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La croissance économique est-elle durable

Par   •  6 Octobre 2017  •  3 502 Mots (15 Pages)  •  1 006 Vues

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- Pourtant, la croissance économique reste toujours menacée aussi bien à court terme qu'à long terme.

- Face aux crises de surproduction à court terme et aux dégradations de l'environnement à long terme...

L'insuffisance potentielle des débouchés pèse sur la croissance économique. L'effondrement de la croissance économique en 2009 est venu nous rappeler celui de 1929, analysé depuis Keynes (Théorie générale, 1936) comme la conséquence de l'insuffisance de la demande effective. Aux États-Unis et dans un certain nombre de pays européens, le nécessaire désendettement des ménages et des entreprises a fait s'effondrer la consommation et surtout l'investissement, immobilier pour les premiers et productif pour les secondes. Roy Forbes Harrod et Evsey Domar ont traduit cette conditionnalité de la croissance à l'existence de débouchés suffisants pour écouler la production par une expression saillante : la croissance est «sur le fil du rasoir» (premier problème de Harrod). L'investissement est en effet à la fois du côté de la demande et du côté de l'offre, en conséquence, le processus d'accumulation du capital nécessite que l'effet multiplicateur (côté demande) et l'effet accélérateur (côté offre) se combinent harmonieusement dans une même progression du revenu, ce qui n'est pas, a priori, garanti : g = s/v; s, le taux d'épargne exogène des ménages et v, le coefficient exogène de capital des entreprises ne permettent pas, sauf hasard heureux, d'égaliser g, la croissance équilibrée. De plus, les contraintes monétaires et financières de la croissance. Les crises de 1929 et de 2009 ont aussi la caractéristique d'être des crises financières. Après avoir favorisé l'expansion économique par le développement de l'endettement à la faveur des innovations financières et d'anticipations exagérément optimistes, les banques et les marchés financiers ont basculé dans le pessimisme et l'obsession du désendettement des acteurs privés. La lecture du chapitre 12 de la Théorie générale de Keynes fait souligner aux postkeynésiens, tels Hyman Minsky ou André Orléan en France, le rôle central de l'incertitude dans le fonctionnement de nos économies de marché. La précarité des anticipations liée à cette absence de connaissance du futur, ne serait-ce que sous la forme du risque probabilisable, conduit, dans un cadre où la réglementation ne vient pas borner les actions des agents économiques, à la succession de «conventions financières» (Orléan) irréductiblement versatiles - optimistes ou pessimistes. Les effets sur l'économie de ces changements brusques de convention financière sont d'autant plus dévastateurs que l'endettement se développe, c'est-à-dire qu'il permet de jouer une partie de la richesse future au casino d'aujourd'hui. S'ensuivent des épisodes de purge d'autant plus longs et/ou profonds qu'on aura abusé de l'endettement dans une voie qui se révèle, avec le temps, illusoire. Enfin, les dégradations de l'environnement induites par la croissance et la loi de l'entropie annoncent la fin de la croissance à long terme. La croissance économique qui s'est imposée depuis la révolution industrielle prélève dans l'environnement, dans des stocks renouvelables (les ressources halieutiques par exemple) et non renouvelables (le pétrole par exemple), et y rejette des déchets (par exemple, les gaz à effet de serre qui contribuent au réchauffement climatique ou les déchets nucléaires qui constituent une menace extrême de pollution). Faute de carburant, la croissance économique est menacée, et le rapport Stern évalue aussi le coût de l'inaction contre le réchauffement climatique entre 5 % et 20 % du PIB mondial. La surexploitation de l'environnement au risque de sa fragilisation trouve bien souvent sa source dans le fait qu'il est un bien libre (l'air pur menacé par les rejets excessifs de tout genre) ou une ressource commune (la ressource halieutique menacée d'épuisement par la surexploitation). Selon Georgescu-Roegen (1970), l'économie est «mécanique», elle puise dans un stock limité de ressources naturelles - puisque la planète Terre est par définition un système fermé - pour les transformer en énergie et en produits. Elle est donc soumise à la loi de l'entropie : il arrivera un jour où les stocks seront épuisés et ce jour-là la croissance s'éteindra: la «mort de la chaleur» nous menace. En 1972, les époux Meadows ont alerté des «limites de la croissance» dans un rapport pour le Club de Rome qui a fait date. Ils y prônaient, à l'instar de Georgescu-Roegen, la « décroissance » afin de faire reculer cette «mort de la chaleur» qu'ils évaluaient pour les années 2015-2030. Depuis 1987, la notion de développement durable s'est imposée dans les réunions internationales et, pour les partisans d'une durabilité forte, nos faibles capacités de substitution au capital naturel que nous diminuons, d'autres capitaux pour entretenir la croissance économique, doivent nous conduire à choisir la décroissance.

- L'homme a-t-il encore les moyens d'assurer la poursuite de la croissance économique?

Les interventions régulatrices de la croissance par l'État et la société sont-elles encore à la hauteur? Depuis la contre-révolution monétariste dans les années 1970, le keynésianisme de régulation de la demande effective a été largement abandonné. Si les politiques de stop and go ont participé de la croissance française des Trente Glorieuses par exemple (5,5% par an), le tournant de la rigueur en 1983 en a depuis sonné le glas en Europe. La relance de Pierre Mendès France en 1954 par l'investissement après le refroidissement d'Antoine Pinay en 1952 avaient permis de limiter l'inflation sans casser la croissance économique par une morosité durable de la demande qui n'aurait pas manqué de diminuer l'effort d'investissement caractéristique de la période (25 % du PIB en moyenne) et ralentir la croissance potentielle. Ces politiques ne sont pourtant plus menées par les gouvernements en Europe depuis vingt-cinq ans. Face à la crise économique à la fin de l'année 2008, le nécessaire plan européen de relance n'a pas vu le jour et les plans nationaux sont restés bien plus timides (de l'ordre de 1 % du PIB européen en cumulé) qu'en Chine ou aux États-Unis qui ont su en revanche faire preuve de pragmatisme keynésien. Le savoir et la pratique keynésiens ne

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