Stéphanie Burgaud, « Le tournant de 1863 pour la diplomatie napoléonienne », Napoléonica, La Revue, n°3, décembre 2008-février 2009
Par Raze • 21 Septembre 2018 • 1 159 Mots (5 Pages) • 431 Vues
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La France cherche alors des appuis diplomatiques. Elle obtient des soutiens au sein de la Chambre des Lords d’Angleterre à propos du rétablissement des frontières polonaises de 1815. Cependant la position de l’Autriche à ce sujet est plus ambiguë. Elle refuse une action diplomatique de notes ciblées contre Berlin, mais engage cependant de plus amples relations avec l’empereur français à travers une correspondance officieuse. Au final, Napoléon ne parvient pas à instaurer une coalition européenne pour appuyer son action engagée contre la Prusse puis dès mars contre la Russie. La plupart des Etats européens « se contentent d’en appeler à la clémence du Tsar et à la préservation de la paix sans mentionner les traités de 1815. »
III) La nouvelle donne européenne
Dès lors, la politique extérieure de la France apparaît comme un double-échec : celui d’une intervention en faveur de la Pologne et celui d’un remaniement des frontières de 1815. L’auteure vient cependant nuancer la noirceur des conséquences de 1863. Elle conteste l’idée admise par les historiens selon laquelle celles-ci entraînent la rupture par la Russie de ses relations avec la France. Elle en veut pour preuve la discussion secrète démarrée en mai entre le tsar et Napoléon III, pour tenter d’établir un consensus autour d’une éventuelle autonomisation polonaise. Pour l’auteure, la Russie de 1863 est ouverte à la discussion et n’est pas rancunière envers la France : la balle est dans le camp de l’Empereur.
Mme Burgaud montre ensuite que l’engagement diplomatique des puissances européennes a eu pour effet de galvaniser l’opinion publique russe, et ainsi de favoriser la répression sur l’insurrection polonaise. De plus, en donnant aux insurgés le faux espoir d’une intervention militaire, il a contribué à ancrer le conflit dans le temps. L’auteure explique le choix de Napoléon de ne pas se lancer dans une guerre pour la Pologne : son but est l’hégémonie française en Europe, mais par la possession du bassin du Rhin avant tout. L’autonomie de certains territoires polonais est donc dans son intérêt, mais cela ne le pousse pas à se battre pour le rétablissement de l’ensemble.
L’auteure conclut sur le succès de la diplomatie du ministre-président Bismarck. Grâce à son rôle dans la crise, notamment avec la convention d'Alvensleben, celui-ci s’est assuré d’une possibilité d’alliance avec la Russie, augmentant la puissance prussienne.
Pour conclure, dans son article, Stéphanie Burgaud revient sur l’échec diplomatique français autour de l’insurrection polonaise, en tâchant de nuancer celui-ci. Certes, Napoléon III a échoué à réunir les puissances européennes en un Congrès redessinant les frontières de 1815. Cependant, il est faux d’affirmer que son action diplomatique ait amené la France à l’isolement. Ses relations avec la Russie peuvent être ravivées. De plus, la Prusse ne tarde pas à apparaître comme un allié potentiel : le roi Guillaume Ier semble être à l’écoute d’une rectification de la carte européenne.
Ce document est intéressant car il permet de se faire une idée des relations entretenues par les grandes puissances européennes après la guerre de Crimée. Il présente la diplomatie comme un art délicat, difficile à manier. Il témoigne que la poursuite d’objectifs diplomatiques passe par un équilibre, difficile à trouver en cas de crise, entre différentes stratégies et différentes alliances. De plus, en utilisant de nombreuses citations de correspondances diplomatiques, l’auteure nous donne une idée de ton policé, feutré, caractérisant les messages même les plus durs envoyés entre les nations.
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