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Commentaire composé du Prologue de l'Antigone d'Anouilh (du début jusqu'à "dans une maison qui dort")

Par   •  13 Novembre 2018  •  4 099 Mots (17 Pages)  •  899 Vues

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et nombre réduit de personnage : on est bien dans le monde clôt de la tragédie. Omniprésence du malheur, et notamment de la mort : polyptote du verbe mourir parcourt l’ensemble du texte (« mourir » l.8, 11, 22, 31 ; « mort(s) » l.25, 34, 46, 49). Toutes les morts de la pièce sont déjà annoncées et sont très nombreuses : 3 personnages déjà morts (« Œdipe et ses fils »), 3 personnages vont mourir (Antigone, Hémon, Eurydice), et Créon, s’il ne va mourir, va perdre le pouvoir et être arrêté (« jusqu’à ce qu’un nouveau chef de Thèbes dûment mandaté leur ordonne de l’arrêter à son tour » l.40). Eurydice : impression que son unique fonction est de mourir  « Elle tricotera pendant toute la tragédie jusqu’à ce que son tour vienne de se lever et de mourir ». Presque aucun personnage ne doit survivre  pièce présentée comme une sordide histoire de famille.

- La présence de la fatalité. Tout est déjà écrit. Le Prologue est celui qui le montre avec le plus de force. Il exhibe la clôture de l’action dès le premier mot de la pièce : « Voilà ». Par l’emploi de ce terme au lieu du terme « voici », Anouilh nous indique que tout est déjà joué. En effet, « voici » est un déictique cataphorique (=qui présente donc des éléments qui pourront être exploités par la suite). « Voilà », au contraire, est un déictique anaphorique, qui fait donc un bilan sur ce qui lui préexiste  en employant « voilà » pour ouvrir la pièce, Anouilh semble suggérer que tout est déjà joué : ouvre paradoxalement la pièce sur une conclusion. Détermination renforcée par les futurs (« elle va surgir », « elle va mourir ») et les tournures qui expriment l’obligation (« il va falloir » ; « il ne devait jamais exister de mari d’Antigone »). Cette présence de la fin dès le début d’une action aussi visible avec Hémon : « Et voilà, maintenant, lui allait être le mari d’Antigone ». Alors que la demande en mariage aurait dû être quelque chose d’heureux et une ouverture sur l’avenir, elle est présentée comme une clôture : en demandant Antigone en mariage, Hémon a scellé son destin.  cette tirade = une prolepse (=annonce du futur). Aucun suspens. Le Prologue rend manifeste le mécanisme tragique.

c. Une entrée originale dans une réécriture assumée :

-  Prologue = un sas qui a pour fonction de rappeler les bases d’un mythe connu. « Voilà » (l.4) = tout est déjà dit et joué, certes parce qu’il s’agit d’une tragédie, mais aussi parce que la pièce est une réécriture. Dès 1ers mots : « l’histoire d’Antigone »  utilisation d’un déterminant défini qui ne se justifie que si le spectateur doit savoir de quoi il s’agit. Reprise de tous les noms du mythe des Labdacides : « Antigone », « Ismène », « Hémon », « Œdipe », « Etéocle », « Polynice », « Créon », « Eurydice ». Aucun nom propre nouveau  annonce que l’on devrait rester dans le cadre du mythe tel qu’on le connaît + rappel des événements fondateurs pour la tragédie d’Antigone : mort d’Œdipe, guerre fratricide, édit de Créon au sujet des deux frères. Ce rappel = 8 lignes, soit à peine 1/5eme de la tirade  considère qu’il n’y a pas besoin de développer, que les bases sont connues.

- Plongée progressive dans l’action. Tirade en 3 étapes : 1) l. 4 = ouverture de la scène ; 2) « Antigone, c’est la petite maigre … auxilaires de la justice de Créon » (l.4-41) = présentation des personnages 3) Analepse analepse à partir de la l.41 (cf. passé composé et imparfait) qui rappelle le contexte de l’action et le présente comme un début : « Et maintenant » = rupture avec la présentation ; « elle commence » : passage de la présentation à l’action. Début de la pièce  début de l’action, mais on est bien sur scène  cf. didascalie : « décor » « scène » (l.1) + utilisation du terme « personnage » (=personne fictive) et des noms des personnages du mythe pour désigner les comédiens. A partir de cela, entrée progressive dans l’action : « depuis que ce rideau s’est levé » (l.10) : préposition de temps souligne que le mécanisme est déclenché  Lever de rideau = le début de qc. Prologue s’ouvre sur un premier « lever de rideau » = un premier début (l. 1) et symbolise un second lever de rideau par le jeu de lumière à la fin de la tirade : « l’éclairage s’est modifié sur la scène »  à la fin de la tirade, on entre dans quelque chose de nouveau, dans l’histoire d’Antigone. Entrée dans l’action aussi sensible à la fin de la tirade dans la superposition des voix : « Créon, le roi, a ordonné qu’à Etéocle, le bon frère, il serait fait d’imposantes funérailles, mais que Polynice, le vaurien, le révolté, le voyou, serait laissé sans pleurs et sans sépulture, la proie des cordeaux et des chacals… Quiconque osera lui rendre les devoirs funèbres sera impitoyablement puni de mort. » 1er phrase est au discours indirect : le prologue rapporte explicitement les paroles de Créon. Mais au fur et à mesure, impression que Créon se met à parler par sa voix : accumulation pour parler de Polynice, utilisation du futur au lieu du conditionnel dans la 2de phrase  comme si le Prologue se mettait petit à petit à retranscrire directement le discours de propagande. + Cette plongée = renforcée par le jeu sur la scène : « Pendant que le Prologue parlait, les personnages sont sortis un à un. Le Prologue disparaît aussi »  Possibilité de supposer qu’après chaque présentation, le personnage présenté se retire. Comme si allaient se mettre en place pour commencer. Impression renforcée par la locution « et maintenant » (l.41) à la fin de la présentation = fin d’une étape, possibilité de passer à autre chose.

II- Un prologue qui redéfinit la pièce d’Antigone

 Prologue présente d’emblée la pièce comme une réécriture et ôte tout suspens  l’important = les changements. Tout est déjà annoncé et dit. Il s’agit donc de s’intéresser à ce qu’il y a d’original dans ce prologue et dans cette action afin de pouvoir en deviner l’intérêt.

a. Le renouvellement des personnages :

- Normalement : 1 perso se définit et se caractérise par ses actions et ses paroles au théâtre. Evtlmt par quelques remarques faites à leur sujet+ Généralement peu précis : unité d’action proscrit tout ce qui ne sert pas directement l’action. Or, ici : pas de simples esquisses, mais réels portraits qui sont faits. Physique (« la belle, la blonde … Ismène » l.12, « la petite maigre » l.4, « cet homme robuste, aux cheveux blancs … Il a des rides »

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