L’alternance démocratique est-elle encore possible en Allemagne?
Par Plum05 • 23 Mai 2018 • 1 786 Mots (8 Pages) • 551 Vues
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possède donc un grand pouvoir, qui lui permet d’administrer d’une main ferme le pays et de mettre en oeuvre des politiques importantes sans être paralysée par l’opposition. « Une grande coalition est une coalition pour réaliser de grandes tâches, déclarait Angela Merkel en 2013.». Par exemple, l’Allemagne semble accomplir de façon exemplaire sa transition énergétique.
Les partis de coalition sont habituellement portés à coopérer et la fonction indispensable de contrôle est exercée par l’opposition qui est adéquatement représentée. Il est important de souligner que la relation entre le gouvernement et l’opposition dans la politique allemande est faite de consensus et de coopération plutôt que de conflit et d’hostilité. L’histoire et la culture politique plutôt que le système électoral en tant que tel en sont les grandes responsables.
6’30’’
La crise de la grande coalition Allemande
La coalition Merkel III en perte de vitesse?
Aux dernières régionales, une grande part des électeurs des trois Länder ont rejeté le système politique allemand traditionnel. La crise migratoire met à jour une crise politique majeure : la confiance entre les Allemands et leurs politiques est désormais au plus bas depuis la guerre. La « coalition berlinoise » recule de 20,4 points en Bade-Wurtemberg, troisième Land d’Allemagne par sa population. La « grande coalition » à l’allemande, tant vantée en France, a une nouvelle fois échoué, comme en 2009, où, dans un autre contexte, elle avait été déjà durement sanctionnée en perdant 15 points de pourcentage.
Les Allemands n’ont d’ailleurs finalement jamais vu d’un bon oeil une grande coalition. C’est le passage obligé quand on ne peut pas faire autrement. Une Grande coalition n’a jamais fait naître de grands projets qui auraient pu faire rêver, car les deux grands partis se regardent, se surveillent, tout semble bloqué, les contre pouvoirs sont inexistants. La « grande coalition » semble finalement ne pas être une solution opérante pour « gérer les grands problèmes ».
Enfin, dans la grande coalition actuelle, SPD et CDU représentent 67% du Bundestag. Les deux partis d’opposition font à eux deux un petit 17%, c’est à dire 8,6% pour die Linke et 8,4% pour les Gruenen. Les partis restants n’ayant pas atteint la barre des 5% ne sont pas représentés. Plus l’opposition est faible au Parlement, moins elle a de droits. Donc ce déséquilibre des pouvoirs est un danger pour la démocratie, les partis d’opposition en étaient d’ailleurs au début du mandat à quémander des droits supplémentaires.
b. Vers une Allemagne en crise?
- En Allemagne, les populistes troublent le jeu des coalitions: Les succès de l’AfD, avec qui personne ne veut collaborer au niveau exécutif, rendent impossibles les coalitions de gauche ou de droite. Ce parti d’extrême droite, tout d’abord anti-européen pour devenir en plus anti-islam, crée un vrai tremblement de terre en Allemagne en bousculant le paysage politique. Il vient s’incruster lors d’élections de Länder devant l’un des deux grands partis, le Parti social-démocrate, SPD ou la CDU, l’Union Chrétienne démocrate d’Angela Merkel. Ce fut le cas aux élections du Bade Wurtemberg, land le plus riche d’Allemagne avec l’un des taux de chômage les plus bas. Ce fut également le cas aux élections de Saxe-Anhalt, Land de l’Est de l’Allemagne où l’AfD a été propulsée à la 2e place, ainsi que dans le Lander de Mecklembourg-Poméranie. Aux élections de Berlin du 18 septembre dernier, l’AfD n’est pas parvenue à dépasser ces partis, mais son score de 14,1% crée un séisme dans la capitale.
- Le recul des deux grands partis, le SPD et la CDU: en effet, en 1966, la grande coalition pouvait compter sur un électorat rassemblant 86,90% des suffrages exprimés en 1965, alors qu’en 2005 69,40% de ces mêmes électeurs se sont reportés sur les deux grandes forces traditionnelles de la politique allemande. C’est là la traduction d’un phénomène de toute première importance, totalement sous-estimé à l’heure actuelle, en Allemagne et plus encore en France. Exprimé de manière succincte, il se résume par ces quelques mots : la crise des deux grands partis allemands. Si en 1966, la RFA a opté pour « la grande coalition » c’est qu’elle a désiré le faire, si en 2005, l’Allemagne a choisi « la grande coalition », c’est qu’elle a quasiment été obligée de la former. C’est la conséquence la plus tangible d’une crise du système des partis allemands dont on ne commence qu’à mesurer et entrevoir tous les effets qu’elle pourrait avoir sur l’ensemble du système démocratique et parlementaire de la République fédérale.
—> Cela pose un problème dans la gouvernabilité du pays. L’Allemagne était déjà difficilement gouvernable avec 5 ou 6 partis au Bundestag. Avec 7, cela risque de devenir impossible. On l’oublie souvent en France, mais le choix de la « grande coalition » n’est pas un choix « actif » issu d’une volonté de « réformer », c’est un choix par défaut, issu de l’absence de majorité alternative. Et qui ne débouche que rarement sur des « réformes ». Avec un AfD infréquentable à plus de 10 %, les possibilités d’alliances risquent d’être très limitées. Il faudra donc observer de près les alliances dans les trois Länder où il ne semble plus y avoir de coalitions « classiques. » .
CONCLUSION:
Aujourd’hui, les élections législatives approchent à grands pas, elles auront lieu en septembre prochain.
Le sentiment de blocage, l’érosion des deux grands partis qui s’accélère montre que l’Allemagne est arrivée au bout de ce modèle. Cette grosse machine qu’est la grande coalition se lasse elle-même et lasse les gens, elle pousse les électeurs vers l’abstention, puis les abstentionnistes dans les bras d’un parti populiste d’extrême droite quand celui-ci émerge.
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