Commentaire arrêt Civ 1ère 13 Janvier 1998
Par Ninoka • 12 Février 2018 • 2 150 Mots (9 Pages) • 1 054 Vues
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La seule erreur sur les qualités substantielles de la chose objet du contrat ne suffit pas à faire annuler le contrat. En effet, pour que l'action en nullité soit recevable, il faut nécessairement prouver que la victime de l'erreur a contracté dans une conviction erronée.
II- La conviction erronée de l'acquéreur, motif de nullité de la vente :
L'une des conditions de l'action en nullité, et sans doute la plus importante, est le caractère déterminant de l'erreur, c'est-à-dire que sans cette erreur, la victime n'aurait pas contracté (A). Avec son arrêt, la Cour de cassation, ici, rappelle toutes les conditions d'une action nullité, et c'est pour cela qu'il sera un arrêt de référence pour la jurisprudence postérieure (B).
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A) Une erreur devant être déterminante du consentement de la victime:
Dans son dernier attendu, la Cour de cassation rappelle le caractère déterminant que doit avoir l'erreur pour pouvoir être cause de nullité, en énonçant qu'il fallait rechercher si « la société n'avait pas contracté dans la conviction erronée de cette authenticité ». Ce caractère de l'erreur est une manière, pour le législateur, de protéger le consentement, néanmoins il faut pouvoir prouver que l'erreur en question ait été déterminante du consentement.
Conformément aux règles de la preuve inscrite dans le code civil, c'est à celui qui se prévaut de l'erreur qui doit prouver que cette dernière a entraîné un vice de consentement, et donc que sans cette erreur il n'aurait pas conclu le contrat. C'est, d'ailleurs, pour cette raison que la Cour d'appel de Paris, dans notre affaire, avait rejeter la demande en nullité en estimant que comme les conclusions de l'expert ne permettait pas d'être certain que l’œuvre n'était pas authentique, les demandeurs n'avait pas rapporté la preuve de l'erreur.
Néanmoins, la Cour de cassation reproche à la Cour d'appel de ne pas avoir recherché si la conviction de l'acquéreur était ou non erronée. On peut alors se demander si la victime se prévalant de l'erreur n'avait plus à faire la preuve du caractère déterminant de l'erreur. En réalité, pour démontrer qu'il y a bien erreur, il va falloir établir une comparaison entre ce qui a déterminé l'une des parties à conclure, en l'espèce la certitude de l'authenticité de l’œuvre, et ce qui s'avère être, le doute de l'authenticité. Ainsi, on remarque que même si l'erreur n'est pas certaine et donc « improuvable », en l'espèce l'expert indique qu'on ne peut pas affirmer que l’œuvre est authentique ou non, il est possible d'invoquer que le consentement ait pu être vicié.
Par conséquent, avec cette décision de la Cour de cassation, on comprend bien que le doute peut être constitutif d'erreur entraînant la nullité du contrat, puisque dès lors qu'il existe, le consentement ne peut plus être considéré comme éclairé. On retrouve ainsi le principe selon lequel sans cette erreur la victime n'aurait pas contracté.
B) Un arrêt de la Cour juste servant de référence à la jurisprudence postérieure :
Cette solution de la Cour de cassation apparaît juste, puisqu'en matière d’œuvre d'art, il est normal que l'acquéreur d'une œuvre d'art présentée comme réalisée par un tel puisse obtenir la nullité de la vente, s'il apparaît qu'après la conclusion du contrat, un doute apparaisse quant à la véritable identité de l'auteur de l’œuvre, et donc sur son authenticité. On peut expliquer cette solution, par le fait que si l'acheteur a cru acquérir une œuvre d'un grand peintre reconnu, comme en l'espèce, il a du payer une certaine somme, alors que s'il avait eu connaissance de l'incertitude autour de l'authenticité de l’œuvre en question, il n'aurait sans doute pas été prêt à débourser une telle somme. En effet, dans le domaine de l'art, la valeur d'une œuvre dépend de son auteur et de la réputation de ce dernier.
Par ailleurs, cette décision de la 1ère chambre civile a été le point de départ d'une jurisprudence plutôt constante allant dans le sens de cette décision. Par exemple, dans un arrêt de la 1ère chambre civile du 5 Février 2002, la Cour de cassation casse l'arrêt de la Cour d'appel au motif que « les juges du fond n'avaient pas recherché consentement de l'acheteur n'avait pas été vicié par une conviction erronée » s'agissant de l'authenticité de l’œuvre.
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Fiche d'arrêt Cass. Civ 1ère 15 Novembre 2005 :
Il s'agit d'un arrêt de cassation rendu par la 1ère chambre civile de la Cou de cassation, le 15 Novembre 2005.
Dans les faits, lors d'une vente publique, le commissaire-priseur a déclaré un tiers adjudicataire d'un tableau désigné, comme réalisé par le peintre A. Néanmoins, quelque temps après la conclusion de la vente, l'adjudicataire a appris que le tableau avait été réalisé non pas par le peintre A, mais par un enfant de onze ans à la demande du peintre A. Ce dernier a, de plus, délivré un brevet de garantie destiné à être collé au dos de l’œuvre. Par suite, l'acquéreur a donc assigné le commissaire-priseur en annulation de l'adjudication.
Nous n'avons pas d'informations sur le jugement de 1ère instance. Dans son arrêt du 8 Octobre 2003, la Cour d'appel de Paris déboute l'acquéreur de sa demande en annulation, aux motifs que l'exécution personnelle de l’œuvre n'était pas une condition suffisante à la reconnaissance de la qualité de l'auteur, et qu'en l'espèce l'authenticité de l’œuvre, condition unique du consentement, avait donc été satisfaite. Par ailleurs, sur la demande en dommages et intérêts, la Cour d'appel a estimé que les informations énoncées dans le catalogue de vente étaient suffisantes, et donc qu'aucune faute ne pouvait être reprochée au commissaire priseur. L'acquéreur forme alors un pourvoi en cassation.
L'annulation d'une
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