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Dissertation sur l'application controversée des articles 14 et 15 du Code Civil.

Par   •  30 Mai 2018  •  1 833 Mots (8 Pages)  •  534 Vues

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Cependant, le champ d’application étendu de ces règles de compétence a aussi pendant longtemps permis à la jurisprudence de mettre en place un dispositif permettant à la partie française de s'opposer à l'efficacité en France des décisions étrangères. En effet, les tribunaux ont fait de ces privilèges de juridiction des critères de compétences nécessaires et non facultatifs. Cela garantissait la possibilité pour les parties françaises d'y avoir recours, en cas de besoin, à l'issue d'une procédure déroulée à l'étranger et dont le résultat ne leur avait pas été favorable. D'un côté, l'article 14 permettait ainsi au plaideur français d'introduire une nouvelle action en France, l'effet de l'autorité de la chose jugée à l'étranger ne pouvant pas lui être opposé. De l'autre, au moment de la demande d'exequatur de la décision étrangère, la partie française pouvait soulever l'incompétence des tribunaux étrangers et empêcher celle-ci de déployer ses effets sur notre territoire.

Ce mécanisme a vivement été critiqué par la doctrine pour leur caractère nationaliste et la manifestation d’une défiance à l’égard des juridictions étrangères qui seraient susceptibles de juger un ressortissant français.

Ainsi, face à ces critiques, la Cour de cassation notamment paraît décidée à effacer leurs applications les plus contestables en révélant leur caractère subsidiaire et facultatif (II).

- La remise en cause des articles 14 et 15 par la consécration de leur caractère subsidiaire et facultatif

- La jurisprudence de la Cour de cassation comme élément majeur de reconnaissance de leur caractère facultatif

Suite aux nombreuses critiques doctrinales visant l’application des articles 14 et 15, la Cour de Cassation abandonne définitivement dans l'arrêt Prieur (Civ. 1er, 23 mai 2006), le privilège qu'elle avait elle-même conféré aux défendeurs français, n'ayant pas renoncé à la compétence des tribunaux nationaux, en déclarant que l'article 15 ne consacre qu'une compétence facultative de la juridiction française, impropre à exclure la compétence indirecte d'un tribunal étranger. Cette décision met fin à un privilège indirect de juridiction, ainsi les effets les plus nocifs des privilèges de juridiction ont été abandonnés.

Près d’un an après, dans l’arrêt Fercometal (Civ. 1er , 22 mai 2007) elle énonce que l'article 14 « n'ouvre au demandeur français qu'une simple faculté et n'édicte pas à son profit une compétence impérative, exclusive de la compétence indirecte d'un tribunal étranger déjà saisi et dont le choix n'est pas frauduleux ». Cette solution a été réaffirmée par la première chambre civile de la Cour de cassation dans l’arrêt Schuman en date du 16 décembre 2009 concernant la reconnaissance de jugements étrangers.

La jurisprudence a ainsi considéré que ces articles étaient facultatifs car pouvant faire l’objet d’une renonciation de la part des parties. En effet, l'introduction d'une action à l'étranger, même postérieure à la saisine du juge français, fait présumer la renonciation au privilège de juridiction (Civ. 1er, 30 juin 1992), tout en rappelant qu'il ne s'agit que d'une simple présomption qui peut toujours être renversée (Civ. 1er 20 novembre 1990). Mais si une renonciation expresse (par la saisine d'un tribunal étranger, par la conclusion d'une clause attributive de juridiction ou par une clause compromissoire) ne pose pas de difficultés particulières, il en va autrement pour la possibilité d'une renonciation tacite. Une telle possibilité est, théoriquement, possible (Corn. 13 févr. 1950). Mais encore faut-il que cette renonciation soit « établie » (Civ. 1er , 5 mai 1976), c'est-à-dire qu'elle soit réelle et non équivoque.

- La primauté du droit communautaire et du droit commun comme élément restrictif à l’application des articles

Les articles 14 et 15 ont un caractère exorbitant. La jurisprudence estime que les articles 14 et 15 n'ont lieu de s'appliquer que si aucun critère ordinaire de compétence territoriale ne désigne une juridiction française. Ainsi, les privilèges de juridiction des articles 14 et 15 ne jouent qu'à défaut de compétence ordinaire des tribunaux français.

Le caractère subsidiaire de la compétence fondée sur la nationalité a été affirmé par la première chambre civile de la Cour de cassation dans un arrêt du 19 novembre 1985. Cette solution a été dictée par le souci de favoriser la reconnaissance des décisions françaises à l'étranger. Cette jurisprudence inverse l'ordre des priorités en matière de compétence: ce sont d'abord les règles de compétence de droit commun qui doivent être mises en œuvre. Ce n'est que si aucun tribunal français n'est compétent au regard de ces règles, que pourront être invoqués les privilèges de juridiction fondés sur la nationalité.

De plus, à l’échelle de l’union européenne, l’article 3 du règlement de Bruxelles I pose pour principe que l’on ne peut faire jouer les articles 14 et 15 lorsque le défendeur se situe dans un Etat membre de l’Union européenne. Ainsi, s’agissant du juge français, les règles de droit commun de la compétence internationale s’appliquent lorsque le droit européen ne s’applique pas. Le droit commun s’applique en présence d’un litige qui ne rentre pas dans le champ d’application matériel et spatial d’un règlement européen de droit international privé et plus particulièrement des Règlements Bruxelles 1 et Bruxelles 2 bis, ce qui révèle d’autant plus le caractère subsidiaires des articles 14 et 15 du code civil.

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