteur est obligé de se poser des questions (Que s'est-il passé ? De quoi l'accuse-t-on ? Etc.)
3.2 Quelques informations sont données par les dialogues :
L’auteur délègue aux dialogues le passage d’informations : c’est par l'avocat et le père que le lecteur obtient les informations qui lui manquent. Mais pour le moment, il est difficile de comprendre toutes les allusions ; certaines ne prendront du sens que bien plus tard dans le roman :
- Le lecteur comprend que le témoignage de Thérèse est mensonger : « Tout de même, l’explication qu’elle a donnée » (l. 46), « Je le lui ai assez dit : “Mais malheureuse trouve autre chose“ » (l. 51) et que des documents ont été falsifiés : « Mais il y avait cette ordonnance : en somme, il s’agissait d’un faux… » (l. 43).
- Larroque et Duros sont donc complices (voire instigateurs) du parjure. L’avocat répond à l’objection de Thérèse avec condescendance pour sauvegarder les apparences : « J’ai voulu dire : victime de son imprudence, madame ». (l. 21)
3.3Enfin, le lecteur doit lui-même reconstruire l’histoire à partir de divers indices :
- Le lecteur est invité à démêler lui-même les fils de l’intrigue. Il est peu aidé par le narrateur qui le laisse faire des hypothèses, notamment sur l’identité des personnages : Le père de Thérèse est M. Larroque et non M. Desqueyroux.
- Il doit comprendre seul que le procès est une tentative d’assassinat par empoisonnement : « il ne comptait jamais les gouttes » (l. 16) ; « cette ordonnance [est] un faux » (l. 43) ; « C’était le docteur Pédemay qui avait porté plainte » (l. 43) mais que la tentative a échoué : « il n’y a pas eu de victime » (l. 20) ; « la déposition de M. Desqueyroux était excellente » (l. 42).
- Le non-lieu a été obtenu suite au faux-témoignage de M. Desqueyroux : « Après le témoignage de mon gendre, c’était couru » (l. 13).
Conclusion
- L’incipit laisse volontairement de côté un nombre important d’informations, notamment le mobile et les circonstances de la tentative de meurtre. Thérèse, femme frêle et écrasée par les circonstances qui l’entourent, apparaît peu capable d’avoir fait ce dont on l’accuse. Dès lors, le lecteur se trouve en position d’attente et, incité à échafauder des hypothèses, attend de découvrir les détails du sordide fait divers. Cela procède d’un choix de narration : en effet,e roman répondra à ces interrogations dans les chapitres suivants au moyen d’analepses. En même temps, Mauriac pose son personnage et l’intrigue comme des éléments difficiles à cerner et le fait sentir à son lecteur.
- Ouverture : l est intéressant de comparer comment la description de Thérèse évoluera entre ce texte et l’explicit
(= la fin) du roman, où elle est pour de bon délivrée de l’oppression de Bernard (sera beaucoup plus présente et vivante/ le narrateur la laisse libre de son destin)
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