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LE JUGE ET LE CONTENU DU CONTRAT

Par   •  15 Février 2018  •  3 268 Mots (14 Pages)  •  1 269 Vues

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Il faut aussi rappeler que la convention, comme dans la plupart des droits de notre continent, n’est valable que si elle est conforme à l’ordre public ou encore à un autre standard de jugement, les bonnes moeurs. Cette idée de soumission du contrat à l'ordre public était déjà consacré en droit romain.

B/ UNE POUVOIR D'INTERVENTION DU JUGE CONSACRE EN DROIT POSITIF

Le principe d'intangibilité n'est pas absolu, et le juge, peut-être porté par un élan protectionniste, n'a pas manqué au fil des années, oubliant parfois même de se fonder sur la règle de droit, de le rappeler.

Le juge français peut interpréter le contrat afin de faire ressortir la volonté des parties mais pas seulement. Nous pouvons nous rendre compte qu'il s'est arrogé le droit dans certaines circonstances de s'immiscer dans le contrat portant ainsi atteinte au principe d'intangibilité du contrat. Le juge français n'hésite pas à substituer dans un contrat une stipulation inefficace ou défectueuse ( C.Cass Civ 9 novembre 1981 ) voire dans une logique de forçage du contrat, sous couvert de mettre en lumière la volonté tacite des parties, d’ajouter ou d’associer des obligations à certains contrats.

Ainsi la Cour de cassation, dans un arrêt du 5 mai 1998 a admis que « Les tribunaux peuvent, quand une convention a été passée en vue de la révélation d'une succession en contrepartie d'honoraires, réduire ces derniers lorsque ceux-ci paraissent exagérés au regard du service rendu ». Il s'agit ni plus ni moins d'une reconnaissance du pouvoir de révision du contrat et donc de son pouvoir d'imixtion dans le contenu du contrat. Le juge peut également réviser des clauses d'indexation en substituant des indices. Le juge va être alors habilité à opérer une substitution d'indice alors que normalement la disparition de l'indice devrait entrainer la caducité de la clause.

En outre, la Cour de cassation n'a pas hésité à imposer une obligation de sécurité dans les contrats de transport de voyageurs et dans les ventes de produits dangereux, ainsi qu'une obligation d’information pour les contractants professionnels tout comme les obligations de garantie et de prudence et de surveillance (C.cass,13 octobre 1987). On voit donc que le pouvoir créateur du juge va ici très loin, tellement loin que le contrat se trouve modifié dans sa substance et peut ne plus être le contrat que les parties ont initialement voulu conclure.

Cela pourrait être compréhensible si ce pouvoir créateur était le fruit d'une permission accordée par le législateur. Mais nous pouvons nous rendre compte que de plus en plus, par le jeu de manœuvres prétoriennes, le juge français s'arroge le droit de modifier le contrat en s'appuyant parfois de façon bancale sur le principe de bonne foi figurant à l'article 1134 al 3 du Code civil ( C.Cass 3 novembre 1992 ). Il s'agit là pour le juge d'un moyen judiciaire permettant de remédier à l'injustice qui peut être occasionnée par l'exécution d'un contrat dont l'équilibre a été bouleversé par la survenance de circonstances imprévisibles.

Aux Etats-Unis, le pouvoir créateur du juge se décline autrement. Le pouvoir créateur ne s’active que lorsqu’il y a une véritable lacune dans le contrat. Il existe aussi une pratique semblable à celle en France, à savoir qu’il existe des clauses implicites légales que la loi fournit. En premier lieu, respectueux de la volonté des parties, le pouvoir du juge intervient pour expliciter ou rendre clair dans un contrat une clause juridique sous-entendue. En deuxième lieu, on trouve donc les clauses qui sont imposées et supposées directement par la loi dans le contrat(UCC § 1.304 et Restatement Second § 205). Puisque ces clauses sont imposées par la loi, on peut dire qu'il n'y a pas de pouvoir créateur du juge, du moins, ce pouvoir est infime comparé à celui dont dispose le juge français. Cela s'expliquerait peut-être par la culture éminemment libéral des Etats-Unis qui veut que la volonté, l'individu soit libre de toute intervention extérieure.

Pourtant en droit français l'intervention du juge n'est pas le fruit d'une démarche arbitraire et autoritaire. Le juge par son intervention permet aux parties de garantir l'équilibre du contrat tel que prévu à l'origine. La Cour de cassation se réfère à la volonté des parties, mais ce n'est qu'une façade. Le juge veut avant tout sauver le contrat.

II/ DE L'ENCADREMENT NECESSAIRE DU POUVOIR D'IMMIXTION DU JUGE

Dire que le juge est le serviteur de la loi et du contrat ne veut pas dire qu'il en est l'esclave et qu'il est passif mais veut dire que s'il doit respecter les clauses contractuelles, il va également influer sur le contrat car son but, justement, est d'en être le serviteur. L'intervention du juge est donc guidée par la recherche de la perennité contractuelle et fatalement par la recherche d'une équité et d'un équilibre contractuel.

A/ UNE INTERVENTION DEVANT ETRE GUIDEE PAR LA BONNE FOI ET L'EQUITE

L'article 1134 alinéa 3 du Code civil dipose que les conventions légalement formées « Elles doivent être exécutées de bonne foi » En lecture de l'alinéa 3, le pouvoir d'imixtion du juge doit être accepté mais que si la bonne foi reste son outils principal et que celle-ci s'inscrit dans une logique utilitariste. Le standard de bonne foi privilégierait alors plus le contrat que l’une ou l’autre des parties. L’intérêt premier de l’exigence de bonne foi ne serait pas alors uniquement de permettre un rééquilibrage en vertu de présupposés économiques mais d’assurer la prolongation de l’intérêt commun des parties et donc de poursuivre le contrat dans les meilleurs conditions.

L'un des exemples pourrait être le droit allemand. Inspiré par le juriste germanique Oertmann, le droit allemand, reconnaît un droit au changement du contrat à exécution successive. Il s'appuyait à l'origine sur la clause rebus sic standibus, puis il s’est tourné vers l’impossibilité due aux circonstances économiques, ensuite vers la théorie de la « disparition du fondement contractuel », pour enfin se fonder sur la bonne foi par le biais du « Geschäftsgrundlage ».

Le §313 du BGB évoque « les troubles du fondement contractuel » : « si les circonstances devenues le fondement contractuel

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