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Belle du seigneur - commentaire

Par   •  1 Mai 2018  •  1 427 Mots (6 Pages)  •  671 Vues

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II. UNE SCENE D’INJURES ET D’HUMILIATION

A. Un retournement de situation brutal et inattendu

1. La rapidité de la métamorphose :

- Accumulation de verbes d’action juxtaposés dans une seule phrase: « il se débarrassa […] ôta […] détacha […] ramassa » l. 21 à 23

2. Un portrait en totale opposition avec celui du vieillard :

- Ce portrait est d’autant plus contrasté qu’Ariane se retourne et se trouve nez à nez avec Solal : « elle reconnut … brésilienne » l. 26-27

- Les caractéristiques physiques mises en valeur par le narrateur correspondent au stéréotype du « beau ténébreux » dans les films sentimentaux de cape et d’épée, très à la mode en 1968 (Fanfan la tulipe, 1952 - Le Bossu, 1959 – Le Masque de fer, 1962 – Cartouche, 1962 – La Tulipe noire, 1964 – Angélique marquise des anges, 1964) : « le haut cavalier » - « aux noirs cheveux désordonnés » - « au visage net et lisse » - « sombre diamant » l.25-26.

→ le portrait semble flatteur de prime abord et insiste sur la virilité et le pouvoir d’attraction physique de Solal.

3. La dérision du narrateur pour son personnage apparaît ici discrètement :

- Solal est un héros traité un peu ironiquement par le narrateur, le registre est un peu trop grandiloquent (= ampoulé, pompeux, emphatique) :

• l’inversion des adjectifs « haut » et « noir »

• la métaphore fondée sur l’oxymore pour caractériser la beauté de Solal

⇒ débarrassé de ses oripeaux de vieillard, il se met en scène de façon ridicule dans la posture exagérée du jeune premier romantique, farouche et indompté, épris d’idéal et il en joue : discours direct l. 28 : « Oui, Solal et du plus mauvais goût ». Le contraste est total et « son noir sourire de vieillesse » l. 13 s’oppose ici à « sourit-il à belles dents » l. 28.

B. Un jeu qui dérape

Ariane est incapable de réagir, elle est en état de choc et Solal laisse éclater sa violence dans un discours plein de haine et de mépris.

4. Injonction et soumission :

- Le rabaissement d’Ariane qui a débuté par le jeu du déguisement qui se poursuit de façon cruelle et perverse : Solal utilise l’attribut du cavalier, sa « cravache » (l. 23 et 29).

• il lui a donné deux ordres qu’elle n’a pas discuté car elle était terrifiée : « Tourne-toi, idiote ! » l. 18 et « Retourne-toi » l. 24, le temps de sa transformation physique.

• Il s’exclame « bottes ! » : un NC employé à l’état brut et « il cravacha sa botte droite » l. 29-30

→ toute cette mise en scène peut être perçue comme une scène d’humiliation qui préfigure déjà le discours qu’il va tenir juste après : il fait d’Ariane ce qu’il veut, elle est d’ores et déjà « à sa botte » au sens propre

5. Un discours humiliant et rabaissant :

a) les insultes pleuvent :

« idiote » l. 18, l. 30 répété – « femelle » l. 35 répété trois fois

→ Solal s’attaque à dégrader Ariane en tant que personne et la ravale au rang de l’animal

b) les paroles humiliantes :

• « ton nez est soudain trop grand et de plus, il luit comme un phare » l. 34

→ il la discrédite physiquement

• « ainsi vengerai-je les vieux et les laids, et tous les naïfs qui ne savent pas vous séduire » l. 39-40

→ le pron. Pers. « vous » est un globalisateur : Ariane devient un bouc émissaire qui représente le genre féminin et sert d’exutoire à la vengeance de Solal au nom des hommes abusés par les femmes

c) les menaces :

• « c’est bassement que je te séduirai […] en deux heures, je te séduirai » l. 36-37 – « et tu partiras avec moi » répétition + futur de l’indicatif qui marque sa certitude

• « extasiée et les yeux frits » : description vulgaire et méprisante d’Ariane présentée en état de dépendance et de soumission totale : « extasié » = voc religieux pour désigner l’admiration pour Dieu = expression tronquée « faire des yeux de merlan frit » = regards amoureux niais et soumis

⇒ La colère de Solal est proche de la fureur : il n’a pas rencontré la « Belle du Seigneur » qu’il espérait [titre]. On est loin du mythe du héros amoureux et de passion amoureuse traitée habituellement dans les romans : les héros sont ici des anti-héros que le narrateur dénonce, le sentiment amoureux est aussi, de ce fait démystifié.

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